Colloque, 23 avril 2014

Percevoir et penser le monde: la cognition en question chez les personnages-narrateurs de Christian Oster

Raphaëlle Guillois-Cardinal
couverture
L’imaginaire contemporain. Figures, mythes et images, événement organisé par le Centre de recherche sur le texte et l'imaginaire Figura

Les personnages-narrateurs de Christian Oster, malgré leur apparente drôlerie, perturbent les repères du lecteur. D’une part, dépourvus de vision globale et incapables de synthétiser ou d’organiser ce qu’ils perçoivent, ils fragmentent et déhiérarchisent les éléments du récit. D’autre part, ils interprètent de façon excessive les détails les plus anodins et élaborent des hypothèses aux fondements incertains, ralentissant ainsi le déroulement de l’action et entraînant une non fiabilité de la narration. Dans cette optique, leurs perceptions partielles et désordonnées du réel, de même que leurs interprétations multiples, inutiles et subjectives, laissent place à une part d’inintelligibilité cognitive qui découle d’une conception de l’être humain où celui-ci se voit notamment considéré comme un herméneute dont la réflexion demeure improductive. À cet égard, la particularité des romans d’Oster est de ne pas pouvoir s’organiser conformément à une logique narrative qui raconterait le passage d’un état de savoir à un autre, et de ne pas reconduire la conception présupposée de la cognition qui s’y rattache. Partant de la représentation concrète de la cognition dans trois romans d’Oster, soit L’imprévu (2005), Sur la dune (2007) et Dans la cathédrale (2010), nous tenterons, en nous basant principalement sur les ouvrages de Barrère et Martuccelli (2009), Fontanille (1998), Fortier et Mercier (2004) et Ricoeur (1983-1985), de saisir les manifestations discursives et narratives et les enjeux conceptuels de la relative inintelligibilité cognitive des personnages, afin de voir en quoi la conception de la cognition qu’ils véhiculent s’éloigne d’une conception plus conventionnelle. Nous verrons que les romans ostériens supposent une conception remaniée de la cognition où celle-ci déstructure le monde plus qu’elle ne le structure ; les personnages-narrateurs apparaissent alors tels des êtres légèrement décalés, dépassés par un univers à la fois surchargé et rempli de blancs, un univers déstructuré et en partie inventé par eux.

Appuyée par le Fonds de recherche du Québec (FRQSC) et le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH), Raphaëlle Guillois-Cardinal a terminé sa maîtrise en lettres en décembre 2013, sous la direction du professeur Nicolas Xanthos. Son mémoire s’intitule «En périphérie de l’intelligible: cognition, action et affects chez les personnages-narrateurs de Christian Oster». Engagée comme assistante de recherche dans l’équipe du RANX pour le projet «Agir, percevoir et narrer en déphasage: les personnages déconnectés comme indicateurs des enjeux contemporains de la narrativité» (CRSH Savoir 2012-2016), Raphaëlle songe maintenant à poursuivre ses études au doctorat.

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