Projet Lower Manhattan, compte rendus, 2007-2012

Romans internationaux

Équipe LMP
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Cette publication rassemble les compte rendus réalisés par l’équipe de recherche du projet LMP au sujet de romans internationaux (Algérie, Égypte, Espagne, France, Royaume-Uni, etc.) traitant des attentats du 11 septembre 2001. Ces compte rendus ont été publiés entre 2007 et 2009 sur le site web du Lower Manhattan Project.

Les compte rendus LMP sont structurés selon un schéma qui permet d’identifier les œuvres selon leur genre, leurs modalités énonciatives, leur paratexte et leurs aspects médiatiques. Ces compte rendus analysent les modalités de la présence du 11-Septembre dans les œuvres et évaluent la pertinence de celles-ci en regard du processus de fictionnalisation et de mythification du 11-Septembre.

Avec les contributions de Julie Bramond, Simon Brousseau, Neli Dobreva, Daniel Grenier, Aurélie Lagadec, Emmanuelle Leduc, Jean-François Legault, Patrick Tillard et Gabriel Tremblay-Gaudette.

Cette section est en cours d’intégration.

Articles de la publication

Julie Bramond

11 septembre mon amour

L’œuvre de Lang débute par une section intitulée «Les voix». L’auteur évoque toutes ces personnes victimes du 11 septembre qui, quelques minutes avant de mourir, appellent leur famille ou laissent des messages sur le répondeur de leurs proches. La parole est aussi donnée à ceux qui ont reçu ces appels, ceux qui ont été les derniers interlocuteurs des victimes. L’auteur énumère ensuite sur quatre pages les noms de certaines victimes, leur âge, ainsi que l’endroit de leur décès.

Jean-François Legault

Allah superstar

Œuvre référencée: Y.B. 2003. Allah superstar. L’une des répercussions des attentats du 11 septembre 2001 fut la montée en Occident du racisme envers les musulmans. Déjà sources de bien des tensions, les relations entre le monde arabe et le monde occidental se sont compliquées encore davantage. Pour un pays comme la France, qui possède un lourd passé colonialiste au Maghreb musulman, les attentats terroristes ont trouvé un écho dans la montée de la violence sur son territoire.

Jean-François Legault

Amrikanli, un automne à San Francisco

À l’automne 1998, un professeur en histoire comparée de l’Université du Caire déambule à travers les rues de San Francisco. Invité à venir enseigner pour un semestre par un collègue ayant quitté l’Égypte, son immersion dans la société américaine ne se fait pas sans difficulté. À travers ses yeux d’étrangers, le lecteur est plongé dans un sentiment d’étrangeté familière : il entre « pour la première fois » en contact avec un paysage quotidien, celui de l’Amérique et de ses paradoxes. Au moment où le scandale Clinton/Lewinski inonde l’espace médiatique, il tente de trouver ses repères, en acceptant néanmoins toutes les expériences en bloc, comme l’essai peu concluant d’un «peep-show» à 50¢ ou la lecture de la chronique « Sexualité » du journal local où un jeune homme raconte ses déboires dans l’exploration de son homosexualité. Son regard est celui d’un observateur froid, impassible et détaché. Ce n’est que par le choix de l’auteur des représentations (l’omniprésence des jeunes sans-abris, la peur engendrée par une violence supposée mais ne se manifestant jamais, la vision d’un Berkeley transformé en l’exact contraire des idéaux que prônaient la contre-culture des années 60, etc.) qu’une certaine critique sociale des États-Unis perce.

