Article IREF

Chapitre 5. Les milieux policiers et la lutte contre la traite

Sandrine Ricci
Lyne Kurtzman
Marie-Andrée Roy
couverture
Article paru dans La traite des femmes pour l’exploitation sexuelle commerciale: entre le déni et l’invisibilité, sous la responsabilité de Sandrine Ricci, Lyne Kurtzman et Marie-Andrée Roy (2012)

Le présent chapitre expose les résultats de notre enquête sur les initiatives des milieux policiers et leur compréhension de la traite aux fins d’exploitation sexuelle. Le phénomène de la traite à des fins d’exploitation sexuelle est appréhendé différemment selon les corps de police qui interviennent, en fonction des niveaux de juridiction de ceux-ci et des dispositions légales qu’ils sont appelés à appliquer. Au Québec, l’effectif policier se compose de quatre types de corps de police: la Gendarmerie royale du Canada (GRC); la Sûreté du Québec (SQ); les corps de police municipaux, tel que le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) et les services de police autochtones.

Dans le cadre de notre recherche, nous avons rencontré deux gendarmes de la GRC, seul corps policier au Canada à détenir un mandat officiel de lutte contre la traite internationale des êtres humains sur l’ensemble du territoire canadien. Nous avons également eu un entretien téléphonique avec une personne-ressource de la section des enquêtes fédérales et de l’immigration de la GRC, affectée au dossier de la lutte contre la traite. Nous avons eu l’occasion d’être en contact avec des agents de l’Agence des services frontaliers du Canada. En ce qui concerne le SPVM, nous avons interviewé des membres de l’équipe luttant contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales (ESEC). Nous avons également eu des échanges éclairants avec plusieurs enquêteurs de la section moralité d’un poste de l’ouest de Montréal impliqués dans des opérations concernant la traite. De plus, nous avons rencontré des policiers du Centre opérationnel Sud du SPVM, dont l’action porte notamment sur la prostitution adulte au centre-ville. Pour finir, nous avons eu des conversations téléphoniques avec un agent dûment mandaté par la Sûreté du Québec1Nous remercions toutes ces personnes pour leur précieuse collaboration et leurs noms resteront confidentiels.(SQ).

Par ailleurs, nous avons participé à une ronde de type «COBRA»2 Un COBRA est une activité où des civils accompagnent des membres du corps policier du SPVM dans le cadre de leur travail régulier. COBRA est l’acronyme de Connaissances Opérationnelles de Base Renouvelées Annuellement. dans les milieux de l’industrie du sexe avec une patrouille du Groupe d’intervention locale (GIL) du poste 21 (SPVM). Le COBRA couvrait le périmètre René-Lévesque/St-Laurent/Ontario/Saint-André au centre-ville de Montréal. Nous avons également accompagné des policiers du Centre opérationnel ouest (SPVM) dans le cadre d’une opération dans un salon de massage tenu par une femme d’origine chinoise qui avait fait l’objet d’une plainte d’une personne résidant dans le quartier. Enfin, nous avons rencontré ces personnes et effectué ces activités de recherche-terrain pour mieux comprendre les interventions policières en ce qui a trait à la prostitution et de la traite des femmes à des fins prostitutionnelles, et dans la perspective d’être mises en contact avec des victimes de traite au Québec.

 

5.1 La GRC et la lutte contre la traite: une approche multilatérale

5.1.1 Le rayon d’action de la GRC

En 2004, le ministre de la Justice de l’époque, Irwin Cotler, fait de la traite des êtres humains une priorité gouvernementale. À cette époque, deux gendarmes étaient affectés à temps plein au dossier de la traite pour le Québec au sein de la section immigration et passeports de la GRC de Montréal qui comprenait une vingtaine de personnes. Cette section enquête sur le crime organisé, la traite et la contrebande, ainsi que sur les activités de «prétendus conseillers en immigration», l’«exploitation frauduleuse du programme d’immigration par des entreprises» et la «prolifération» de divers documents falsifiés. En théorie, la GRC, service de police fédéral, peut non seulement enquêter sur les cas internationaux de traite de personnes, mais aussi sur les cas de traite interne. Les lois élaborées et adoptées par le Parlement canadien sont conçues à ces fins, par exemple, les articles 279.01 à 279.03 du code criminel ainsi que l’article 118 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR) votée en 2002 et, depuis novembre 2005, la loi C-49 contre la traite des personnes qui ajoute de nouvelles infractions au code criminel.

5.1.2 Une priorité stratégique

Selon le Rapport sur les plans et les priorités (RPP) de 2008-2009 de la Gendarmerie royale du Canada, l’intervention en matière de traite des personnes s’inscrit dans la lutte contre le terrorisme, elle-même considérée comme une «priorité stratégique» visant à «Réduire la menace d’activité terroriste criminelle au Canada et à l’étranger».

Jusqu’à une cinquantaine d’organisations terroristes sont présentes dans une certaine mesure au Canada et participent à une gamme d’activités comme la collecte de fonds (argent envoyé à l’étranger pour financer des activités terroristes), l’acquisition d’armes, le trafic de marchandises et la traite de personnes. (GRC, 2009)

Créé en février 2004, le Groupe de travail interministériel fédéral sur la traite des personnes (GTITP) regroupe 18 ministères et organismes, incluant la GRC et Condition féminine Canada3 Pour obtenir la liste complète des partenaires et autres informations sur le comité, voir le site internet du ministère de la Justice: http://canada.justice.gc.ca/fra/sv-fs/tp/p4.html> (consulté le 16 avril 2009). Il a reçu le mandat de coordonner les efforts déployés à l’échelle nationale pour combattre la traite des personnes et de mettre au point une stratégie fédérale. Actuellement présidé conjointement par Affaires étrangères et Commerce international Canada (MAECI) et par Justice Canada, le Comité poursuit ses travaux.

La traite est également abordée dans le cadre de la protection de l’intégrité des frontières canadiennes, en particulier via le Programme des questions d’immigration et de passeports qui accueille le Centre national de coordination contre la traite de personnes (CNCTP). Récemment mis sur pied par la GRC, ce Centre fournit de la formation et des services analytiques aux forces de l’ordre. Il se veut un «point de liaison national pour l’application de la loi et les enquêtes en matière de traite de personnes»4 Source: site internet de la GRC: <http://www.rcmp-grc.gc.ca/imm-passp/htncc-cnctp-fra.htm> (consulté le 5 février 2009) et collabore avec différents organismes nationaux et internationaux.

En 2010, le Centre national de coordination contre la traite de personnes (CNCTP) établi par la GRC a lancé la campagne «Je ne suis pas à vendre», afin de sensibiliser le public à la question de la traite de personnes. Selon les sources officielles du CNCTP5 Site internet du Centre http://www.rcmp-grc.gc.ca/ht-tp/index-fra.htm (consulté le 28 juillet 2011), une trousse d’information distribuée à 8 000 exemplaires et des ateliers/séances de sensibilisation à la traite des personnes ont permis de rejoindre plus de 34 000 personnes au Canada.

