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La figure de l’écrivain dans le roman québécois contemporain: Négovan Rajic et Ljubica Milicevic
Dans la géographie de l’imaginaire du roman québécois contemporain, qui est de plus en plus préoccupé des questions de poétique et d’esthétique et qui a tendance à se transformer en un traité d’écriture, la figure de l’écrivain occupe une place importante, comme le montre un grand nombre de romans publiés au Québec entre 1960 et 1995. Comme l’a remarqué André Belleau, qui a procédé le premier à un examen sociocritique de ce phénomène, les modalités de la représentation de la littérature par le redoublement de l’auteur peuvent «nourrir des rapports avec le statut effectif de la littérature et du langage dans la société réelle», car «le personnage-écrivain, saisi dans le jeu de ses relations avec les autres couches et aspects du roman, constitue une sorte de point nodal qui est en même temps un excellent poste d’observation du texte et du contexte». À la typologie des personnages-écrivains, élaborée par Roseline Tremblay (le Perdant, l’Aventurier, le Porte-parole, l’Iconoclaste et le Névrosé), qui prolonge l’étude de Belleau en appuyant sa recherche sur le sociogramme de Claude Duchet, on pourrait ajouter le sixième type, l’Ecrivain migrant, qui possède certains traits des types mentionnées) mais qui constitue aussi une catégorie à part, car il résume en quelque sorte différentes expériences spirituelles caractéristiques du paysage culturel du Canada. Nous allons examiner la figure de l’écrivain migrant dans les oeuvres de deux écrivains québécois d’origine serbe, Négovan Rajic et Ljubica Miliçevic. Elle se rattache à certains thèmes communs qui lient ces deux auteurs.