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9-11 September 11th 2001: The World’s Finest Comic Book Writers & Artists Tell Stories To Remember

Gabriel Tremblay-Gaudette
couverture
Article paru dans Bandes dessinées et romans graphiques, sous la responsabilité de Équipe LMP (2007)

Œuvre référencée: Kahn, Jenette; Levitz, Paul. 2002. 9-11 September 11th 2001: The World’s Finest Comic Book Writers & Artists Tell Stories To Remember. New York: DC Comics, 224p.

Disponible sur demande (Fonds Lower Manhattan Project au Labo NT2)

   

Présentation de l’œuvre

Résumé de l’œuvre

9-11 September 11th 2001; The World’s Finest Comic Book Writers & Artists Tell Stories To Remember est un recueil de récits courts en bande dessinée et d’illustrations ayant comme thématique commune les événements du 11 septembre 2001, et s’intéressant particulièrement aux attentats new-yorkais. Cet ouvrage collaboratif est le deuxième volume d’une initiative de la part de nombreux dessinateurs et auteurs de bande dessinée américaine, qui ont utilisé leur talent afin de faire paraître rapidement une œuvre dont les profits ont été remis à des organismes de charité dédiés à venir en aide aux familles des victimes du 11 septembre. Puisque l’éditeur DC Comics possède les droits d’auteur de plusieurs super-héros célèbres, dont Superman, Batman et Wonder-Woman, certains récits présentent ces personnages faisant désormais partie du folklore américain. Les récits sont très variés, passant de la rencontre fictive de plusieurs personnages historiques importants qui discutent des événements aux témoignages de nombreux témoins de la scène, ou encore à l’histoire d’un homme d’affaires qui a réussi à s’échapper d’une des deux tours tout en venant en aide à un homme très corpulent blessé à une jambe.

   

Précision sur la forme adoptée ou sur le genre

Cette œuvre offre plusieurs récits où la bande dessinée est la forme la plus couramment adoptée, bien que des illustrations narratives soient disséminées entre les récits et que chacune des cinq sections de l’œuvre ait droit à une couverture d’un artiste différent.

   

Précision sur les modalités énonciatives de l’œuvre

La forme la plus courante de récit adoptée est le témoignage à la première personne, mais des monologues intérieurs, des récits à narration omnisciente et des récits muets figurent également dans les pages de l’œuvre. Certains des récits remettent les événements du 11 septembre dans une perspective historique plus large en les comparant à d’autres grandes catastrophes de l’Histoire, notamment l’Holocauste et la famine en Afrique.

   

Modalités de présence du 11 septembre

La présence du 11 septembre est-elle générique ou particularisée?

La présence du 11 septembre est très souvent générique : les avions frappent les tours, des explosions s’ensuivent et la poussière déferle dans les rues de Manhattan. Certaines des illustrations offrent une vision symbolique des deux tours : par exemple, l’illustration en quatrième de couverture de Keyron Dwyer présente les deux tours remplies par les visages des victimes des événements, une illustration présentée sur deux pages présente une vue aérienne des décombres de l’attentat et la dernière illustration de l’ouvrage, de l’artiste Dave Johnson, montr le bas du corps de Batman sous lequel se déploie une ombre qui prend la forme des deux tours disparues où sont posées deux roses. Un des récits, intitulé Walking the Williamsburg Bridge to Work, de Mo Willems, représente les événements par une case où cinq personnages, qu’on suppose tournés vers le site des attentats, prennent un air abasourdi alors que l’un d’entre eux dit «…Can’t be…». Un seul des récits aborde l’attaque sur le Pentagone. Dans The First Division, de Hilary Bader (scénario) et Sergio Cariello (dessins), un général perd la vie suite à l’explosion de l’avion et se fait accueillir au paradis par George Washington.

   

Les événements sont-ils présentés de façon explicite?