5.1.3 Quelle vision de la traite et de ses enjeux pour la GRC?

Au moment de la cueillette de données, le site internet de la GRC conviait les internautes qui voulaient en savoir davantage sur la formation offerte aux agents d’application de la loi en matière d’enquête sur la traite de personnes à consulter un guide intitulé Human Trafficking − Reference Guide for Canadian Law Enforcement6 Publié par The International Centre for Criminal Law Reform and Criminal Justice Policy en 2005, ce manuel de 72 pages s’inspire d’un ouvrage similaire produit pour le Global Programme on Trafficking in Persons des Nations Unies (Office on Drugs and Crime). Des universitaires et différentes instances judiciaires ont collaboré à la version canadienne. Il ne semble pas être disponible en français. Par contre, la section québécoise du site de la GRC propose à son personnel ainsi qu’au grand public de nouveaux outils sous la forme d’un dépliant d’information de 2 pages sur la traite, intitulé Je ne suis pas à vendre, d’un Guide opérationnel sur la traite de personnes pour les agents d’application de la loi de 14 pages et d’une Carte aide-mémoire – Victimes de la traite des personnes indiquant quelques caractéristiques pour reconnaître une victime et un numéro de téléphone 24 heures pour signaler un cas ou autre information. En ligne <http://www.rcmp-grc.gc.ca/qc/ved-feat/2008/2008-11-01-fra.htm> (consulté le 4 février 2009). Il retient la définition internationale de la traite (Art. 3.a) et insiste sur le caractère multivoque du phénomène appelant à une collaboration multilatérale entre les différents acteurs et actrices de la lutte, incluant la société civile. Le manuel souligne également la difficulté de mener des enquêtes et d’aboutir à des condamnations précisément du fait de la complexité et de la multiplicité des enjeux en présence, conjugué au manque d’efficience des dispositions pénales. Enfin, il met en relief la nécessité de comprendre la traite comme un processus impliquant différents crimes, plutôt que comme un acte criminel stricto sensu:

Human trafficking is a crime that is frequently international in nature, crossing national borders and jurisdictions. Human trafficking can also occur domestically, within our own borders. Law enforcement efforts can be confounded by the need to conduct investigations or pursue criminals across international borders. Substantive and procedural criminal law dispositions do not always support an effective and proactive law enforcement response to that problem. Existing laws are often very difficult to enforce. Finally, human trafficking is in fact better understood as a collection of crimes bundled together rather than a single offence, a criminal process rather than a criminal event. Stopping human trafficking involves a number of complex law enforcement activities. In spite of all these difficulties, there are law enforcement officials around the world who are successfully arresting and prosecuting traffickers and disrupting their activities. […] Most have found it essential to coordinate their efforts across agencies, including working with new partners such as non-governmental organizations, the media, victim assistance agencies, and various service providers.

La traite des êtres humains est un crime qui est souvent de nature internationale, traversant les frontières nationales et les juridictions. La traite des êtres humains peut également se produire au niveau national, au sein de nos propres frontières. Les efforts des agents chargés d’appliquer la loi peuvent être entravés par la difficulté de mener des enquêtes ou de poursuivre des criminels au-delà des frontières. Les dispositions pénales ne proposent pas toujours des solutions efficientes et proactives à ce problème. Les lois en vigueur sont souvent très difficiles à appliquer. Enfin, la traite des êtres humains doit être appréhendée en tant qu’ensemble de crimes interreliés, plutôt que comme une seule infraction, en tant que processus criminel plutôt que comme simple acte criminel. Mettre un terme à la traite des êtres humains implique une multiplicité d’actions dans le cadre de l’application de la loi. En dépit de toutes ces difficultés, des forces de l’ordre partout dans le monde procèdent avec succès à l’arrestation et à la poursuite judiciaire des trafiquants et perturbent leurs activités. […] La plupart [des forces de l’ordre] ont constaté qu’il était essentiel de coordonner leurs efforts mutuels, et de créer des réseaux collaboratifs avec de nouveaux partenaires tels que les organisations non gouvernementales, les médias, les organismes d’aide aux victimes et les divers fournisseurs de services. (International Centre for Criminal Law Reform and Criminal Justice Policy, 2005: 7, nous traduisons)

Pour les gendarmes interviewées, une situation de traite implique un mouvement migratoire du pays d’origine vers le Canada, avec entrée légale ou illégale au pays, et une pratique d’abus, de tromperie, ou de coercition auprès de personnes qui entrent au Canada. La tromperie peut survenir à tout moment dans le processus migratoire et elle peut porter tant sur les salaires que sur les conditions de travail: «il faut qu’il y ait un mensonge», soulignent les policières rencontrées. Elles précisent toutefois que même sans tromperie ou mensonge, une personne peut être considérée comme trafiquée, si elle est sous-payée et incapable de rembourser la dette contractée pour venir au Canada. Le contrôle exercé par les trafiquants serait un critère de reconnaissance de la traite pour la GRC.

Les trafiquants agitent le spectre de l’illégalité du statut d’immigration pour manipuler et contrôler leurs victimes. Une personne en situation d’illégalité dispose de peu de recours comparativement, par exemple, à une autre détenant un statut de résidente permanente «qui peut aller n’importe où et [qui] va avoir des services». À cet égard, nos répondantes de la GRC nous ont assurées qu’advenant le témoignage d’une victime en cour, elles veilleraient à ce que celle-ci dispose de papiers d’immigration en règle afin qu’elle puisse rester au Canada si elle le désire.

Les gendarmes expliquent qu’il est très difficile de détecter des victimes parce que la traite «ce n’est pas écrit sur le front» et surtout parce que les victimes ne parlent pas. Le silence des femmes trafiquées est dû, selon elles, à différents facteurs : le manque d’information sur la traite (elles ne connaissent pas le phénomène dont elles sont les victimes); le manque de confiance envers les autorités policières; le tabou entourant la prostitution; l’isolement des femmes surtout lorsqu’elles ne parlent ni le français, ni l’anglais; l’absence de solidarité dans le milieu de la prostitution (culture individualiste). Les deux gendarmes estiment que les victimes sont des personnes «très vulnérables [du fait qu’elles] ont peu de ressources au niveau de la culture de la société d’accueil, pas beaucoup d’argent, d’éducation».

Les policières de la GRC émettent l’hypothèse que le Canada constitue plus un lieu de transit qu’un point d’aboutissement pour la traite internationale. Les policières évoquent aussi le fait que la traite locale (ou dite interne) est plus facile à investiguer et qu’elle constitue l’essentiel des cas sur lesquels les services policiers enquêtent. Par ailleurs, les salons de massage, les bars de danseuses nues, et autres lieux où sont offerts des «services sexuels», sont considérés comme des endroits particulièrement propices pour dissimuler des femmes faisant l’objet de traite à des fins prostitutionnelles.

5.1.4 La sensibilisation et la concertation des acteurs gouvernementaux

Les deux gendarmes rencontrées ont pour mandat de faire de la sensibilisation sur la traite ainsi que de susciter des pratiques de concertation avec d’autres corps policiers et différents partenaires. En effet, à l’instar du plan d’action dont s’est dotée leur institution, elles considèrent que la GRC ne peut lutter seule contre la traite d’êtres humains:

Il faut travailler avec les polices, les services policiers municipaux, avec Immigration, avec différents partenaires, les ONG: on ne peut pas régler les problèmes nous-mêmes ! […] Après, quand ils [Immigration Canada, les services de police municipal et provincial, etc.] vont être sensibilisés, c’est sûr qu’ils vont être plus à l’affût, ils vont nous appeler.