Daniel Grenier

Chicago

Chicago, second roman traduit en français d’Alaa el Aswany, raconte l’histoire de plusieurs personnages au cours d’une année dans la “ville des vents”, quelques temps après les attentats du 11 septembre. À travers le regard d’une quinzaine de personnages, tous liés de près ou de loin à la faculté de médecine de l’Université de l’Illinois, l’auteur recrée une microsociété dans laquelle il fait entrer en contact les différents points de vue et les différentes visions du monde. Chicago est avant tout un roman d’opinions en confrontations, où les pensées personnelles sont mises à rude épreuve lors des interactions humaines. Les dialogues sont fréquents, mais le dialogue entre les cultures est difficile, bloqué par les préjugés et la mauvaise foi. L’Amérique est ici présentée à la fois comme une terre d’accueil et un obstacle à surmonter. Chaque tranche de vie est racontée en alternance, ce qui forme un kaléidoscope d’idées, de passions et de déchirements. Deux communautés se font face et tentent de s’apprivoiser: les Égyptiens, pour la plupart étudiants boursiers, et les Américains qui sont leurs guides, leurs professeurs ou leurs concurrents. El Aswany, en se concentrant ainsi chapitre après chapitre sur l’évolution de ses multiples personnages, chacun pris dans son propre destin, tisse lentement une tapisserie imbriquée et complexe de sentiments et d’incompréhension mutuelle qui, par la force des choses, prend des allures d’étude sociologique. L’ensemble de ces destins personnels, qu’ils soient tragiques ou pathétiques, finit par donner le sentiment d’un tout qui questionne les assises de la vie occidentale.

Simon Brousseau

Eleven

Eleven est un roman épistolaire à la sauce numérique qui consigne les nombreux courriels que Martin Davies, le personnage principal, envoie et reçoit lors du 11 septembre 2001. Martin Davies vit en Angleterre, à Cardiff. Il travaille dans un bureau et passe le plus clair de son temps à procrastiner, à discuter de la soirée de la veille, ou encore de celle à venir avec ses amis. L’auteur joue sur l’effet de décalage induit par la connaissance qu’a le lecteur des évènements tragiques à venir. Martin Davies souffre d’une sorte de malaise fin de siècle, ses amours sont de pathétiques échecs et il consomme de la cocaïne avec ses amis, le week-end, simplement pour passer le temps. L’auteur semble vouloir relativiser ces problèmes sommes toutes anodins en les confrontant à l’Histoire, ce grand problème, mais il semble aussi suggérer que la différence d’échelle entre les souffrances individuelles et collectives n’interdit pas nécessairement d’établir certaines corrélations. Les individus sont perdus parce que la marche du monde est une immense déroute, à moins que ce soit l’inverse, tel est la réflexion ressassée par ce court roman épistolaire. Autre fait intéressant : le livre laisse également entrevoir que le traumatisme du 11 septembre, du point de vue d’une jeunesse londonienne blasée, n’est pas nécessairement aussi profond qu’on pourrait s’y attendre. Les personnages réagissent fortement aux images qu’ils perçoivent à la télévision, mais ils continuent tout de même de vaquer à leurs occupations, par exemple à planifier une réunion d’affaires.

Patrick Tillard

Journal d’une année à part: 11 septembre 2001 – 2002

Le livre se présente comme un journal de bord du 11 septembre 2001 au 11 septembre 2002. Journaliste pour Canal +, pourvue d’impressionnants moyens financiers (appartement dans le bas Manhattan à deux pas du World Trade Center, déplacements incessants dans le monde, accès aux lieux de pouvoir), l’auteure est constamment aux premières loges de l’actualité. Chambre d’écho du monde médiatique (la plupart de ses amis sont journalistes télé ou photographes de presse), ce journal retrace le quotidien dans l’après-11 septembre, observe les réactions du pays, sombre parfois dans une certaine commisération, fait un inventaire des réactions très diverses ayant toutes comme centre le 11 septembre.

Julie Bramond

La Dernière nuit d’un damné

L’œuvre de Slimane Benaïssa évoque Raouf, un jeune américain, chercheur en informatique, de mère libanaise et de père égyptien, dont le quotidien va être bouleversé par une rencontre, celle d’Athmane. Raouf mène une vie d’occidental ordinaire : il travaille dans une entreprise d’informatique, vit avec sa fiancée Jenny et leur chien, et rend visite chaque semaine à sa mère récemment veuve. Sa vie bascule le jour où Athmane l’emmène écouter un prêche musulman. Raouf ressent le besoin de retrouver sa foi en l’Islam et voit en Athmane un guide spirituel auquel il voue une admiration sans limite, même s’il réfute quelques fois les idées de son ami. Petit à petit, Raouf s’éloigne de son entourage, quitte Jenny, ne donne plus de nouvelles à sa mère afin de se rapprocher d’Athmane et de Djamel qui l’aident sur le chemin de son repentir, officialisé par un imam lors d’une prière collective. Son repentir effectué et approuvé par sa nouvelle communauté, Raouf, choisi pour être martyr, s’isole avec cinq individus dans un lieu gardé secret.

