Table ronde, 31 janvier 2012
Enjeux de la littérature française contemporaine: poétiques de l’histoire, politiques de la littérature
Le 31 janvier 2012 s’est déroulée une table ronde, organisée par le comité étudiant de Figura, intitulée «Enjeux de la littérature contemporaine: poétiques de l’histoire, politiques de la littérature».
Les participants de cette table-ronde étudiante de Figura sont Simon Levesque, Anne-Sophie Legendre-Girard, Julien Lefort-Favreau, Laurence Côté-Fournier et Christian Guay-Poliquin. Ils font état de leurs travaux respectifs sur la littérature française contemporaine.
Cette rencontre a été enregistrée par Carl Aksynczak au Café des arts (J-6170, UQAM) le 31 janvier 2012.
Communications de l’événement
Un démon de l’histoire. Le roman historique en procès dans «HHhH» de Laurent Binet
J’aimerais aujourd’hui vous parler d’un sujet qui me préoccupe et me fascine et s’inscrit dans le cadre de mes recherches doctorales. Il s’agit de la vraie fiction ou pour être plus clair de la fiction documentaire. C’est à dire une œuvre de fiction qui présente, montre, nomme et remet en question les sources documentaires de l’auteur à l’origine du récit, les inclut à même celui-ci, en fait des objets de la fiction au même titre que les lieux, personnages et actions et cela, sans pour autant nuire aux qualités proprement fictionnelles d’une diégèse assumée qui caractérise le romanesque. Pour en parler, j’ai choisi le roman de Laurent Binet HHhH.
Simon Levesque est doctorant en sémiologie et chargé de cours en études littéraires à l’Université du Québec à Montréal. Il est récipiendaire d’une bourse d’études supérieures du Canada Vanier (2013-2016). Sa thèse, en cours de rédaction, porte sur l’anthropologie de l’État et la guerre dans les premières œuvres de J.M.G. Le Clézio, en filiation avec les travaux de Pierre Clastres. Il s’intéresse plus généralement aux rapports disciplinaires et discursifs entre l’ethnographie et la littérature.
Revisiter l’Histoire. Résistance politique dans «Jeanne Darc» de Nathalie Quintane
Mon intervention découle d’un constant que partagent habituellement les théoriciens en littérature. Selon plusieurs d’entre eux, les auteurs contemporains, tout en restant proche des exigences formelles des dernières avant-gardes, s’éloignent aujourd’hui d’une énonciation qu’on pourrait dire proprement engagée. Un certain désenchantement, on le sait, entoure la notion d’engagement.
Anne-Sophie Legendre-Girard est étudiante à la maîtrise en études littéraires (profile recherche) à l’Université du Québec à Montréal.
Politique de la littérature ranciérienne: remettre en question la parole légitime
Plutôt que de vous présenter l’auteur qui fait l’objet de ma recherche, je vais plutôt vous présenter les dessous de ma thèse, soit l’idée de «politique de la littérature», expression ici volée au philosophe français Jacques Rancière dont je présenterai l’œuvre de façon violement synthétique.
Pour le dire très simplement, la politique de la littérature rancièrienne s’inscrit en faux par rapport à l’engagement sartrien car elle «ne concerne pas l’engagement des écrivains dans les luttes politiques et sociales de leur temps». Elle n’opposerait pas non plus les écrivains qui s’engageraient dans leur société à ceux qui se consacreraient à la pureté de leur art. Elle suppose plutôt que la littérature participe aux entreprises émancipatrices, aux entreprises politiques, en tant que telle et que le discours sur l’autonomie de l’art, tout comme ceux qui recherchent des critères d’identification externes à la littératures sont les deux faces d’une même médaille.
Julien Lefort-Favreau est chercheur post-doctoral au département d’études françaises de l’Université de Toronto. Il travaille sur les récits auto-biographiques français. Il est membre associé du centre FIGURA.
Actions poétiques, résistances du politique: le bilan ambigu de «Toi aussi, tu as des armes»
Des décénnies après la déclaration de Francis Ponge sur la nécéssité de désaffubler la poésie, de sortir du manège et de quitter le rond-rond poétique, des écrivains s’inspirent toujours de sa démarche pour définir ce que peut être la poésie à l’ère actuelle, dans ce monde supposé post-avant-garde où les expérimentation des années 1970 ont fait place à ce qu’on a qualifié comme retour du lyrisme. Ce retour vers une conception plus classique du poême était supposé palier à la désaffection qui minait un domaine poétique qu’on disait être devenu trop aride et trop hermétique après des années de formalisme.
Pour cette présentation je me concentrerai sur un livre qui, par les écrivains qu’il rassemble et les questions qu’ils pose, m’a paru apte à dresser le portrait d’une part du domaine poétique, celle associée naguère à sa frange la plus expérimentale. Les éditions La Fabrique, qui n’ont jamais publié de poésie, ont fait paraitre il y a quelque mois un collectif consacré à cette pratique intitulé Toi aussi, tu as des armes.
Laurence Côté-Fournier est candidate au doctorat à l’Université du Québec à Montréal et travaille sur l’imaginaire politique et poétique de la rhétorique dans les œuvres de Michel Leiris, Jean Paulhan et Francis Ponge. En plus d’avoir été membre du comité de rédaction de la revue Salon Double, pour laquelle elle a écrit de nombreux articles, elle a publié des essais dans Nouveau Projet, Pop-en-stock et codirigé le cahier ReMix «Un malaise américain: variations sur un présent irrésolu» pour l’OIC. Elle collabore régulièrement au cahier critique de la revue Liberté.
Historicité du post-exotisme: de l’engagement littéraire contemporain
Au lieu de faire une étude de cas, j’aborderai une perspective un peu plus théorique sur l’engagement littéraire et, plus précisément, sur l’engagement littéraire en tant que rapport au temps et rapport à l’histoire. La question que je pose est la suivante:
Comment le post-exotisme d’Antoine Volodine peut il est lu comme une forme de renouveau de l’engagement?
En revisitant la réflexion faite par Sylvie Servoise dans son bouquin Le roman face à l’histoire je vous propose ici de faire un rapide survol des paradigmes de l’engagement Sartrien avant m’attarder d’avantage aux modalités de l’engagement contemporain.
Christian Guay-Poliquin est doctorant en études littéraires à l’Université du Québec à Montréal et auteur du roman Le fil des kilomètres, paru en 2013, et du roman Le poids de la neige, paru en 2016 aux Éditions de la Peuplade. En 2013, il a été le récipiendaire du prix Mnémosyne du meilleur mémoire, qui lui a valu la parution d’un essai, Au-delà de la fin: Mémoire et survie du politique.