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Tout a changé le 11 septembre

Gabriel Tremblay-Gaudette
couverture
Article paru dans Bandes dessinées et romans graphiques, sous la responsabilité de Équipe LMP (2007)

Œuvre référencée: Bado (2003), Tout a changé le 11 septembre, Ottawa, Les Éditions L’Interligne, 116p.

Disponible sur demande (Fonds Lower Manhattan Project au Labo NT2)

Présentation de l’œuvre

Résumé de l’œuvre

Tout a changé le 11 septembre est un recueil des meilleures caricatures du montréalais Guy Badeaux (qui signe ses caricatures sous le nom de plume de Bado). L’artiste travaille pour le quotidien d’Ottawa Le Droit depuis plusieurs années mais il a également fait des collaborations spéciales avec plusieurs quotidiens américains et français. Les caricatures reproduites dans ce recueil ont été publiées entre 2000 et 2003, et sont divisées en six sections : Le Québec, L’Ontario, Le Canada, Les USA, Le Monde et 11 septembre.

Précision sur la forme adoptée ou sur le genre

La caricature est à l’honneur dans ce recueil. Les illustrations sont en grande majorité accompagnées de textes mais quelques illustrations muettes sont également présentées.

Précision sur les modalités énonciatives de l’œuvre

Les postures narratives varient d’une caricature à l’autre, ainsi que le niveau de langage.

Modalités de présence du 11 septembre

La présence du 11 septembre est-elle générique ou particularisée?

Il ne se trouve aucune représentation particularisée des événements dans Tout a changé le 11 septembre. Les attentats sont toujours évoqués de manière détournée, que ce soit en présentant la Statue de la Liberté qui verse une larme (page 97), un lecteur de journal qui découvre dans les pages de son quotidien deux trous prenant la forme d’avions de ligne (première de couverture) ou encore l’image muette du paysage urbain de Manhattan où les gratte-ciel génèrent ensemble un phylactère réflexif présentant les tours disparues, comme pour signifier que les bâtiments de New York s’ennuient de leurs confrères disparus (p. 115). Ce sont donc exclusivement les attentats de New York qui sont présentés, mais comme les autres caricatures traitent des actions militaires du Canada et des États-Unis au Moyen-Orient en réaction aux attentats, il faut en déduire que les dernières caricatures présentent ces agressions en réponse aussi bien aux attentats new-yorkais qu’à l’assaut contre le Pentagone et l’écrasement du vol United 93 en Pennsylvanie.

Les événements sont-ils présentés de façon explicite?

Tel que mentionné, les événements ne sont pas représentés de manière explicite. Toutes les caricatures ont été réalisées au fur et à mesure que les événements se sont enchaînés, donc d’un point de vue contemporain aux événements. Il y a, de manière générale, une volonté humoristique dans chaque illustration, mais la représentation sobre de la Statue de la Liberté versant une larme (qui est depuis devenue une image éculée ayant atteint le statut de cliché) démontre un respect face au drame de la part de Bado, et cette image très forte des gratte-ciels se rappelant le World Trace Center exprime la nostalgie de manière fort originale.Les seuls moyens de transport évoqués sont les avions, et la caricature de la page 101, qui présente un avion de ligne et un avion de chasse dans deux cases concomitantes, accompagnés du texte « Œil pour œil… », établit clairement comment l’avion de ligne n’est maintenant plus seulement considéré comme un moyen de transport mais aussi et surtout comme une arme.Les journaux et la télévision sont représentés, tout d’abord dans une caricature où un couple commente l’actualité en déjeunant et où le mari tient un journal entre ses mains (p.100), puis dans une caricature où un homme regarde les informations à la télévision (p.103), et une autre où la caricature contient un cadre d’une forme qui rappelle les écrans de télévision (p.113). De plus, les caricatures contenues dans Tout a changé le 11 septembre ont d’abord paru dans un journal quotidien, ce qu’il est important de garder en tête pour comprendre la posture contemporaine de Bado face aux événements dépeints.

Quels sont les liens entre les événements et les principaux protagonistes du récit (narrateur, personnage principal, etc.)?

Cette question trouve une réponse différente pour chaque caricature, puisque les personnages représentés sont aussi bien des citoyens canadiens, que l’on suppose à l’abri des événements ou de leurs représailles, que des victimes indirectes, comme des citoyens afghans ou irakiens qui craignent les bombardements américains. Des acteurs politiques importants comme George W. Bush, Saddam Hussein et Kofi Annan sont également représentés.

Aspects médiatiques de l’œuvre

Des sons sont-ils présents?

Aucun son n’est présent dans les caricatures de la section 11 septembre, à l’exception d’une mini-caricature où un phylactère au contour en zig-zag, typiquement utilisé pour évoquer l’effet sonore d’une explosion en bande dessinée, contient le mot « KABOUL » plutôt que Kaboum (p.100).