Le 11 septembre est représenté différemment dans chacun des récits : de l’illustration unique de Klaus Janson où un personnage parlant au cellulaire se rue sur son balcon au moment où le premier avion entre en contact avec la première des Tours Jumelles, à celle de la page suivante où un sans-abri évoque la perte de certains de ses amis qui trouvaient un logis temporaire à proximité de Ground Zero et dont il déplore que leurs morts seront anonymes, en passant par le récit mentionné plus haut où la catastrophe se lit sur le visage des témoins, chaque artiste a trouvé une manière unique de représenter les événements, de manière explicite ou non. Aucun des récits n’anticipe les événements, mais plusieurs autres abordent les événements de manière rétrospective, notamment There were tears in her eyes de Sam Glanzman, où un grand-père peine à expliquer à son petit-fils ce qui s’est produit lors du 11 septembre, ou encore For Art’s Sake de Brian Vaughan (sécnario) et Pete Woods (dessins), dans lequel un père et un fils, tous deux dessinateurs de bande dessinée de super-héros, discutent de leur difficulté de poursuivre leur travail créateur alors que vient de se produire un événement inconcevable.Comme la publication de l’œuvre a eu lieu quelques mois seulement après les événements, l’attitude la plus courante est une certaine incrédulité doublée d’une incertitude quant à la suite des événements. Un message d’unité dans la population américaine est également transmis dans certains des récits, et il est on ne peut plus évident dans l’illustration de Lee Bermejo où Batman passe à côté d’un bâtiment où sont suspendus de nombreux drapeaux américains.

Moyens de transport représentés: Outre la présence des avions transformés en engins terroristes, les moyens de transport ne sont présents que lorsque des ambulances se ruent vers les lieux des attentats.

Moyens de communication représentés: Les médias sont beaucoup moins présents que dans le premier volume et c’est la télévision qui est à l’honneur, alors que passent en boucle dans l’écran cathodique des images des événements.

   

Quels sont les liens entre les événements et les principaux protagonistes du récit (narrateur, personnage principal, etc.)?

Certains des récits présentent des personnages situés à une bonne distance des événements alors que d’autres présentent des pompiers et des ambulanciers en action ou encore des victimes apercevant un des avions se diriger vers leur bureau de travail. Aucun des récits ne met en scène les terroristes, qui sont parfois mentionnés au passage dans les propos des protagonistes mais sur lesquels on s’attarde peu. Parfois, la distance entre les événements et le protagoniste principal est cruelle : ainsi, le premier récit de l’ouvrage, intitulé Unreal, présente un Superman qui, après avoir énuméré une partie de ses capacités surhumaines, déplore qu’aucune d’entre elles ne lui permet de franchir la frontière entre son univers de fiction et la réalité afin de pouvoir empêcher les vraies catastrophes de se produire.

   

Aspects médiatiques de l’œuvre

Des sons sont-ils présents?

À l’instar de ce qui avait été fait dans le premier volume, la majorité des artistes n’a pas accompagné les images d’explosion du World Trade Center de gros onomatopées pourtant si caractéristiques à la bande dessinée. Le récit The First Division emploie cependant un «BROOMM!!» fracassant pour signifier la force de la déflagration encourue par le Pentagone lorsqu’un avion s’y est écrasé. Encore une fois, c’est la sonnerie du téléphone cellulaire qui est le son le plus important dans les récits, soit parce qu’il se fait entendre par les proches des personnages travaillant à proximité de Ground Zero ou parce que le silence du téléphone prend une ampleur fatale à mesure que les jours passent.

   

Y a-t-il un travail iconique fait sur le texte? Des figures de texte?

Le lettrage n’est jamais le même d’un récit à l’autre, ce qui confère un style particulier au texte pour toutes les collaborations, mais les variations sont généralement minimes et n’attirent l’attention du lecteur qu’en très peu d’occasions. Il se trouve évidemment des onomatopées dans certains des récits, et leur représentation prend des formes particulièrement ostensibles, soit par une couleur particulière à l’intérieur des lettres ou par une irrégularité dans l’alignement des lettres. Cependant, puisque cette pratique est courante en bande dessinée, ces onomatopées ne frappent pas par leur originalité et ne détonnent pas dans les pages de l’œuvre.

   

Autres aspects à intégrer

N/A

   

Le paratexte

Citer le résumé ou l’argumentaire présent sur la 4e de couverture ou sur le rabat

Join an incredible array of comic-book writers and artists as they explore September 11th, 2001. Original stories and powerful illustrations, both heartwarming and heartwrenching in turn. Along the almost 200 contributors: New York Times bestselling fantasy author Neil Gaiman with this first new ENDLESS story in two years, legendary sf novelist michael Moorcock’s autobiographical musings, Marvel Comics co-creator Stan Lee tells a lost Aesop’s Fable, Will Eisner (whose name graces comic’s equivalent of the Academy Awards) searches for “The Real Thing” and MAD Magazine’s Sergio Aragones’ tale of the man who had to push the button.And Superman bemoans the fact that he’s “Unreal”

   

Intentions de l’auteur (sur le 11 septembre), si elles ont été émises

The publishers will donate all profits from both volumes to charities to aid the victims, families and communities affected.

