Article d'une publication
Le road beat ou l’écriture vagabonde
Dans ma jeunesse, année après année, j’allais voir un charlatan qui s’arrêtait en ville au printemps. Habillé en gitan, l’homme criait à pleins poumons sa phrase intrigante : «Allez, venez voir le seul cochon à trois têtes du monde, allez, allez, approchez.» Immanquablement, j’étais curieux. Je payais les deux dollars et je passais derrière le rideau rouge. Même si, très souvent, une longue file d’attente se formait devant le kiosque du fin parleur, presque personne n’osait dévoiler le secret du mystère une fois ressorti. Ce qui comptait, c’était de vivre une expérience qui transgressait les normes du quotidien. Je respectais secrètement ce charlatan tout droit sorti du Far West parce qu’il me vendait du rêve et de l’absurde avec une si grande conviction que je me devais d’aller le voir et le revoir.