Une autre personne-ressource de la section des enquêtes fédérales et de l’immigration de la GRC, affectée au dossier de la lutte contre la traite, dit essentiellement travailler à sensibiliser les différents acteurs en présence dans l’appareil gouvernemental. Elle compare le problème de la traite à celui de la violence conjugale, alors qu’il y a vingt ans, le gouvernement n’avait pas de programmes d’action pour combattre ce fléau, que la population –sans oublier les juges, les avocats ou les policiers– considérait que les femmes faisaient exprès de se faire battre. Avec du temps, de la patience, des actions, cette agente se dit confiante que les mentalités évolueront au niveau de la traite, comme cela a été le cas pour la violence conjugale. Elle estime que les parcours varient d’une victime à une autre, qu’il faut y aller «au cas par cas» et amener les corps policiers à comprendre cela, d’autant qu’il n’y a pas de portrait-type de la victime, ni de statistiques fiables.

 

5.2 Prostituions adulte et juvénile: deux problématiques bien distinctes pour le SPVM

5.2.1 La lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants

Au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), le module Exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales (ESEC) lutte contre différentes formes d’exploitation juvénile dont la pornographie, la prostitution, le tourisme sexuel ainsi que la traite. Mise sur pied en 2002, cette équipe a notamment mené des centaines d’enquêtes sur les gangs de rue impliqués dans la prostitution de mineures. Elle était initialement composée d’un superviseur, d’une quinzaine de policiers, d’une analyste du renseignement criminel et d’une anthropologue rattachée à la section recherche et planification stratégique, Michelle Côté. Cette dernière estime que la définition suivante fait consensus dans le milieu de la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants:

L’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales est une violation fondamentale de leurs droits. Elle comprend l’abus sexuel par l’adulte et une rétribution en nature ou en espèces versée à l’enfant ou à une ou plusieurs tierces personnes. L’enfant y est traité comme un objet sexuel et comme un objet commercial. L’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales constitue une forme de coercition et de violence exercée contre les enfants, et équivaut à un travail forcé et à une forme contemporaine de l’esclavage (Côté, 2005. C’est nous qui soulignons).

Michelle Côté (2004) a aussi recensé, pour la période allant de septembre 2002 à octobre 2003, 379 cas de mineurs, dont 356 jeunes filles qui ont été victimes d’exploitation sexuelle sur le territoire de Montréal. Certains de ces cas s’associent à la traite à des fins prostitutionnelles (nombre exact non mentionné). L’étude montre qu’il y a sous-évaluation du nombre de victimes d’exploitation sexuelle, que le profil de celles-ci s’avère très diversifié et qu’il existe une grande variété d’approches de la part des proxénètes, impliquant des degrés variables de violence pouvant aller jusqu’aux menaces de mort avec arme à feu. Il apparaît que les proxénètes déplacent leurs victimes dans un rayon pouvant dépasser 700 km (donc en dehors du Québec) et, qu’en conséquence, cette pratique de traite locale nécessite une collaboration entre les divers services de police au Québec et ailleurs au Canada.

5.2.2 La prostitution des adultes

Si le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a accepté de créer une équipe qui travaille sur la traite des enfants à des fins d’exploitation sexuelle, selon une personne rencontrée ayant participé à la mise en place de cette équipe, «il n’a pas été possible d’intégrer la question de la traite d’adultes». Au niveau de la Ville de Montréal, la police intervient sur des cas de prostitution adulte seulement lorsqu’il s’agit de prostitution de rue ou lorsqu’il y a une plainte de résidents ou résidentes relative à la prostitution7 Dans le cadre d’activités de terrain avec le SPVM, les policiers nous ont décrit une opération typique de prévention de la prostitution dans l’est de Montréal. À cette occasion, une agente simule une activité de femme prostituée (sollicitation) et quand elle s’est entendue pour une transaction particulière avec un client, ses collègues interviennent pour remettre un «avertissement» au client. Il ne s’agit pas d’une contravention, mais si cet individu est repris dans une autre opération policière, cet avertissement aggrave son cas.. Elle travaille à l’intérieur du cadre législatif qui conçoit le racolage comme une nuisance publique, en vertu de l’article 213 du Code criminel.

5.2.3 Connaissances et perceptions du SPVM sur la traite

Sur le terrain, la connaissance que les policiers du SPVM ont de la traite varie considérablement. Nous avons tout d’abord rencontré des policiers du Centre opérationnel Sud dont l’action porte sur la prostitution adulte du centre-ville de Montréal. Cette équipe connait l’existence de la traite des femmes à des fins prostitutionnelles mais ses interventions ne sont pas orientées en ce sens. Son action vise plutôt à répondre aux plaintes formulées par les citoyens et les citoyennes par rapport aux différentes problématiques liées à la prostitution de rue.

Un sergent du Centre opérationnel Sud confirme qu’il n’y a, à l’heure actuelle, que très peu d’opérations policières dans les différents lieux de prostitution cachés. En vertu du principe officieux «Si on ne voit pas, c’est pas grave», on ne considère pas que ce type d’activités constitue une nuisance publique au même titre que la prostitution de rue. Il conçoit la traite comme un trafic visant l’exploitation de femmes étrangères illégales. En ce qui concerne la traite locale, il observe que beaucoup de danseuses se déplacent dans différents bars ou dans d’autres provinces et même jusqu’aux États-Unis; «c’est très commun», affirme-t-il. Le sergent considère également qu’elles sont contrôlées et donc déplacées par leurs proxénètes.

Un enquêteur œuvrant au sein de la section moralité d’un poste de l’Ouest admet qu’il y a matière à éclaircissements pour saisir la différence entre traite et prostitution, d’autant que son superviseur appréhende quant à lui indistinctement les deux phénomènes8 Voir notre définition de la traite à des fins d’exploitation sexuelle, en introduction, où nous précisons que bien que la traite soit indissociable de la prostitution, elle constitue l’un des moyens auquel a recours l’industrie du sexe pour approvisionner le marché de la prostitution.:

C’est la même chose. C’est juste utiliser des mots différents. Ce que la [loi sur la] traite a fait, c’est mettre des mots sur ce qui était inacceptable et le faire dans une loi. Un gars [client] qui va acheter une fille sur le coin d’une rue, c’est de la prostitution, mais c’est de la traite aussi, s’il sait qu’elle est exploitée par quelqu’un. […] Selon moi, on devrait criminaliser ça directement, mais on n’est pas rendu là.

Selon cette analyse, qu’il y ait déplacement ou non, qu’il y ait coercition ou non, le fait de transiger financièrement des «services sexuels» constitue de la traite à des fins prostitutionnelles. Dans cette perspective, la responsabilité du client devient centrale, surtout lorsque ce dernier fait preuve de ce que le superviseur appelle un «aveuglement volontaire», par rapport à la situation de la femme prostituée:

Pourquoi on criminalise la fille et qu’on ne criminalise pas le gars ? On le fait, mais c’est pour une infraction… c’est pour la circulation. […] Le client qui achète ou qui paye pour avoir les services d’une personne qu’il sait exploitée, il est accusable de traite de personne. […] Moi c’est sûr que si j’en trouvais un [client], lorsqu’elle s’est fait casser le nez et qu’elle a les deux yeux au beurre noir, j’irais le voir, lui. Mais ils [les proxénètes, NDLR] ne les envoient pas travailler quand ils les ont battues.

