Colloque, 10 juin 2022

«Payer son contingent à la société»: la question de la traduction dans la correspondance de la présidente Durey de Meinières et d’Elizabeth Montagu

Kim Gladu
couverture
Femmes en correspondances (XVIIe-XVIIIe siècle), événement organisé par Nathalie Freidel, Emma Gauthier-Mamaril et Judith Sribnai

Octavie Guichard, veuve Belot, épouse Jean-Baptiste-François Durey de Meinières en 1765, ce qui met un terme, du moins, en apparence, à une courte carrière littéraire, marquée par la publication de quelques œuvres originales (notamment, ses Réflexions d’une provinciale sur le discours de monsieur Rousseau, citoyen de Genève (1756) et ses Observations sur la noblesse et le tiers-état (1758)), mais surtout de traductions d’ouvrages anglais. Elle avait ainsi proposé au public des Mélanges de littérature anglaise en 1759, l’Histoire de Rasselas de Samuel Johnson en 1760, le roman Ophélie de Sarah Fielding en 1763, ainsi que les deux premiers tomes de l’Histoire d’Angleterre de David Hume en 1763 et 1765, ce qui lui vaudra d’ailleurs le surnom de «Mme Tudor» que lui donnera Charles Duclos.

Or, après son second mariage, la nouvelle présidente Durey de Meinières cessera de publier, mais elle entretiendra une correspondance importante avec plusieurs hommes de lettres tels que Voltaire, Hume, Helvétius ou François Devaux (le «Panpan» de Françoise de Graffigny). Toutefois, ce sont ses échanges avec la bluestocking Elizabeth Montagu, qui s’échelonnent de 1776 à 1792, qui retiennent l’attention de Kim Gladu. Dans ceux-ci, Octavie Durey de Meinières semble trouver une occasion de renouveler ses idées sur la traduction et, ce faisant, sur l’écriture, qu’elle considérait déjà en 1759 comme une manière de «paye[r] du moins [s]on contingent à la société» (Mélange de littérature anglaise, 1759, «Préface du traducteur», p. vi), témoignant ainsi d’une forme d’engagement citoyen adapté à la condition féminine. Les lettres de la présidente Durey de Meinières adressées à Elizabeth Montagu offrent ainsi une occasion inédite d’observer la manière dont la parole privée contribue à la construction d’une identité d’autrice constante dans ses opinions et permet de réaffirmer une stratégie d’autolégitimation qui s’était montrée relativement efficace quelques années auparavant.

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