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Fahrenhype 9/11

Jean-Philippe Gravel
couverture
Article paru dans Films, sous la responsabilité de Équipe LMP (2007)

Œuvre référencée: Peterson, Alan (2004), Fahrenhype 9/11, États-Unis, 80 min.

Disponible sur demande (Fonds Lower Manhattan Project au Labo NT2)

Présentation de l’œuvre

Résumé de l’œuvre

Paru le 5 octobre 2004, FahrenHYPE 9/11 vise à déconstruire l’argumentaire négatif du film de Moore au sujet des politiques étrangères et de sécurité interne instaurées par le gouvernement Bush à la suite des attentats du 11 septembre. En ce sens, le film appartient à une mouvance de contre-offensive qui tient à débattre du bien-fondé des discours et des œuvres qui contestent notoirement les politiques républicaines.

Bush consacre-t-il une aussi importante part de son mandat à ses occupations personnelles que Moore le prétend? La soi-disant apathie du président le matin des attentats lors de sa visite à une école primaire est-elle un signe d’ineptie ou de tact? Les États-Unis auraient-ils gagné à ce que le «patriot act» entre en vigueur bien avant les attentats? La guerre en Afghanistan est-elle vraiment une «guerre du pétrole»? Peut-on vraiment prétendre qu’il ne plane aucune «menace terroriste» sérieuse aux États-Unis? Voilà quelques unes des questions litigieuses que soulève ce documentaire partisan (entendons: pro-républicain) qui se révèle malgré tout assez bien documenté pour égratigner sa cible première en exposant quelque peu le genre de libertés (citations hors-contexte, commentaires démagogiques, montage approximatif et fabrications pures et simples) que Moore s’accorde effectivement dans son traitement des faits.

Cela n’empêche pas FahrenHYPE 9/11 d’être ultimement lui aussi un documentaire de propagande qui n’hésite pas à employer les mêmes procédés que ceux qu’il dénonce chez son adversaire, à même le monolithisme idéologique et la saveur patriotique des interventions qu’il recueille. Ces interventions défendent toutes unanimement la guerre contre le terrorisme, la nécessité du «patriot act» et la présence américaine en Afganistan, tout en déportant les impairs du gouvernement américain en matière de sécurité interne sur la négligence du gouvernement Clinton, suggérant de surcroît que toute critique du gouvernement en place serait forcément «anti-américaine». En ce sens, le commentaire en clôture du film donne la note : « Si vous perdez la foi dans les États-Unis, vous minez les fondements mêmes de la seule force vraiment consistante [à œuvrer] pour [la cause du] bien dans le monde. » (Dick Morris)

Précision sur la forme adoptée ou sur le genre

Long-métrage documentaire, tourné et distribué directement en DVD.

Précision sur les modalités énonciatives de l’œuvre

Le documentaire repose essentiellement sur des entrevues montées à la suite les unes des autres pour constituer une narration polyphonique à narrateurs multiples. Cela dit, la relative homogénéité des opinions politiques exprimées laisse à penser que ce ressassement d’opinions a valeur de démonstration. L’interviewer est pratiquement absent au montage.

Les intervenants sont tantôt des figures médiatiques connues (la chroniqueuse radiophonique de droite Ann Coulter, l’acteur Ron Silver), des personnalités politiques (l’ancien conseiller de Bill Clinton, Dick Morris; l’ex-secrétaire à la défense de Ronald Reagan, Frank Gaffney ; Ed Koch, ex-maire de New-York, ainsi que quelques sénateurs), des chercheurs et auteurs (David Koppel, Jason Clarke), quelques individus qui ont figuré dans le film de Moore et qui prétendent avoir été manipulés, ainsi que des badauds interviewés sur le mode du «vox-populi».

Le film présente et recontextualise certains documents d’archives utilisés par le film de Moore (Bush au Al Smith Dinner, faisant une levée de fonds pour les hôpitaux d’enfants ; Bush à l’Emma E. Booker Elementary School, etc.). Il a aussi recours à quelques animations numériques, et présente des films amateurs tournés par des soldats ou des familles de soldats. Le film est chapitré par des intertitres. Aucun extrait du film de Moore n’est présent dans le film, pour des raisons qu’on devine évidentes.

Modalités de présence du 11 septembre

La présence du 11 septembre est-elle générique ou particularisée?

La présence du 11 septembre est générique.

Les événements sont-ils présentés de façon explicite?

Les événements ne sont pas présentés de façon explicite mais ils font l’objet d’une narration orale par quelques témoins de l’événement qui nous livrent leurs impressions au moment des attentats.

Les événements du 11 septembre ne sont pas représentés visuellement mais évoqués dans le commentaire du film et par ses intervenants. Le site de Ground Zero est maintes fois représenté ou suggéré (plans de citoyens New Yorkais observant le site, autels commémoratifs arborant des listes de disparus). Le film reproduit également un document d’archive de la visite de Bush sur Ground Zero peu après les attentats.

Le film comprend cependant une poignée d’images des attentats contre le World Trade Center du 26 février 1993.

Moyens de transport représentés: Rien de significatif.

Moyens de communication représentés: Archives recontextualisées, images télévisées reprises telles quelles dans le documentaire.

Quels sont les liens entre les événements et les principaux protagonistes du récit (narrateur, personnage principal, etc.)?

