Article d'une publication

Métacritique de l’écriture dans «Prisión perpetua» de Ricardo Piglia

Carolina Ferrer
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Article paru dans Imaginaire et transcendance, sous la responsabilité de Anne Élaine Cliche, Stéphane Inkel et Alexis Lussier (2003)

Les Espagnols conquirent l’Amérique avec l’épée dans une main et la croix dans l’autre. Les peuples amérindiens subirent ainsi une domination non seulement militaire, politique, sociale et économique mais aussi spirituelle. Obligés d’abandonner leurs dieux et rituels, ils appréhendèrent la foi catholique, bâtirent des églises, parfois à même les ruines de leurs anciens temples, et repeuplèrent leur imaginaire avec le Christ, les vierges et les saints. Les conquérants et leurs descendants suivirent cette conversion de très près afin d’empêcher la déroute de ces âmes auparavant infidèles. Parmi les multiples moyens de contrôle, les colonisateurs appliquèrent une stricte censure, comme nous le rappelle Mario Vargas Llosa: « Les inquisiteurs espagnols […] interdirent la publication ou l’importation de romans dans les colonies hispano-américaines sous prétexte que ces livres ineptes et absurdes, c’est-à-dire mensongers, pouvaient être préjudiciables à la santé spirituelle des Indiens». Pour le continent hispano-américain, la relation entre transcendance et imaginaire prend ainsi un curieux tournant: pour sauver l’âme, il faut interdire à l’imagination d’errer trop loin dans la fiction. Ainsi, selon le critique uruguayen Emir Rodrfguez Monegal, les romans hispanoaméricains qui commencèrent à être publiés après les guerres d’indépendance, s’inscrivent dans la tendance «du réalisme tellurique […] et de la chronique réaliste». Cependant, vers 1940 surgissent «des formes narratives beaucoup plus complexes, associées aux avant-gardes des années trente, et à une vision où les différentes dimensions de la réalité, incluant les surnaturelles et les oniriques, apparaissent harmonieusement intégrées». Le critique observe dans les années cinquante un «approfondissement dans les essences mythiques de l’Amérique» alors que les années soixante correspondent clairement à l’apparition des «grands romans», époque connue comme le boom de la littérature hispano-américaine. Cet essor constitue jusqu’à nos jours un des sujets les plus polémiques des lettres de ce continent.

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