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Entre lyrisme et autobiographie dans «N’être» de Thérèse Renaud

Émilie Théorêt
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Article paru dans Aux frontières de l’intime: le sujet lyrique dans la poésie québécoise actuelle, sous la responsabilité de Denise Brassard et Evelyne Gagnon (2007)

Thérèse Renaud est signataire du Refus global. Elle publie un recueil de poésie à l’époque où elle fréquente le groupe automatiste, en 1946. Puis, à la suite de son mariage et de la venue d’un enfant, un silence d’une vingtaine d’années la sépare de la reprise de l’écriture. Le reste de l’oeuvre se caractérise par une forte quête identitaire où le sujet féminin tente d’ inscrire sa subjectivité en dehors du discours dominant. Le recueil de poésie N’être est publié en 1998 et s’inscrit dans cette démarche. Aux 28 poèmes en prose qui le constituent succèdent sept pastels de Fernand Leduc, peintre de renommée internationale et mari de Renaud. Ces deux artistes ayant appartenu au mouvement automatiste conservent l’essentiel de cette philosophie dans leur quête artistique: la recherche d’une saisie nouvelle du monde. C’est à l’intérieur de la recherche de cet idéal que s’inscrit N’être. On y décèle une volonté de tendre vers la renaissance du sujet créateur dans un monde où ses sens sont éblouis, où ses perceptions sont renouvelées. Car l’artiste véritable et authentique, pour les automatistes, tente de régénérer les représentations et ce n’est que grâce à cet état de pure müveté qu ‘il peut percevoir «pour la première fois». Or, ce rapport au sensible, on le retrouve aussi chez le sujet lyrique au féminin. Ne pouvant s’attacher à une posture strictement lyrique, sous peine de s’effacer totalement, le sujet féminin semble avoir besoin de ce lien privilégié au corps. Il s’agira de suivre le sujet lyrique chez Renaud à travers sa quête d’ une subjectivité au féminin, une quête qui traverse non seulement le recueil à l’étude, mais toute son oeuvre. D’abord, j’établirai le paradigme de la renaissance qui participe d’une entreprise féministe en tentant une transformation du langageetdel’imagerie patriarcale. Puis, il sera question d’une stratégie d’énonciation relative au sujet lyrique et propre au sujet féminin. Puisque ce dernier ne peut renoncer totalement à soi, il garde contact avec lui-même par le biais des effets autobiographiques. Entre le dessaisissement lyrique et l’autobiographique, se crée-t-il un sujet lyrique au féminin? Comment s’articule cette subjectivité dans N’être? Le recueil emprunte-t-il cette tendance résolument féministe par laquelle le sujet tente un repositionnement discursif? Voilà les questions auxquelles cet article tentera de répondre.

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