Colloque, 8 juin 2010
Art et scandale: les avant-gardes au péril de l’histoire
Les mouvements d’avant-garde au XXème siècle ont la particularité commune d’être extrêmement attentifs à l’image qu’ils renvoient, y compris dans leurs actes de subversion les plus radicaux. Le scandale apparaît comme une pratique centrale à plusieurs groupes d’avant-garde tels que Dada, le surréalisme et l’Internationale Situationniste qui peuvent ainsi afficher publiquement leur rupture complète avec la société contemporaine, affirmer ostensiblement leur haine pour les critiques d’art et leur indifférence aux réactions hostiles du public.
Dans mon intervention, je voudrais étudier la manière dont ces trois mouvements ont raconté leurs propres scandales, comprendre comment une banale dispute ou un simple graffiti devient un point central dans l’histoire du surréalisme ou de l’Internationale Situationniste. En effet, le scandale vaut d’abord par le récit qui en est fait, généralement relaté par ses propres acteurs. Ceux-ci se montrent ensuite à l’affût de toute photo ou coupure de presse qui rapporte l’évènement et reproduisent régulièrement ces documents dans leurs revues.
Plus généralement, l’étude de cette question permet de s’interroger sur le rapport de l’avant-garde à l’histoire: les mouvements qui se placent en marge des circuits artistiques réaffirment malgré tout leur existence historique, tout particulièrement à travers le récit de scandale. Le lien entre l’avant-garde et la question politique apparaitra également dans cette intervention, puisque le récit de scandale témoigne des liens ambigus des trois mouvements aux actions politiques. Enfin, cette question nous invite à réfléchir à la validité de ce procédé au XXIème siècle: quelles formes de scandale un mouvement d’avant-garde pourrait développer aujourd’hui?
Maxime Morel est professeur de l’Université Paris 1 – Panthéon Sorbonne et enseignant à l’École d’Art de Bayonne.