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9-11

Émilie Houssa
couverture
Article paru dans Œuvres web, sous la responsabilité de Équipe LMP (2007)

Œuvre référencée: Joseph, Chris. 2007. 9-11. Œuvre web (désormais hors-ligne)

Fiche du Répertoire ALH: https://nt2.uqam.ca/fr/repertoire/9-11 [Page consultée le 11 août 2023]

   

Présentation de l’œuvre

Résumé de l’œuvre

9-11 est un site web qui repose sur la présentation de mots, aux typographies différentes (majuscules/minuscules, gras, italique, soulignement) qui s’intercalent en blanc sur fond noir entre deux grandes bandes blanches. Ces bandes cadrent les côtés verticaux de l’écran et peuvent schématiser les deux tours qui traverseraient ainsi l’écran. Cette idée est notamment confortée par l’une des trois actions que l’internaute peut effectuer sur le site, nommée «||towers||», le mot towers lui-même étant encadré à la verticale de deux petites bandes noires rappelant les deux bandes blanches précédemment décrites.Les trois actions mises à disposition des internautes sont présentées sur des petits rectangles gris au centre bas de l‘écran. Ces rectangles rappellent des zones d’action possible pour l’internaute sur internet. Les trois action sont: «|| towers||», «email this tower» et «add words». La première action permet de changer l’écran. À chaque clic sur ce rectangle l’écran change, montrant ainsi une autre série de mots présentés plus avec un ordre formel que sémantique, toujours entre les deux bandes blanches. À chaque fois que l’on ouvre cette page web on arrive sur une présentation de mots différente. Certaines portions reviennent mais leur ordre d’apparition semble aléatoire et infini. Chacun des ensembles de mots présenté entre les deux bandes blanches semble être désigné comme une tower. Et la deuxième action permet, en effet, d’envoyer une tower par mail. Il suffit pour ce faire de cliquer sur le rectangle et d’indiquer l’adresse du destinateur, celle du destinataire et l’objet du mail.Enfin, la troisième action permet d’ajouter des mots au site. Ces mots n’apparaissent pas tout de suite et ne forment pas une tower à eux seuls, ils semblent répartis dans différentes towers. Il est difficile de comprendre comment s’exécute cette action et qui la réalise. L’internaute peut ajouter trois séries de mots. Lorsqu’il clique sur finished un écran lui indique les mots qui vont être ajouté. Puis l’internaute peut taper sur wads words et ajouter d’autres mots ou tower pour voir d’autres assemblages de mots. Mais il ne voit pas son propre assemblage. L’ensemble semble aléatoire comme s’il dépendait d’un logiciel de traitement de données. Il est cependant intéressant de voir comment des mots pris au hasard et assemblés sous le symbole très schématique des attentats du 11 septembre 2001 (les tours blanches) prennent un tout autre sens et acquièrent une dimension emblématique. Par exemple de simple mots comme “poussière”, “chute” ou “image” prennent une valeur symbolique encadrés des deux tours blanches. Cette oeuvre web repose sur la puissance d’évocation qui entoure les attentats du 11 septembre. Ainsi, des mots ne référant pas précisément aux événements deviennent des marqueurs d’une pensée ou d’un sentiment sur ces événements. Pour autant, l’oeuvre dans son fonctionnement mécanique ne crée pas cette lecture. Les mots dans leur typographie même (chacun ayant une police et une forme différentes) sont envisagés individuellement et semblent collés les uns aux autres sans lecture globale de l’ensemble. L’évocation du 11 septembre se joue donc essentiellement dans la lecture qu’en fera l’internaute.

   

Précision sur la forme adoptée ou sur le genre

Œuvre hypermédiatique interactive

  

Précision sur les modalités énonciatives de l’œuvre

L’œuvre paraît jouer sur la symbolisation des mots par leur contextualisation. Le site propose donc autant une forme ouverte et libre d’interprétation qu’une présentation guidée par des mots clé (comme towers) dont la représentation est à peine figurée.

  

Modalités de présence du 11 septembre

La présence du 11 septembre est-elle générique ou particularisée?

Paradoxalement, dans 9-11, la présence du 11 septembre est générique par son caractère implicite. Nulle part il est fait mention du 11 septembre dans l’œuvre même, seul le titre rappelle l’événement, mais ce faisant, il recontextualise chaque mots employé, plus exactement un mot employé dans la base du site: towers. Ce procédé entraine une relecture implicite de l’ensemble du site comme une réaction (hommage ou dénonciation) aux attentats du 11 septembre 2001.