Du point de vue de son travail sur le terrain, ce policier ne considère pas non plus utile de distinguer traite internationale et traite interne, puisqu’on y retrouve généralement les mêmes victimes: «Nos filles québécoises qui sont vendues, exploitées, se retrouvent dans tout le réseau et celles qui sont vendues à l’international ou qui sont envoyées, ce sont les mêmes filles qui travaillent ici, parfois dans les clubs, parfois dans les agences».

Clients et proxénètes apparaissent considérés in globo comme des «prédateurs» au sein de ce commerce du sexe, et même comme des trafiquants, «parce qu’ils en profitent tous…». Le policier qualifie de particulièrement dangereux les «gars de gang» qui exploitent plusieurs femmes et n’hésitent pas à assurer un «contrôle direct avec la violence ou la manipulation». Si la plupart des suspects récemment appréhendés pour des cas de traite ou qui sont activement recherchés par la police semblent issus des communautés ethnoculturelles9 Pour aborder la question ethnicisée de la traite avec le policier, l’intervieweuse a partagé ses observations à l’effet que les récents cas de traite impliquaient presque toujours des proxénètes issus de groupes racisés ou des communautés culturelles, tout comme les nombreuses affiches de type « Avis de recherche » disposées sur les murs dans les bureaux de l’équipe., le superviseur ne tire aucune conclusion de cet état de faits:

Je m’en fous moi, que ce soit un Autochtone, un Blanc, un Russe, un Noir. C’est lui le plus dangereux, c’est lui qu’on prend. Et c’est pour ça que dans l’éventail de ceux que j’ai fait, j’ai des gars du crime organisé russe, j’ai des motards, j’ai des Noirs, j’ai des Autochtones…

Pour résumer son propos, le policier préfère se concentrer sur le point commun entre ces individus, c’est-à-dire l’exploitation des femmes et leur insertion dans un système organisé pour en tirer un profit maximal, alors que chaque acteur de la chaîne exige son dû à la femme qui est prostituée. Il explique le mode de fonctionnement typique d’une telle exploitation:

Quand la fille commence, elle a un montant X à elle. Lui, par exemple, il l’envoie danser dans un club de danseuses à 10 [dollars], un club de danse où elle va devoir se prostituer au complet […] lui, il bouge pas, il reste assis, ça ne lui coûte rien. Quand elle va revenir, elle va lui donner tout son argent. Entre les deux, elle va appeler à l’agence de danseuses pour pouvoir aller danser à Vaudreuil, par exemple au [club X] qui est un bar de danseuses où il y a des services sexuels complets. […] Elle va prendre un chauffeur, c’est 50 $ pour le chauffeur, donc avant même de travailler, ça lui coute 50 dollars pour y aller. Rendue là, ça va lui coûter un autre 50-100 $ de «service bar» qu’ils appellent, pour pouvoir travailler dans le club. L’agence de danseuse qu’elle a appelée pour aller travailler là appartient aux motards: elle vient de donner un 50 $ aux motards. Le 50 à 100 $ qu’elle donne au club de danseuses, retourne à cette agence-là qui appartient aux motards […] Donc elle est rendue à 150-200 $ [incluant le 50 $] pour retourner −elle n’a pas travaillé encore. Le reste de son argent, quand elle revient à la maison, il faut qu’elle le donne à monsieur pimp. Donc tout le monde se sert dans ses poches.

À l’instar du profil type du trafiquant, le portrait de la victime n’est pas évident à brosser. Le policier mentionne toutefois quelques caractéristiques générales qu’il a pu observer: il s’agit de jeunes femmes qui souffrent d’importantes carences affectives, elles ont subi des mauvais traitements dans l’enfance ou évolué dans un climat familial instable et elles connaissent parfois une situation financière précaire. S’il conçoit que des femmes prostituées «indépendantes» puissent exister, elles représentent les «rares exceptions». Il décrit cette «minorité» comme celle qui travaille à son propre compte, s’est bâti un site internet, se déplace en taxis et parvient à être, sinon complètement autonome, à tout le moins «consentante» et «bien» [dans la prostitution]. Il considère toutefois:

[qu’] au bout de la ligne, elle va se retrouver à un moment donné victimisée. Si c’est pas par un client, l’ultime, c’est qu’elle va vouloir arrêter de faire ça et se rendre compte qu’elle est soit incapable, soit qu’elle reste marquée, parce qu’elle n’est pas capable d’avoir des relations normales avec les hommes. Il y a des troubles associés avec avoir fait ça pendant une certaine période. Donc, si on regarde ça de façon plus profonde, ce phénomène-là, il y a beaucoup plus de victimes qu’on pense, c’est beaucoup moins beau… 

5.2.4 Les obstacles à la lutte policière contre la traite

Le fait que le SPVM fonctionne à l’intérieur d’un cadre législatif qui conçoit le racolage comme une nuisance publique, son action se traduit par un manque d’interventions proactives sur les diverses formes d’exploitation sexuelle des femmes adultes, ce qui engendre d’importantes lacunes en termes de connaissances sur la traite. Ainsi, à la question de savoir pourquoi il existe aussi peu de données sur la traite des femmes, un membre de l’équipe ESEC répond:

Parce qu’il n’y a pas de plaintes. Il faut qu’il y ait une plainte, il faut qu’il y ait quelqu’un dans la communauté qui place un appel pour que le SPVM soit dans l’obligation d’intervenir, mais peut-être même de façon limitée. L’autre façon de traiter la criminalité, c’est le renseignement et c’est la recherche de l’information, donc la proactivité. Mais il faut beaucoup de renseignements pour monter une équipe et quand elle est montée, il faut trouver des cas rapidement. On a beaucoup de choses à apprendre […].

Au SPVM, prostitutions adulte et juvénile sont donc appréhendées comme deux questions distinctes; la prostitution adulte n’est pas considérée comme de l’exploitation alors que c’est le cas pour les enfants. Selon un enquêteur, une telle disjonction mineur/majeur revêt un caractère incohérent et constitue un obstacle à son travail contre l’exploitation sexuelle et la traite:

17 ans, c’est inacceptable, il faut faire tout ce qu’on peut, mais 18 ans et un jour, elle est consentante, c’est son droit, elle peut faire ce qu’elle veut. Il y a un peu d’incohérence, à mon sens, là-dedans, parce que ce que je vois −ça fait dix ans que je fais ça− c’est simplement la même petite fille, mais à un stade différent. Et puis les exploiteurs, eux, ne font pas la différence […] Ils vont l’exploiter au même titre que si c’était une mineure. C’est là où je trouve que c’est un peu inconséquent. Ce sont les mêmes qui exploitent les mineures et les personnes adultes. Grosso modo, ce sont les mêmes stratégies qui fonctionnent autant avec une petite fille de 13, 14, 15, 16 ans qu’avec une de 20, 22, 23.

Poursuivant sa démonstration, l’enquêteur souligne que les filles en Centre jeunesse, particulièrement ciblées par les trafiquants et les proxénètes, ne sont plus protégées dès lors qu’elles atteignent l’âge de 18 ans: elles «sont mises dehors et continuent, on les retrouve ailleurs dans leur parcours».