Y a-t-il un travail iconique fait sur le texte? Des figures de texte?

Aucun travail iconique sur le texte n’est effectué. En fait, les trois caricatures évoquées plus haut afin de représenter les attentats contre New York sont muettes.

Autres aspects à intégrer

N/A

Le paratexte

Citer le résumé ou l’argumentaire présent sur la 4e de couverture ou sur le rabat

Aucune présentation de l’œuvre en 4e de couverture et le recueil n’a pas de rabat.

Intentions de l’auteur (sur le 11 septembre), si elles ont été émises

Un bref texte introduit les caricatures de la section 11 septembre du recueil. Il n’est pas précisé si ce texte est issu de la plume de Bado ou de Michel Gauthier, qui a écrit la préface du recueil. Citons tout de même ces quelques paragraphes:« Un différend en avait divisé certains quant au véritable début du XXIe siècle. Commençait-il le 1er janvier 2000 ou bien le 1er janvier 2001 ? Nous connaissons désormais la réponse.L’effondrement des tours du World Trade Center allait emporter avec lui l’illusion que l’Amérique du Nord était à l’abri du terrorisme.On blâma le laxisme d’Immigration Canada, de même qu’on recommanda à la fois un retour à la normale et plus de vigilance.Une psychose s’empara de la population en raison d’une vague de lettres anonymes contenant de la poudre d’anthrax.Un accident d’avion à New York fut tout d’abord mis sur le compte de terroristes, mais les réflexes de passagers, maintenant méfiants, évitèrent au moins une autre catastrophe au-dessus de l’Atlantique.» On peut donc comprendre par ce texte que l’auteur de ces lignes conçoit les événements du 11 septembre comme si importants historiquement qu’ils constituent le début officiel du nouveau millénaire. Une neutralité politique et un point de vue international peuvent également être observés dans ce texte.

Citer la dédicace, s’il y a lieu

Aucune dédicace.

Donner un aperçu de la réception critique présente sur le web

Aucune réception critique traitant de cet ouvrage n’a été trouvée en ligne en date du 30 août 2008.

Impact de l’œuvre

L’œuvre ne s’est pas distinguée par un prix ou une nomination quelconque.

Pistes d’analyse

Évaluer la pertinence de l’œuvre en regard du processus de fictionnalisation et de mythification du 11 septembre

En vertu de son caractère éphémère, la caricature éditoriale d’un journal quotidien ne peut aspirer à un statut semblable à celui d’une œuvre littéraire ou cinématographique qui passe le test du temps. Destinée à poser un regard ludique, humoristique et relativement léger sur l’actualité, cette pratique de l’illustration narrative ne semble donc pas bien disposée à créer un impact retentissant dans le processus de mythification et de fictionnalisation d’un événement aussi important que le 11 septembre 2001. D’ailleurs, dans les jours suivant les attentats, peu de caricaturistes canadiens et américains ont produit des caricatures originales, incapables de faire preuve de créativité et d’humour en évoquant une tragédie d’une telle ampleur. Dans un premier temps, beaucoup d’entre eux ont repris, à l’instar de Bado, l’image de la Statue de Liberté éplorée, faute de trouver une meilleure idée. Les tentatives suivantes de faire de l’humour avec la situation politique ne se sont pas toujours révélées fructueuses. On a ainsi vu des attaques vitrioliques de la part de caricaturistes très engagés politiquement comme Ted Rall, Tom Tomorrow et Andy Singer, ou des calembours textuels et visuels d’un goût douteux, comme le recueil 12 septembre de Joan De Moor et Gustave Vanhegger l’a démontré. Il serait cependant dommage que le travail de Bado reste dans l’ombre. Son sens de l’humour fin, sa dextérité de dessinateur et sa créativité lui ont permis de produire des images fortes qui se détachent des milliers d’illustrations représentant le 11 septembre. L’image de Bado des gratte-ciel se remémorant les tours disparues est l’une des plus réussies qu’il m’ait été donné de contempler jusqu’à présent. D’une retenue et d’une simplicité déconcertantes, cette image symbolise admirablement l’attachement que la population new-yorkaise avait développé pour ces bâtiments, symboles du commerce international et de l’importance capitale de la ville à l’échelle de la planète, dont la disparition ne représente pas seulement la mort de 3000 concitoyens autant que la perte d’un pilier important du patrimoine new-yorkais.

Donner une citation marquante, s’il y a lieu

« Œil pour œil… » (p.101) Ce texte accompagne une illustration qui présente dans un premier temps un avion de ligne, comme arme des terroristes, puis un avion de chasse de l’armée américaine.

Noter tout autre information pertinente à l’œuvre

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