   

Citer la dédicace, s’il y a lieu

This volume is dedicated to the victims of September 11th attacks, their families, and the heroes who aided them that day and in the difficult days that have followed, with sympathy and respect from all of us at DC Comics.

   

Donner un aperçu de la réception critique présente sur le web

Le volume a été mentionné dans un compte-rendu du Time Magazine à propos des bandes dessinées américaines du 11 septembre. L’effort est salué bien que la dimension politique parfois douteuse de certains récits ait été remise en question.La critique est disponible ici1Page consultée le 4 août 2023.

   

Impact de l’œuvre

La vente de l’œuvre a permis d’amasser des fonds pour les organismes suivants:New York State World Trade center Relief FundSurvivors Fund of the National Capital RegionThe September 11th Fund of the New York Community Trust and the United Way of New York CityTwin Towers Fund.

   

Pistes d’analyse

Évaluer la pertinence de l’œuvre en regard du processus de fictionnalisation et de mythification du 11 septembre

La pertinence de cet ouvrage dans la fictionnalisation et la mythification du 11 septembre est difficile à évaluer. Il est évident que les récits réalistes contribuent à offrir des points de vue intéressants sur les événements. Le fait que des protagonistes, généralement hostiles aux forces de l’ordre, changent de point de vue et considèrent les policiers et les pompiers comme des héros, illustre bien le changement de perspective qui a eu lieu dans l’opinion publique suite aux événements. La couverture de l’ouvrage est éloquente à cet égard : reprenant les motifs d’une célèbre couverture d’anthologie de super-héros des années 1950 où un jeune garçon et son chien s’extasient devant une affiche présentant une galerie des personnages les plus populaires de l’univers de DC comics, l’artiste Alex Ross présente cette fois un Superman admiratif qui contemple une affiche présentant des pompiers, des médecins, des policiers, des infirmières et d’autres figures emblématiques du 11 septembre. Un autre clin d’œil à Superman est fait dans un strip de trois cases de Tim Sale, où un jeune garçon entre dans une cabine téléphonique pour effectuer un changement de garde-robe (à la manière de l’homme de Krypton), pour émerger quelques instants plus tard avec un chandail arborant l’acronyme FDNY, comme pour signifier que les pompiers ont remplacé les justiciers imaginaires dans l’esprit de la jeunesse américaine. La discussion au sujet de la pertinence de poursuivre son travail créateur après des événements tragiques qui est la trame narrative du récit For Art’s Sake est également très pertinente en égard à cette difficile question de la valeur du travail artistique.Cependant, il est un peu embarrassant de lire des récits où des super-héros participent à un travail de reconstruction du World Trade Center puisque, comme le récit Unreal le démontre, l’univers de fiction de ces personnages et la réalité dans laquelle ont eu lieu les attaques terroristes du 11 septembre sont séparés par une frontière qu’il est impossible de franchir. Un traitement fantaisiste d’événements aussi sinistres a quelque chose de déplacé qui empêche de prendre au sérieux ces récits.

   

Donner une citation marquante, s’il y a lieu

-I mean, don’t you feel a little guilty?-Guilty? We gave blood, donated money, volunteered our time… Why should we feel guilty? -Because we’re sitting here telling meaningless stories about imaginary heroes… While out there, hundreds of real heroes are dead.(…) -I think it was John Adams who said, “I was a soldier, so that my children could be merchants, so that their childrens coul be artists”.(Extrait de For Art’s Sake, de Brian Vaughan et Pete Woods)Maybe it’s time we pay less attention to people who manufacture the human spirit… And take a greater interest in those who exemplify it.(Extrait de Human Values de Darwyn Cooke)

    

Noter tout autre information pertinente à l’œuvre

Un des récits se démarquant du lot est Human Values de Darwin Cooke. En huit cases, l’auteur compare la valeur que la société accorde aux héros du 11 septembre vis-à-vis celle accordée aux sportifs professionnels et aux célébrités. Cette brève remise en perspective va au-delà de l’hommage larmoyant afin de placer le lecteur en face d’une question plus délicate s’étendant au-delà de la tragédie incarnée par les attaques terroristes.

    

Couverture du livre

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    Page consultée le 4 août 2023
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