Un autre frein important à la lutte contre la traite réside selon lui dans l’incapacité actuelle de mener régulièrement des opérations dans les «maisons de débauche», tels les salons de massage, parce que la cour s’y oppose:

…la cour du Québec les refuse. […] Si on n’est pas capables de faire le lien dès le départ que les salons de massage sont liés au crime organisé, aux gangs de rue, ils ne seront pas autorisés par la Couronne, parce qu’à leur niveau ce sont des crimes qui ont moins de gravité. […] Si on fait les salons de massage comme on les faisait avant, oui, on va avoir des cas qui seront des dossiers mineurs, où ce sont des jeunes femmes qu’on retrouve, qui font des masturbations et qu’on n’est pas capables de faire de liens avec le crime organisé. […] Mais quand ça va faire un an, deux ans qu’on fait ça de façon répétée, ciblée, le renseignement criminel va monter. On va recruter des informateurs, il va y avoir plus de pression sur les responsables, les trafiquants. Là, le renseignement va commencer à bouger, comme au niveau des stupéfiants. On va pouvoir monter tranquillement dans les organisations puis retrouver des réelles victimes de traite internationale et nationale, et mettre la main sur des réseaux. (C’est nous qui soulignons)

Or, les salons de massages sont les plus susceptibles d’embaucher des victimes de la traite internationale. À cet égard, le policier rencontré admet son impuissance. Il considère que pour «faire» des dossiers, «il faut se mettre le nez dedans, ce qu’on ne fait pas présentement».

Évidemment, une entrave importante à la lutte contre la traite tient à la culture de normalisation de la prostitution qui, selon nos sources internes à cette institution, prévaut au SPVM, reflétant plus ou moins l’état d’esprit du reste de la société. Relayant aux passages différents mythes, plusieurs policiers rencontrés entrevoient effectivement la prostitution comme un mal nécessaire, un métier qui a toujours existé −même s’ils reconnaissent que les femmes ne le choisissent pas toujours− parce que des hommes «sont comme ça». On évoque même une sorte de fatalité: «Sans les métiers du sexe, il y aurait peut-être plus de viols» nous a dit l’un des agents. Ce dernier serait favorable à une législation qui officialiserait et structurerait un red light. En institutionnalisant le quartier de la prostitution, estime-t-il, cela favoriserait la paix sociale, protègerait mieux les personnes prostituées et faciliterait l’action policière. À la manière des lois qui tendent à entériner une vision de la prostitution comme une nuisance publique dont on souhaite limiter les effets négatifs, ce type de perception semble plutôt répandu parmi les agents et les agentes du SPVM.

Si on considère juste les bars de danseuses au Québec, et tout le portrait du commerce du sexe au Québec, c’est vraiment ancré, normalisé. Tout est normalisé, autant au niveau de la culture qu’au niveau de la tolérance qu’on a envers ces endroits-là. Ça a des conséquences, ça fait en sorte qu’on a l’impression que parce que c’est toléré, c’est légal, et que, parce que c’est légal, c’est correct, qu’il n’y a pas de victimes et que ce sont des endroits où il fait bon vivre. C’est presque ça présentement!

Un enquêteur constate que l’émergence d’une tendance à la banalisation de la prostitution dans l’espace public produit de réels impacts dans son travail quotidien et se traduit par une recrudescence des cas d’exploitation sexuelle de jeunes femmes:

S’il y a eu une évolution c’est vraiment que là, la mode, c’est que les filles veulent un pimp à cause des vidéos, des films, de l’argent, des valeurs qui foutent le camp, et que ce qui est important, c’est ce qui paraît. Ça joue… On perd en partant: les pimps n’ont même plus de travail à faire, c’est vendu ! C’est épouvantable, c’est pour ça qu’on se retrouve avec des cas comme ça, de plus en plus.

Ce policier considère qu’il y a un grand besoin de formation au sujet de la traite et de l’exploitation sexuelle, tant parmi ses collègues que parmi les procureurs-es, notamment sur la question du consentement de la victime. Cette question est fréquemment soulevée par les différents professionnels et professionnelles avec qui il collabore:

…on me demandait: «Mais oui, mais elle [la victime] est libre. Quand ils l’envoient de l’Ontario, il [le proxénète] n’est pas à côté, pourquoi elle ne s’en va pas, pourquoi elle revient ?» Ils ne comprennent pas. J’ai beau l’expliquer, je l’explique de telle, telle, telle façon. Tout ce qui est véhiculé: conséquences psychologiques, syndrome de Stockholm…

Déplorant l’impact de telles représentations sociales, le policier insiste sur la nécessité d’adopter, d’une part, une approche respectueuse lorsqu’on appréhende des femmes prostituées, et, d’autre part, une perspective la plus large possible pour comprendre le problème de l’exploitation sexuelle:

Je ne suis pas là pour moraliser. Si je n’avais pas fait ça pendant 10 ans, je penserais comme tous les autres gars. […] Là, j’ai eu la chance […] de rencontrer autant de filles et d’en rencontrer certaines qui m’ont envoyé promener, qui ont couru dans le palais de justice pour se sauver et qui me disaient: «Mon chum ! T’as arrêté mon chum ! Tu es un pourri ! bla, bla, bla…». Et qui, une fois les procédures finies, un an ou deux plus tard, quittent le milieu, me rappellent et me disent: «Ah, je ne savais pas dans quoi j’étais, je ne le réalisais pas, je ne pouvais pas, c’était mon monde.» En expliquant ça à quelqu’un qui comprend pas, il peut comprendre un petit peu plus. C’est pour ça que la dynamique est tellement compliquée, du fait qu’elles ne se reconnaissent pas elles-mêmes comme victimes.

Un obstacle corollaire à ceux de la banalisation de la prostitution et du manque d’information au sujet de la traite, avec lequel les agents d’application de la loi doivent composer, concerne les ressources humaines et financières qui leur sont allouées. L’un d’entre eux observe que si la lutte contre la traite à des fins d’exploitation était réellement une priorité, on y accorderait les mêmes budgets qu’à la lutte aux stupéfiants. Au lieu de quoi, il dit passer 80% de son temps à sensibiliser ses pairs sur l’enjeu de la traite au lieu d’agir sur le terrain pour arrêter les criminels. L’agent relate les conversations qu’il a typiquement avec ses collègues:

«C’est un commerce entre adultes consentants, la prostitution», c’est ça qu’on me sert. Le gars qui va acheter sa ligne de coke ou sa roche de crack, il n’y a personne qui lui a tordu un bras ! «Oui mais il devenu addict…» Mais la fille qui s’est rendue là, elle a été victimisée, elle a des carences affectives, il y a de quoi qui l’a rendue là, aussi, elle continue à se victimiser, on n’intervient pas. Lui, pourquoi, on intervient plus ? «Oui, mais c’est parce qu’il y a des conséquences sur sa santé.» Pas pour elle ? C’est la même chose. Les conséquences sont les mêmes. «Oui, mais les stupéfiants rapportent beaucoup d’argent au crime organisé !» [La traite à des fins de prostitution] C’est le crime qui est en plus forte progression au niveau de l’argent et au niveau des gens qui en vivent.

