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Inventer une mémoire pour la banlieue
Le 28 février 2013, un homme a été englouti par un trou géant qui s’est ouvert dans sa maison, en banlieue de Tampa, en Floride. Seul le plancher de la chambre a sombré avec le disparu; avant d’être rasées par mesure de sécurité, les autres pièces de la demeure étaient intactes. En prenant connaissance de ce fait divers, j’ai pensé qu’il correspondait parfaitement à mon sentiment sur la vie en périphérie d’une grande ville: sa formidable inertie aspire les gens dans les entrailles de la Terre.
Comme la plupart des Montréalais, j’aime bien me moquer de la banlieue. Mais cette boutade n’est pas complètement innocente. J’image parfois qu’un gouffre va avaler la Rive-Sud et le bungalow de mon enfance, que les terres arables de la Montérégie vont reprendre leurs droits et rejeter les corps étrangers de briques, de bardeaux et d’aluminium qui y ont été artificiellement greffés à la place des plants de céréales.