  

Les événements sont-ils présentés de façon explicite?

Le point de vue sur les événements du 11 septembre 2001 est clairement antérieur. Le processus même de ce site repose sur la mythification qui a été faite des attentats dans leur retransmission visuelle, orale et écrite. C’est par ce biais que l’œuvre joue sur l’implicite et la force de symbolisation des mots.Aucun moyen de transport, ni aucun mode de communication n’est représenté.

  

Quels sont les liens entre les événements et les principaux protagonistes du récit (narrateur, personnage principal, etc.)?

Le point de vue sur les événements dans cette œuvre est très extérieur. Le site joue sur deux échelles de plan ici. Dans son ensemble, 9-11 dépend d’un point de vue personnel (celui du concepteur de l’œuvre), mais ce regard questionne le point de vue général et collectif qui été créé sur ces événements. Ainsi, chaque internaute participant à l’œuvre se trouve dépossédé de toute intention puisque ses mots (en rapport ou non avec les événements du 11 septembre) seront sortis de leur contexte sémantique et formel pour nourrir avant tout la force de symbolisation de ces événements.

  

Aspects médiatiques de l’œuvre

Des sons sont-ils présents?

Il n’y a pas de son, l’œuvre est muette.

  

Y a-t-il un travail iconique fait sur le texte? Des figures de texte?

Le travail iconique fait sur les mots dans cette œuvre est très important. Il repose sur la décontextualisation des mots émis par les internautes pour les faire ressortir sous une autre forme, entourés d’autres mots. Par ce travail iconique, les mots deviennent de véritables emblèmes d’une angoisse collective, d’un regard flou et général sur le ressentiment qu’ont produit les attentats du 11 septembre 2001.

  

Autres aspects à intégrer

N/A

  

Le paratexte

Citer le résumé ou l’argumentaire présent sur la 4e de couverture ou sur le rabat

Il n’y a aucun résumé présenté avec cette œuvre.

  

Intentions de l’auteur (sur le 11 septembre), si elles ont été émises

N/A

  

Citer la dédicace, s’il y a lieu

Aucune.

    

Donner un aperçu de la réception critique présente sur le web

https://nt2.uqam.ca/fr/repertoire/9-11 [Page consultée le 3 août 2023]

  

Impact de l’œuvre

L’œuvre a été créée en 2007, nous pouvons toujours y avoir accès et y participer, le site semble donc suffisamment visité pour que l’œuvre persiste.

  

Pistes d’analyse

Évaluer la pertinence de l’œuvre en regard du processus de fictionnalisation et de mythification du 11 septembre

9-11 est une œuvre qui travaille pleinement le processus de mythification du 11 septembre dans l’imaginaire collectif. Cette œuvre repose sur l’implicite de la symbolisation. Dans 9-11 tout repose sur l’imaginaire collectif autour de deux énoncés tout à fait anodins hors contexte ou pris séparément: 9-11 et towers. Le site montre la force de l’évocation des événements en jouant sur une décontextualisation intense qui transforme chacun des mots employé sur le site en symbole. La puissance de ce processus provient de deux points révélant l’importance de la symbolisation autour de ces événements: l’interactivité de l’œuvre et le travail iconique fait sur les mots. L’interactivité de cette œuvre engage un ensemble de gens, anonymes et volontaires, une masse floue qui «représente» l’hétérogénéité de la population touchée par les attentats. Cet anonymat rend présent également dans l’œuvre l’idée de collectif, de pensée totalisante et de réaction commune (qu’on soit pour, contre ou sans opinion, il y a une mise en partage de l’expression). Ce premier ensemble associé à la forme même de l’œuvre qui joue sur la confusion des mots et l’annulation de sens érige chaque proposition d’expression en symbole: une symbolisation encadrée, au propre comme au figuré (avec les deux bandes blanches encadrant l’écran qui peuvent symboliser les tours), par une pensée générale et implicite sur le 11 septembre.Pourquoi le simple fait d’évoquer le terme towers transforme-t-il un ensemble de mots, sans rapport explicite ni lien sémantique, en un hommage, tout du moins une réaction sur le 11 septembre? 9-11 pose implicitement cette question et engage à penser notre propre formatage face à ces événements.

  

Donner une citation marquante, s’il y a lieu

N/A

  

Noter tout autre information pertinente à l’œuvre

N/A

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