S’il reconnaît une certaine évolution du côté de la police, notamment celle de l’Ontario, l’agent du SPVM soutient que «ça stagne» du côté du Québec, largement à cause de l’ambigüité des lois canadiennes en matière de prostitution.

Si on avait une position claire, semblable à celle de la Suède, par exemple, où on détermine clairement qu’on traite ces femmes-là comme des victimes et que c’est inacceptable. […] Il va falloir que les gouvernements embarquent, fassent en sorte que comme pour la violence conjugale, comme pour l’alcool au volant, que ça devienne inacceptable et que la société au complet se mobilise et qu’on prenne position et qu’on détermine nos interventions à partir de ça.

Le seul moyen efficace de lutter tant contre la traite locale qu’internationale serait, selon lui, de créer une escouade mixte «SPVM/GRC/Sûreté du Québec/les corps de police alentour…» qui aurait juridiction sur l’ensemble du territoire québécois. Cette escouade mixte serait à même de «faire tous les liens avec tous ces endroits-là. Parce que de toute façon, [les trafiquants] les trimbalent partout, ils sont mouvants et mixtes partout».

 

5.3 La Sûreté du Québec: une absence de plan d’action

La Sûreté du Québec (SQ) n’a communiqué aucun plan d’action spécifique à l’égard des activités liées à la traite à des fins prostitutionnelles sur son territoire, lequel, selon nos diverses sources, compte de nombreux bars où les danseuses sont tenues «d’offrir» du sexe tarifé aux clients.

La Sûreté du Québec (SQ) dessert en exclusivité 1 038 villes, municipalités et territoires, fournissant des services de base incluant la patrouille 24 heures sur 24, la surveillance de la circulation routière et la prévention du crime. Le rapport d’activités 2009-2010 place «la prostitution» dans la catégorie «Autres infractions au Code criminel» qui comprend également «le jeu et les paris, les armes offensives, les infractions à l’ordre public, les opérations frauduleuses [et] les organisations criminelles»10 http://www.sq.gouv.qc.ca/mission-et-services/publications/rapport-activites-2009-2010.pdf, page 5 (consulté le 21 juillet 2011) (SQ, 2011). Des services dit spécialisés sont offerts sur l’ensemble du territoire québécois en matière de lutte contre le crime organisé, «principalement de souche québécoise et s’échelonnant sur une base interrégionale jusqu’au plan international»11 Site internet de la Sûreté du Québec http://www.sq.gouv.qc.ca/ (consulté le 20 février 2009). Il s’agit généralement de projets conjoints impliquant la SQ, la GRC et le SPVM dans la lutte contre des gangs de motards, à l’instar de l’escouade Carcajou. Au moment de la cueillette de données, le site internet de la SQ fait état des différents champs d’activité concernés par la lutte au crime organisé, ces derniers incluent «l’importation, la production, la possession et le trafic de drogues illicites», «le trafic d’armes à feu» et «les produits de la criminalité», sans mention particulière du commerce des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle.

La Sûreté du Québec (SQ) n’a aucune autre prétention que la sensibilisation et la prévention des actes criminels commis à l’égard des femmes. Elle a mis en place le programme Cap sur la sécurité des femmes (CAP signifie Capacité Action Prévention) qui concerne des situations quotidiennes provoquant un sentiment d’insécurité chez les femmes. Il repose «sur une approche d’empowerment, c’est-à-dire de renforcement des capacités des femmes à améliorer leur sécurité par leurs propres moyens»12 Site internet de la Sûreté du Québec http://www.sq.gouv.qc.ca/ (consulté le 20 février 2009).

Au vu de la documentation disponible, la Sûreté du Québec (SQ) semble concentrer ses efforts sur l’exploitation sexuelle des mineurs-es, particulièrement en matière de recrutement et de cybercriminalité. Sous la rubrique «Exploitation sexuelle et gangs de rue», la Sûreté diffuse une capsule intitulée Comment savoir si le “gars génial” que tu viens de rencontrer n’est pas en fait un “séducteur menteur ” qui recrute des filles pour la prostitution?13 <http://www.suretequebec.gouv.qc.ca/adolescents/capsules-info/exploitation-sexuelle-et-gangs-de-rue-sq.jsp>. (consulté le 16 mars 2009). Ciblant les adolescentes, cet outil vise surtout à leur offrir des consignes de sécurité. Il présente quelques trucs pour reconnaître les comportements d’un individu qui voudrait les exploiter sexuellement. Assez brève, la capsule comprend des sous-thèmes qui, sans aborder nommément la traite, s’y rapportent à des degrés divers, tels que «Ce qui devrait te décourager de faire partie d’un gang de rue»; «Les personnes les plus vulnérables»; «Pour éviter de te faire embarquer»; «Les relations amoureuses».

En 2011, un agent mandaté par la Sûreté pour répondre à nos questions a confirmé qu’«il n’y a pas pour le moment de programme conçu pour cela [la prévention de la traite] au niveau de la Sûreté du Québec». L’agent a précisé le modus vivendi de la police provinciale: «On n’a pas de statistiques comme telles concernant la traite. Comme cela touche davantage les frontières, c’est plus la GRC qui s’en occupe. Par contre, on est ouverts à se joindre à des comités qui existent, c’est une possibilité qui existe de notre côté». La Sûreté transfère donc les cas de traite à la GRC, laquelle organise d’ailleurs des activités de sensibilisation auprès de différents corps de police du Québec14 Par exemple, un atelier animé par Mme Annie Robert, coordonnatrice de la sensibilisation sur la traite de personnes à la GRC le 29 avril 2009, dans le cadre du Séminaire Intersection /MSP du ministère de la Sécurité publique du Québec les 28 et 29 avril 2009 à Québec. En ligne, <http://www.msp.gouv.qc.ca/police/police.asp?txtSection=police_communautaire&txtCategorie=seminaire_intersection&txtNomAutreFichier=programme.htm#programme> (consulté le 7 avril 2009).

 

5.4 Les autres service de police municipaux

Le cadre de la présente recherche ne nous a pas permis d’effectuer des démarches «terrain» auprès des soixante-huit autres services de police municipaux –outre Montréal– ni auprès des corps de police autochtones, lesquels fonctionnent sur une base tripartite entre un conseil de bande, le gouvernement du Québec et celui du Canada. Les services de police municipaux relèvent quant à eux des autorités municipales, mais opèrent sur la base de plans organisationnels devant être approuvés par le ministre de la Sécurité publique. Étant donné la présence importante de bars de danseuses sur l’ensemble du territoire québécois, et particulièrement en périphérie des grandes villes et près des frontières avec les États-Unis, nous avons jugé utile de présenter quelques données relatives à l’intervention des services de police municipaux dans la lutte contre la traite.