Patrick Tillard

La Jubilation des hasards

Eugenio Tramonti est journaliste dans la région marseillaise, mais il se définit aussi comme un « écrivain négatif » après avoir renoncé à l’écriture. Mariana est sa compagne, Choisy-Legrand son patron. Shoshana Stevens, vieille dame, modeste, gentille, à la limite effacée, lui rend un jour visite pour lui expliquer que le père de Eugenio, père mythique, guide en montagne emporté par une avalanche lorsque Eugenio était très jeune, est vivant, réincarné dans un bébé à New York. Curieusement, Eugenio décide de la croire. Le récit peut alors commencer à spiraler, repoussant sans cesse l’échéance, c’est-à-dire la rencontre entre Eugenio et le bébé et ainsi l’éventuelle reconnaissance.

Emmanuelle Leduc

La théorie des cordes

Comme le titre l’annonce, La théorie des cordes de Carlos Somoza élabore son intrigue autour de la célèbre et complexe voie envisagée par la physique théorique. Intégrant habilement  différents genres (science-fiction, horreur et thriller), le roman se centre sur le personnage d’Elisa Robledo, jeune physicienne aussi belle que douée, qui participe en 2005 à une expérience ultra-secrète sur l’île de New Nelson : le projet Zigzag. À l’aide de la théorie des cordes, les scientifiques confinés sur l’île, surveillés 24h sur 24h par des militaires armés jusqu’aux dents, parviennent à ouvrir les cordes temporelles afin de voir en temps réels des images du passé. Ils peuvent alors visionner, en 2005, des images remontant à l’ère paléolithique. Si le projet présente des avancées immenses pour la compréhension de l’histoire et de l’anthropologie, il n’est pas sans risque. Les recherches sont subitement arrêtées par la mort atroce d’une scientifique longuement torturée et la disparition tout aussi mystérieuse d’un autre. Devant l’horreur incompréhensible, le projet avorte et les participants, traumatisés, retournent à des travaux plus conventionnels, engagés au plus grand secret sur les événements. Dix ans plus tard, tous les participants de l’expérience sont massacrés un par un par une créature créée par l’ouverture d’une corde spécifique en 2005 : Zigzag. Pour découvrir la vérité et éviter une mort certaine, le groupe de scientifique survivant est contraint de retourner sur l’île de New-Nelson afin de comprendre ce qui a bien pu s’y passer, dix ans auparavant.

Patrick Tillard

Le jour de mon retour sur terre

Choc de l’explosion, cendres et effondrement des tours: un homme surgit du brouillard de cendres, comme dans un film. Le monde quotidien s’est effondré, le traumatisme est total. L’homme ne rentrera pas chez lui, il ne se rend pas à son travail. Il laisse sa femme et ses enfants en arrière, dans une vie autre, et rejoint la masse des sans-abris au coeur de la Ville sans nom. Dans ce pays mythifié, le Président est le seul lien unificateur après les attentats et ses discours, même décortiqués comme de la propagande, tentent de rassembler ce qui peut encore l’être de la population blessée. Dans sa détresse, l’homme marche, dort dans le parc, mange ce qu’il trouve dans les poubelles alors qu’une limousine blanche, lumineuse, longue le croise dans les rues de la Ville à plusieurs reprises. Jusqu’à la rencontre avec une femme dans la même situation que lui. C’est le jour de Noël suivant que se situe « le jour de son retour sur terre ».
De l’amour de l’homme et de la femme, Adam et Ève post-apocalypse, naîtra un enfant, offert à l’occupante de la limousine.