Le point de vue est collectif à dominante rétrospective, nombre d’intervenants se remémorent ce qu’ils faisaient le jour de l’attentat, ainsi que leurs réactions face à la catastrophe, à titre de témoins. La majorité des intervenants n’ont donc pas été impliqués directement dans la gestion de l’événement ou ses suites; ils en commentent plutôt les enjeux symboliques et politiques.

Aspects médiatiques de l’œuvre

Des sons sont-ils présents?

Musique empathique.

Y a-t-il un travail iconique fait sur le texte? Des figures de texte?

Une brève séquence animée numériquement montre comment Moore a manipulé la mise en page d’une lettre d’opinion antimilitariste publiée dans un quotidien pour lui donner l’allure d’un article de nouvelles.

Autres aspects à intégrer

N/A

Le paratexte

Citer le résumé ou l’argumentaire présent sur la 4e de couverture ou sur le rabat

You knew it was a lie… Now you’ll know why.
FAHRENHYPE 9/11
Unraveling the truth about Michael Moore’s Fahrenheit 9/11

America wonders if Fahrenheit 9/11 is a healthy dose of dissent or shameful cowardice. Does Moore really believe what he says, or is he in it for the money?

FahrenHYPE 9/11 exposes the fallacies and misrepresentations in Michael Moore’s methods. See how Moore deceived America by editing footage to promote his political agenda. Learn the truth about Fahrenheit 9/11, and how Michael Moore lied to America about it.

Hear from the people who found themselves in Fahrenheit 9/11 and feel betrayed. Go behind the headlines with courageous Americans, including :

Ron Silver — an accomplished actor with over 100 film credits, and a Democratic activist who believes we must put national secuurity before ideology. Mr. Silver provides the narrative.

Peter King — New York congressman (R) from Long Island and member of the Homeland Security Committe who lost hundreds of constituents on 9/11.

Ed Koch — former mayor of New York and life long Democrat who speaks for New Yorkers and AMERICANS EVERYWHERE WHEN HE TALKS STRAIGHT ABOUT MICHAEL MOORE.

Steven Emerson — best selling author of American Jihad and terrorist investigator who has uncovered many of the plots since 9/11.

Zen Miller – Democratic Senator from Georgia who never voted for a republican until he keynoted the GOP convention.

Dick Morris – Tamed Political advisor to Bill Clinton whom Time magazine labeled “”The most influencial private citizen in America””.

Plus people who appeared in and feel misrepresented by Moore’s Film : the Oregon State Trooper who spoke of budget cuts, the teacher from the school where Bush spoke on 9/11, the soldier who lost his arms in Iraq and wants to set the record straight for soldiers everywhere.

Intentions de l’auteur (sur le 11 septembre), si elles ont été émises

Aucune intention connue.

Citer la dédicace, s’il y a lieu

Aucune dédicace.

Donner un aperçu de la réception critique présente sur le web

La réception critique (assez discrète) sur le web tente d’adopter un ton d’impartialité en reconnaissant au film la pertinence de ses arguments quant à la rhétorique de la mise en scène de Moore, bien que les critiques admettent aussi qu’ils n’en ont pas moins affaire à un documentaire dont les couleurs partisanes minent partiellement la portée des arguments. La plupart des critiques relèvent (fut-ce à mots couverts) à quel point FahrenHYPE 9/11 et le film de Moore se révèlent user des mêmes procédés rhétoriques : recours à la démagogie et à la manipulation émotionnelle, vox-pops, rapprochements cavaliers au montage et citations hors-contexte.

Impact de l’œuvre

Inconnu à ce jour (10/2007); mais chose certaine, Bush aura été réélu en novembre 2004.

Pistes d’analyse

Évaluer la pertinence de l’œuvre en regard du processus de fictionnalisation et de mythification du 11 septembre

On pourra observer comment, en comparant le film de Moore avec celui-ci, des documentaires aux positions diamétralement opposées usent d’une même rhétorique pour gagner l’adhésion du public, notamment au niveau de la confusion entre les faits et les opinions, l’utilisation d’archives décontextualisées, la reconduction d’une vision du monde essentiellement manichéenne (l’immuable «axe du “mal”» accueillant indifféremment en son sein les agitateurs démagogiques de gauche, les intégristes islamistes, ou les présidents américains empêtrés dans leurs conflits d’intérêts, selon l’œuvre abordées).

Donner une citation marquante, s’il y a lieu

«If I talked to, er, people who just saw Fahrenheit 9/11, the first thing I would do is I would tell them : “”please, don’t lose faith in the United States of America. We are a far better country than he portrays. We are much better motivated. We don’t do this stuff for oil. We don’t do this stuff for money. We don’t like to inflict pain on other people. We are not an imperialist country, we are not the roman empire. Don’t lose faith in yourself, because if you lose faith in yourself, if you lose faith in your contry, the United States, you’ve undermined the only, really consistent force for good in the world…» (Dick Morris)

Noter tout autre information pertinente à l’œuvre

Fahrenhype is the latest example of the digital era’s capacity for rapid response. Docu was shot in August and post-production was finished in time to allow for home dvd release the same day as Fahrenheit. [Variety]

—La contestation des procédés de Moore est une entreprise florissante. Voir Manufacturing Dissent, film non-partisan qui se contente de mettre simplement en doute la rhétorique de Moore, ou les sites moorewatch.com, moorelies.com et mooreexposed.com.

—Dans un même ordre d’idées, on consultera aussi la page https://web.archive.org/web/20080102003551/http://www.davekopel.com/Terror/Fiftysix-Deceits-in-Fahrenheit-911.htm [Page consultée le 11 août 2023]

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