5.4.1 Niveaux d’intervention et services fournis

Les différentes activités de la police municipale se répartissent en quatre catégories: gendarmerie, enquêtes, mesures d’urgence et services de soutien. Leur niveau de sophistication, situé de 1 à 5, augmente généralement en fonction de la taille de la population desservie : par exemple, une municipalité de moins de 100 000 personnes est desservie par un service de police de niveau 1, tandis que les villes comptant plus d’un million d’habitants et habitantes relèvent du niveau 5. Parmi les services policiers de niveau 1, on retrouve la prostitution de rue, mais aussi les crimes «reliés aux gangs de rue», les infractions «d’ordre sexuel», la pornographie juvénile «lorsqu’il y a flagrant délit». Les infractions telles que le proxénétisme, les maisons de débauche concernent les services de niveau 3 (200 000 à 499 000 habitants et habitantes). La coordination de la lutte contre le crime organisé, la lutte contre des crimes commis par un réseau sur une base interrégionale et autres services d’enquêtes complexes sont du ressort des services policiers de niveau 5. Il existe même un «méta» niveau 6 qui vise les infractions commises par un réseau «ayant des ramifications à l’extérieur du Québec» et coordonne toutes les opérations de grande envergure.

Ces informations démontrent que les trafiquants qui envoient « leurs » femmes dans des petites villes risquent moins d’être inquiétés par les services de police municipaux que ceux qui les déplacent dans des agglomérations plus populeuses. Voilà qui explique, du moins partiellement, la présence des bars «à gaffe» dans des localités comme St-Hubert, Fabreville, St-Jérôme, St-Jean-sur-Richelieu, Vaudreuil-Dorion, St-Antoine, Clarenceville, etc. Des policiers du SPVM affirment que les propriétaires de bars à Montréal –soucieux de ne pas perdre leur permis15 Plusieurs danseuses nous ont également confié qu’elles préféraient danser et offrir des « services sexuels » dans des lieux éloignés de leur milieu d’appartenance, pour éviter de se trouver en présence de gens qu’elles connaissent. À noter que les policiers et les danseuses en question ont été rencontrés en 2009, il semble qu’au moment de la publication du présent rapport, en 2012, la situation ait encore évoluée, au sens où la plupart des bars contiennent désormais des cabines ou des isoloirs destinés à abriter du sexe tarifé.– se risquent peu à tolérer ou encourager la prestation d’«extras» dans leurs établissements.

5.4.2 Compétence juridique des municipalités en matière de prostitution

Bien que ni les provinces ni les municipalités n’aient de compétence pénale directe en matière de prostitution, il leur incombe malgré tout de contrôler l’application des lois en vigueur. De plus, la Loi constitutionnelle (art. 92) confère certains pouvoirs aux provinces leur permettant de s’atteler au problème de la prostitution sans empiéter sur la compétence fédérale. Les municipalités et leur corps de police utilisent pour leur part différents règlements locaux pour contrôler et sanctionner les activités prostitutionnelles en dehors du domaine pénal (le Code de la route par exemple).

La police locale est, en fait, plus encline à appliquer la règlementation municipale à la prostitution qu’à porter des accusations en vertu du Code criminel, car il est plus facile de délivrer une contravention pour une infraction à un règlement que de recueillir des éléments de preuve pour étayer une accusation au criminel (Barnett, 2008).

5.4.2.1 Le projet Nocturne

Implanté en 2004 par le ministère de la Sécurité publique en partenariat avec la Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec (CPBBT), la Régie des alcools, des courses et jeux (RACJ), la Sûreté du Québec (SQ) et plusieurs corps de police municipaux, le projet Nocturne –Pour votre sécurité dans les bars vise à réduire la criminalité dans les établissements titulaires d’un permis d’alcool. Cette initiative mise sur l’approche de police communautaire et comprend deux types d’intervention: la patrouille préventive et des opérations répressives au besoin. Le plus récent rapport disponible, datant de 2006-2007, précise que plus de 1 000 bars ont été «visités» dans 36 territoires à travers la province, ce qui correspond à environ 4 200 «visites de courtoisie» en un an au cours desquelles les policiers sont intervenus 570 fois.

Le programme semble surtout se préoccuper de la présence du crime organisé –notamment en ce qui a trait à l’intimidation des propriétaires– à la consommation ou la vente de stupéfiants ainsi que l’obtention de renseignements criminels. La traite des femmes n’apparaît spécifiquement dans aucun document. On ne sait pas non plus si les bars de danseuses nues sont plus visés que d’autres, eu égard à leurs liens avec le crime organisé. Le descriptif du projet Nocturne précise seulement que «La clientèle des bars constitue un marché important et accessible pour les réseaux criminels qui s’adonnent au trafic de stupéfiants, à la prostitution ou à d’autres formes d’économie souterraine»16 Voir le site internet du ministère de la Sécurité publique <http://www.msp.gouv.qc.ca/prevention/prevention.asp?txtSection=securite_bars> (consulté le 15 avril 2009) [c’est nous qui soulignons]. Certains observateurs constatent toutefois un certain essoufflement du programme qui serait actuellement en cours de révision (Bérubé, 2008).

 

5.5 Éléments à retenir

À la lumière des données recueillies auprès des milieux policiers, nous pouvons conclure que tant leur connaissance de la traite des femmes à des fins d’exploitation sexuelle, que leur degré d’engagement à y mettre un terme varient considérablement. Ces différences s’avèrent d’ordre qualitatif (compréhension, interprétation, perceptions, représentations, etc.) et d’ordre quantitatif, en termes de ressources (effectifs, outils de sensibilisation). De plus, chaque institution intervient en fonction des compétences légales dont elle dispose et de ses priorités stratégiques, incluant celles de l’autorité dont elle relève. Dans la lignée des obligations internationales du Canada en matière de traite, la GRC s’attaque au problème sous l’angle des mouvements migratoires, de la protection des frontières, et aussi, bien qu’encore insuffisamment, de celles des victimes. Pour leur part, les services de police locaux ciblent davantage la sécurité des collectivités et des citoyens et citoyennes qui pourraient pâtir des effets «nuisibles» de la prostitution –particulièrement en ce qui a trait au racolage et aux activités criminelles collatérales– sans cibler la traite comme telle. Aux niveaux provincial et municipal, on mise sur la prévention, surtout auprès des mineurs et mineures, pour enrayer le phénomène de l’exploitation sexuelle, et sur la lutte contre les groupes criminalisés.

On constate également un manque de ressources évident au sein des différents corps policiers. Nul doute que l’absence de plan d’action de la Sûreté du Québec pour repérer des cas de traite dans les nombreux bars de danseuses situés sur son territoire contribue à ce que ces derniers jouissent d’une impunité quasi totale, dans la mesure où il est de notoriété publique qu’ils abritent du sexe tarifé. Un constat similaire s’applique en ce qui concerne les salons de massage à Montréal ou ailleurs. Divers témoignages suggèrent également qu’il y aurait des pratiques de collusion entre des autorités municipales et des propriétaires de bars.

En ce qui concerne la lutte contre la traite, l’heure est à la concertation et à la collaboration entre les différents milieux policiers, ministères et organismes concernés. Théoriquement du moins, sur le terrain, cela reste à vérifier. Il faudrait voir par exemple si le Centre national de coordination contre la traite de personnes (CNCTP) saura générer des bonnes pratiques. Une information obtenue, au moment de la publication de ce rapport, auprès d’une travailleuse communautaire œuvrant sur le terrain de la lutte contre l’exploitation sexuelle, nous permet de penser qu’une amorce de concertation entre Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) et le SPVM se soit récemment mise en place. Elle conduirait des membres du corps policier à faire le tour des salons de massage accompagnés d’un agent ou une agente de CIC. En tel cas, on peut se demander si les initiatives visent à chercher des victimes de la traite ou à repérer des immigrantes illégales, considérant la politique sécuritaire du Canada. Au demeurant, certains de nos répondants et répondantes œuvrant au sein des corps policiers nous ont confirmé qu’ils souhaitaient renforcer des partenariats avec le secteur communautaire et les ONG pour s’attaquer à la traite, un phénomène jugé multivoque devant être appréhendé comme un processus impliquant différents crimes, plutôt que comme un acte criminel en soi.