Patrick Tillard

Le Passage des ombres

Passage des ombres est le récit de la confrontation entre trois êtres ayant chacun perdu une personne chère dans des circonstances culpabilisantes: la femme de William Barber, historien américain, est morte dans les attentats du World Trade Center, l’enfant de Guillaume Barbier (notez la conformité des deux noms) est mort accidentellement et enfin le mari volage d’Élise, amie d’enfance de Guillaume, est mort en Thaïlande. Chassé-croisé ponctué par l’amour de la musique — ils sont tous trois musiciens — le roman évoque les difficultés de chacun à se retrouver soi-même ou face aux autres, dans une évolution douce et lente, ponctuée par la musique et leurs répétitions communes. Le roman se passe dans la Drôme, dans le village de Malemort, principalement dans la maison prêtée par Guillaume à William. Peu à peu, le récit passe insensiblement des termes du roman psychologique à ceux d’une enquête policière liée à l’imagination de William et de Guillaume face à Élise et à leurs passés. La découverte d’une tête coupée sur un pont et à propos de laquelle Guillaume, juge d’instruction, enquête permet d’évoquer parallèlement un assassinat du milieu du XVIIe siècle dans le village de Malemort où une jeune fille a eu également la tête séparée du tronc. Lors de travaux de rénovation dans la maison prêtée, la découverte des archives du chirurgien du village de cette époque permet toutes les hypothèses quant au responsable de l’assassinat. Plusieurs niveaux de lecture, plusieurs hypothèses ouvertes par l’imagination des protagonistes relancent l’intérêt jusqu’à la fin du roman. Portraits de désirs mesurés, sentiments et passions plus ou moins fortement ravivés ou laminés par le fil du temps d’une vie passée, interrogations sur l’amitié, l’amour, le deuil, douleur et souffrances muettes, forment une trame psychologique particulièrement dense tout au long du roman.

Simon Brousseau

Let the Great World Spin

Si Let the Great World Spin est un roman qui porte la marque du onze septembre 2001, le rapport aux évènements qui y est développé est bien particulier. Plutôt que de narrer la tragédie, Colum McCann propose une relecture du passé teintée par l’effondrement des tours. On peut dire que le roman trouve sa cohérence grâce à un constat qui est posé quant à la nature de notre expérience du temps: il est possible, remarque McCann, de relire un évènement du passé, de lui donné une signification a posteriori. Plus encore, il arrive qu’un évènement soit si chargé, sémantiquement et émotivement, qu’il devient pratiquement impossible d’échapper à son emprise, celui-ci contaminant notre expérience du monde et notre compréhension de l’Histoire. Ainsi, si le cœur du roman se déroule le 7 août 1974, à New York, alors que le funambule Philippe Petit commet le «crime artistique du centenaire», cette journée est rapidement assombrie par l’ombre des tours qui, vingt-sept ans plus tard, se sont effondrées. La leçon de McCann n’est pas tant métaphysique que littéraire ou narrative: les faits marquants de l’histoire (ou d’un récit) ne sont intelligibles qu’une fois inscrits dans une suite évènementielle. Dans le cas du onze septembre, nous avons affaire à une tragédie d’une telle ampleur qu’elle teinte nécessairement notre compréhension de certains moments passés ou futur. Si, avant l’effondrement des tours, l’exploit de Petit représentait un acte d’une beauté et d’une témérité sans précédant, il est devenu aujourd’hui pratiquement impossible d’y penser sans l’associer à la figure de l’homme qui tombe, justement parce que Philippe Petit représente essentiellement l’homme qui n’est pas tombé. Let the Great World Spin est donc un roman choral où le point nodal est la performance de Petit, marchant sur un fil de fer tendu entre les deux tours du World Trade Center. Tous les personnages assistent, ou entendent parler de la performance de Petit. Ultimement, le dernier chapitre nous plonge dans une Amérique post onze septembre, et la jeune Jazzlyn, en 2006, se rappelle de sa mère, décédée le jour de la performance de Petit.

