Colloque, 10 décembre 2015
Bricolage générique: «La Classe de neige» d’Emmanuel Carrère
«Le bricolage est une manière de nommer, chez Lévi-Strauss, la pensée mythique qui travaille à coups d’analogies et de rapprochements et qui réorganise des matériaux précontraints. On peut faire l’hypothèse que le texte littéraire est, lui aussi, bricoleur. Comme le suggère déjà Gérard Genette dans ses Palimpsestes lorsqu’il affirme que l’hypertextualité, à sa manière, relève du bricolage. Ou encore comme l’écrit Jacques Dubois qui explique qu’en dépit de sa tension vers l’unité et la structuration, le texte est toujours à quelques degrés les résultats d’un bricolage, c’est-à-dire qu’il amalgame des fragments qui stylistiquement et sociologiquement, et j’ajouterai culturellement, sont de diverses origines.
L’ethnocritique souscrit à cette vision d’une hétérogénéité discursive, générique et culturelle constitutive des œuvres.
C’est dans ce cadre que je propose d’étudier aujourd’hui la mobilité de certains motifs, issus de la culture et du folklore, de la littérature orale et écrite, tout autant que des rites et des coutumes. Il s’agit d’une étude de ces motifs dans La classe de neige d’Emmanuel Carrère dont l’œuvre se caractérise plus généralement, selon Dominique Rabaté, par un nouveau réalisme plus brut, exigeant le croisement des paroles, des effets de construction pour dire ce qui nous agresse.»
Professeure adjointe au Département des littératures de langue française depuis 2019 et membre régulière de FIGURA, Sophie Ménard a obtenu un doctorat en études littéraires en 2011 (UQÀM/Paris-10). Outre sa thèse, parue sous le titre Émile Zola et les aveux du corps. Les savoirs du roman naturaliste (Classiques Garnier, 2014), elle a réalisé deux éditions critiques (La Conquête de Plassans d’Émile Zola, Classiques Garnier, 2013 et Mademoiselle Giraud, ma femme d’Adolphe Belot, Classiques Garnier, 2019) et a publié plusieurs articles sur Zola, les Goncourt, Maupassant, Baudelaire, Sand.