Colloque, 7 septembre 2012
«Les mains négatives»
«Le cinéma est une fin, il arrête le texte, il frappe de mort sa descendance: l’imaginaire», a dit Duras. Pour faire du cinéma, Duras a dû retrouver l’ombre au cœur de l’art de la lumière, cette ombre enceinte d’images où on est lancé par la lecture. D’être fait d’images qui ne «racontent» pas, le cinéma durassien est éminemment littéraire: il ne montre pas des images, il utilise l’audiovisuel pour donner à imaginer.
Dans ce contexte, Les mains négatives est un film presque allégorique: l’impression sur pierre du corps qui vibre d’un cri primitif d’amour et traverse les temps pour toucher un autre corps est une image assez précise de ce qu’est l’écriture pour Duras; simultanément, on voit des travellings de Paris à l’aube, quand seuls les travailleurs domestiques et les balayeurs de rue occupent la scène: c’est l’ombre de la Ville Lumière, qui dort sous les cartes postales.
Mauricio Ayer est professeur à l’Université de São Paulo.