Colloque, 25 avril 2014

Transcodage, transcendance et traduction: l’expérience traumatique d’«Afternoon, a story»

Arnaud Regnauld
Stéphane Vanderhaeghe
couverture
L’imaginaire contemporain. Figures, mythes et images, événement organisé par le Centre de recherche sur le texte et l'imaginaire Figura

En tant qu’archive électronique, afternoon a story, hyperfiction qui a vu le jour en 1987, distribuée alors sur disquette, est dépositaire d’une mémoire, moins tournée vers le passé et la préservation d’une œuvre statique, que vers l’avenir de ses versions à venir. Les multiples versions d’afternoon, et l’impossibilité de lire l’œuvre sous Windows, ou Mac OS 10.9 à ce jour, ne participent pas d’une simple réédition comme le veut l’usage pour des fictions imprimées, relevant de l’autorité de la figure composite de l’éditeur (commercial, scientifique, familial, etc.), mais d’un transcodage des strates logicielles qui sous-tendent le texte. S’en tenir à la seule composante de la langue naturelle, habituellement dévolue au traducteur littéraire, revient à négliger, voire à nier l’inscription matérielle, sociale, culturelle et historique de l’œuvre: ce serait là une vision essentialiste du texte (largement critiquée par les études récentes sur la textualité) perçu comme un élément transcendantal, pure œuvre de l’esprit, transposable à l’envi au fil des migrations d’un support à l’autre. Il n’est toutefois pas certain que le code puisse être réduit à un élément non linguistique, ce qui exclurait de fait la possibilité d’une poétique du code. Dans un article fondateur intitulé «Critical Code Studies», Mark Marino envisage à plus long terme le développement d’une compétence cyborg transdisciplinaire («computer literacy») en des termes qu’il convient toutefois d’interroger. Traduire le code signifierait de fait l’expliciter, en déployer les ramifications tout en ajoutant les commentaires qui auraient pu être omis par le ou les programmeurs initiaux, comme le veut l’usage, à l’attention des lecteurs non machiniques. Mais peut-on encore parler de traduction dès lors qu’il s’agit plutôt d’exégèse technique? Voici qu’apparaît la double question de la visibilité et de l’autorité du cybertraducteur.

Cette communication relève en grande partie d’un travail de théorisation entrepris en collaboration avec Stéphane Vanderhaeghe (Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis).

Arnaud Regnauld est professeur de littérature américaine et de traductologie à l’université de Paris 8 Vincennes-Saint-Denis où il vient d’être réélu aux fonctions de vice-président à la recherche. Ses recherches les plus récentes portent sur les nouvelles formes de textualité à l’ère du numérique et leur traduction ainsi que sur les rapports entre arts, littérature et philosophie.

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