Patrick Tillard

Nine Eleven

Livre destiné aux adolescents, Nine eleven alterne les scènes « vécues » romancées d’un quotidien banal soudainement bouleversé par la réalité des attentats avec des pages descriptives, techniques et quasi cliniques destinées à souligner la domination froide des attentats qui frappe tyranniquement un mode de vie insouciant composé de valeurs positives : celui des adolescents. Les pages techniques expliquent par exemple la résistance des matériaux et, dessins à l’appui, les trajectoires des avions dans les structures des tours et leurs effets. De façon à renforcer l’aspect traumatique de la catastrophe, l’auteur alterne les chapitres écrits sur un mode romancé et les pages écritures dans un style journalistique technique qui « colle » ainsi à la progression des avions vers les tours puis aux scènes suivant leur effondrement. Il impose ainsi au récit des coupes nettes à la manière d’une symptomatologie mécanique qui frappe et submerge aveuglement un monde innocent, qui pousse la vie vers l’abîme. Il oppose de cette manière les mécanismes de l’imagination et de la survie à la réalité implacable de l’événement, la vie à la mort, l’innocence à la barbarie, la sensibilité meurtrie à l’aveuglement.

Gabriel Tremblay-Gaudette

Old Men in Love. John Tunnock’s Posthumous Papers

Fidèle à son habitude, l’écrivain Alasdair Gray créé un roman avec une structure narrative téléscopique fondée sur la stratégie du faux document, où un directeur d’école à la retraite, John Tunnock, est retrouvé mort à son domicile dans des circonstances nébuleuses. L’enquête de la police ne produit pas de conclusions définitives. La plus proche héritière de Tunnock est une femme d’affaire américaine, qui n’a que peu de cas à faire de l’héritage qui lui revient. Elle découvre au logis de son lointain cousin une série de manuscrits, autant de romans inachevés et d’extraits de journal intime. Elle engage l’écrivain écossais Alasdair Gray afin qu’il mette de l’ordre dans ces documents en vue de publication. Le résultat est Old Men in Love, assemblage de ces projets de livres successivement avortés et laissés incomplets, intercalés par des extraits de la vie personnelle de Tunnock, où on découvre qu’il recueillait à son domicile des jeunes femmes entretenant des liens troubles avec des membres du monde interlope. C’est dans les extraits de journal intime que Tunnock évoque les attentats du 11 septembre et la réaction enthousiaste déplacée des habitants de Glasgow, ainsi que sa participation à une marche de protestation contre la guerre en Irak en 2003.

Neli Dobreva

Partouz

Dans Partouz, les attentats du 11 septembre 2001, à New York, sont mis en relation avec la frénésie que l’on rencontre, à la même époque, dans les clubs échangistes parisiens. Tout au long du roman, les pulsions qui ont mené les martyrs suicidés à s’investir dans les attentats sont juxtaposées aux pulsions sexuelles, au désir de jouissance débordant des échangistes et à leurs pratiques frénétiques les conduisant jusqu’à la syncope. Comparant son propre parcours à celui de génies marquants de la civilisation occidentale comme René Descartes, Georges Bataille, Marcel Proust, André Breton, James Joyce, etc., Yann Moix croit découvrir la correspondance entre ce qui a causé la mort de ces illustres écrivains et la logique de l’attentat suicide commis par Mohhamed Atta, un des terroristes présumés des attentats du 11 septembre 2001: leurs grandes amours déçues. L’auteur imagine que la plaie béante laissée par une passion amoureuse non partagée a poussé Mohammed Atta, alors jeune étudiant en architecture à l’université du Caire, dans sa détermination à rejoindre le paradis céleste en martyr.

Patrick Tillard

Samedi

Roman de l’après-11 septembre, Samedi dévoile l’ébranlement personnel, politique, social et affectif que l’effondrement des tours du World Trade Center peut provoquer chez une personne raisonnablement intégrée dont la vie familiale et professionnelle sont par ailleurs exempts de soucis majeurs. Le roman investit dans le détail les bouleversements induits par le 11 septembre dans la vie quotidienne, la psychologie individuelle, les relations entre les êtres. Centré sur une journée comme le Ulysse de Joyce, Samedi décrit les événements ordinaires d’une journée de congé, le samedi 15 février 2003, journée qui glisse peu à peu vers le cauchemar.