Il nous semble impératif de poursuivre et d’intensifier le travail de sensibilisation des différents acteurs et actrices en présence dans l’appareil judiciaire. Le manque d’information au sujet de la loi sur la traite explique en partie le faible nombre d’arrestations pour traite et contribue à l’expansion de ce phénomène.

Mais surtout, le flou juridique sur le statut de la prostitution constitue un frein réel à la lutte contre la traite à des fins d’exploitation sexuelle, dans la mesure où il ne permet pas aux corps de police de mener des enquêtes dans les lieux cachés de la prostitution («maisons de débauche», salons de massage, etc.) de façon proactive, tandis que les policiers et les policières rencontrées confirment la dimension stratégique de tels établissements dans la lutte contre la traite. De manière générale, non seulement les lois semblent inadéquates, incluant celle sur la traite, mais leur application s’avère tout aussi problématique et lacunaire. Certains agents et agentes offrent des pistes prometteuses pour une véritable lutte, mais de telles pratiques ou perceptions s’inscrivent dans une dynamique minoritaire, qui n’est pas représentative de la culture policière. En tout état de cause, le distinguo prostitution adulte/juvénile, de même que la banalisation ambiante de la prostitution, entravent les initiatives et la proactivité de la police.

Enfin, il ressort que la traite locale constitue l’essentiel des cas de traite sur lesquels les services policiers enquêtent. Incidemment, les rares condamnations au Canada concernaient aussi un tel trafic. Comparativement aux situations de traite internationale, ce trafic interne s’avère effectivement plus facile à investiguer, dans la mesure où le périmètre est plus circonscrit. Il reste que détecter des victimes de traite tant interne qu’internationale relève de défis qui ne pourront être véritablement rencontrés si la lutte à la traite ne devient pas une réelle priorité à tous les niveaux politiques assortie de ressources humaines suffisantes et de budgets adéquats.

  • 1
    Nous remercions toutes ces personnes pour leur précieuse collaboration et leurs noms resteront confidentiels.
  • 2
    Un COBRA est une activité où des civils accompagnent des membres du corps policier du SPVM dans le cadre de leur travail régulier. COBRA est l’acronyme de Connaissances Opérationnelles de Base Renouvelées Annuellement.
  • 3
    Pour obtenir la liste complète des partenaires et autres informations sur le comité, voir le site internet du ministère de la Justice: http://canada.justice.gc.ca/fra/sv-fs/tp/p4.html> (consulté le 16 avril 2009)
  • 4
    Source: site internet de la GRC: <http://www.rcmp-grc.gc.ca/imm-passp/htncc-cnctp-fra.htm> (consulté le 5 février 2009)
  • 5
    Site internet du Centre http://www.rcmp-grc.gc.ca/ht-tp/index-fra.htm (consulté le 28 juillet 2011)
  • 6
    Publié par The International Centre for Criminal Law Reform and Criminal Justice Policy en 2005, ce manuel de 72 pages s’inspire d’un ouvrage similaire produit pour le Global Programme on Trafficking in Persons des Nations Unies (Office on Drugs and Crime). Des universitaires et différentes instances judiciaires ont collaboré à la version canadienne. Il ne semble pas être disponible en français. Par contre, la section québécoise du site de la GRC propose à son personnel ainsi qu’au grand public de nouveaux outils sous la forme d’un dépliant d’information de 2 pages sur la traite, intitulé Je ne suis pas à vendre, d’un Guide opérationnel sur la traite de personnes pour les agents d’application de la loi de 14 pages et d’une Carte aide-mémoire – Victimes de la traite des personnes indiquant quelques caractéristiques pour reconnaître une victime et un numéro de téléphone 24 heures pour signaler un cas ou autre information. En ligne <http://www.rcmp-grc.gc.ca/qc/ved-feat/2008/2008-11-01-fra.htm> (consulté le 4 février 2009)
  • 7
    Dans le cadre d’activités de terrain avec le SPVM, les policiers nous ont décrit une opération typique de prévention de la prostitution dans l’est de Montréal. À cette occasion, une agente simule une activité de femme prostituée (sollicitation) et quand elle s’est entendue pour une transaction particulière avec un client, ses collègues interviennent pour remettre un «avertissement» au client. Il ne s’agit pas d’une contravention, mais si cet individu est repris dans une autre opération policière, cet avertissement aggrave son cas.
  • 8
    Voir notre définition de la traite à des fins d’exploitation sexuelle, en introduction, où nous précisons que bien que la traite soit indissociable de la prostitution, elle constitue l’un des moyens auquel a recours l’industrie du sexe pour approvisionner le marché de la prostitution.
  • 9
    Pour aborder la question ethnicisée de la traite avec le policier, l’intervieweuse a partagé ses observations à l’effet que les récents cas de traite impliquaient presque toujours des proxénètes issus de groupes racisés ou des communautés culturelles, tout comme les nombreuses affiches de type « Avis de recherche » disposées sur les murs dans les bureaux de l’équipe.
  • 10
    http://www.sq.gouv.qc.ca/mission-et-services/publications/rapport-activites-2009-2010.pdf, page 5 (consulté le 21 juillet 2011)
  • 11
    Site internet de la Sûreté du Québec http://www.sq.gouv.qc.ca/ (consulté le 20 février 2009)
  • 12
    Site internet de la Sûreté du Québec http://www.sq.gouv.qc.ca/ (consulté le 20 février 2009)
  • 13
    <http://www.suretequebec.gouv.qc.ca/adolescents/capsules-info/exploitation-sexuelle-et-gangs-de-rue-sq.jsp>. (consulté le 16 mars 2009)
  • 14
    Par exemple, un atelier animé par Mme Annie Robert, coordonnatrice de la sensibilisation sur la traite de personnes à la GRC le 29 avril 2009, dans le cadre du Séminaire Intersection /MSP du ministère de la Sécurité publique du Québec les 28 et 29 avril 2009 à Québec. En ligne, <http://www.msp.gouv.qc.ca/police/police.asp?txtSection=police_communautaire&txtCategorie=seminaire_intersection&txtNomAutreFichier=programme.htm#programme> (consulté le 7 avril 2009)
  • 15
    Plusieurs danseuses nous ont également confié qu’elles préféraient danser et offrir des « services sexuels » dans des lieux éloignés de leur milieu d’appartenance, pour éviter de se trouver en présence de gens qu’elles connaissent. À noter que les policiers et les danseuses en question ont été rencontrés en 2009, il semble qu’au moment de la publication du présent rapport, en 2012, la situation ait encore évoluée, au sens où la plupart des bars contiennent désormais des cabines ou des isoloirs destinés à abriter du sexe tarifé.
  • 16
    Voir le site internet du ministère de la Sécurité publique <http://www.msp.gouv.qc.ca/prevention/prevention.asp?txtSection=securite_bars> (consulté le 15 avril 2009)
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