Patrick Tillard

Serial eater

Le 11 septembre 2001, un homme dans un état fébrile et violent vient consulter un psychiatre. Le 14 septembre, Béatrice Belle d’Armentières, juge d’instruction, doit enquêter sur une série de crimes. Des femmes ont été assassinées à Paris et un ou plusieurs membres de leurs corps découverts dans des églises dans une mise en scène aussi blasphématoire que curieusement signifiante. La juge d’instruction fait appel à un « profileur » pour retracer le tueur. Celui-ci fascine la juge qui finit par succomber à son charme et à son mystère… Le profileur, typiquement professionnel, cherche partout et continuellement et à sa manière le criminel en utilisant les ressources de la kabbale et des grands textes bibliques (le Zohar, le Sepher Yetsira, la Bible et le Talmud). Machine à penser, personnage fragile et curieux, il témoigne d’une certaine sérénité dans sa vie érotique comme dans son enquête qui pourrait le rendre sympathique si l’écriture était plus travaillée.
Le récit alterne les narrations de la juge, du psychiatre et du tue

Patrick Tillard

Tuez-les tous

Dernière journée, dernière nuit, dernières pensées, dernières rencontres de Seif El Islam, un des terroristes qui vont détruire les tours du World Trade Center en utilisant des avions de ligne comme des missiles. Le lecteur erre dans les pensées chaotiques, déprimées ou exaltées mais jamais apaisées de ce narrateur condamné à la destruction. Celui-ci ne correspond pas au portrait type du fanatique religieux nihiliste, prêt à faire sauter le monde avec lui, véhiculé par les médias occidentaux. Le portrait entend plutôt montrer un homme qui n’est pas croyant, voire presque hérétique, un universitaire lucide tenté par l’intégration à l’occidental, devenu un émigré aux illusions broyées, aculé par le racisme ordinaire et la succession de ses échecs intimes à la spirale de l’endoctrinement et du combat en Afghanistan. Psychologie torturée qui accepte mal la simplification théologique du bien et du mal, sentiments complexes et inassouvis d’une exaspération qui reconnaît la dimension factice et la fausse unité de son combat, figure insaisissable d’une nature capable de globaliser mais plus de refuser l’échéance: Seif El Islam semble toujours fuyant, obsédé par La Femme et la nostalgie du père et de quelques moments heureux en Andalousie. L’auteur tente également de montrer la profonde contradiction entre les textes du Coran et l’action envisagée, comme vengeance et punition des impies, entreprise au nom de la Umma, la communauté des croyants, le Coran, abondamment cité, ne justifiant nullement la destruction d’innocents. Le destin personnel de Seif El Islam se réduit à un irrationnel engagement impossible à renier, à une tricherie avec lui-même qui le conduit à son inéluctable désintégration dans les tours.

Julie Bramond

Vies et mort d’un terroriste américain

Peter Samek, un producteur américain de films à succès, prend conscience de la vacuité de son œuvre et fait appel à un écrivain français, Alexis Mital, afin de scénariser son prochain film : God Save America. Celui-ci accepte, bien qu’il considère le cinéma comme la malédiction de la littérature, et décide de retracer la vie d’Eugène Green, un Américain mythomane qui quitte son pays par dégoût et devient terroriste.

Aurélie Lagadec

Windows on the World

Formé de deux narrations parallèles, Windows on the world relie les deux rives de l’Atlantique par un judicieux procédé de mise en abyme.

Ainsi, d’un côté nous avons le récit de Carthew Yorston, agent immobilier texan qui emmène ses deux fils David et Jerry prendre le petit déjeuner au Windows on the World (restaurant situé au 107e étage de la tour nord du World Trade Center) ce fatidique matin du 11 septembre 2001. Lorsqu’à 8h46, le premier Boeing percute la tour, les clients paniquent, se sentant pris au piège par le feu et la fumée qui bloquent toutes les issues. Le compte à rebours tragique débute alors jusqu’à la mort, inéluctable, de tous les protagonistes.

De l’autre côté de l’Atlantique, au restaurant le Ciel de Paris situé au 56e étage de la tour Montparnasse, un écrivain français, Frédéric Beigbeder, écrit ce livre sur les dernières heures des clients du Windows on the World, tout en racontant également sa vie, ses échecs, ses rencontres. Il se livre sans retenue à un véritable examen de conscience déroutant.

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