Colloque, 7 juin 2010

Stratégies polygraphiques et livre d’artistes: en deçà et au-delà des limites historiques de l’avant-garde surréaliste

Andrea Oberhuber
Fanny Larivière
couverture
Imaginer l’avant-garde aujourd’hui. Enquête sur l’avenir de son histoire, événement organisé par Bertrand Gervais et Sylvano Santini

Depuis les travaux de Caws-Kuenzli-Raaberg, Renée Riese Hubert, Susan Rubin Suleiman, Whitney Chadwick, Georgiana Colvile et Katherine Conley, on sait que bon nombre des femmes dites «surréalistes» ont largement dépassé le triple rôle de muse-modèle-maîtresse dans lequel la pensée hégémonique des chefs de file surréalistes auraient voulu les confiner. Il suffit d’évoquer les œuvres protéiformes de Belen/Nelly Kaplan, Bona de Mandiargues, Leonora Carrington, Claude Cahun, Lise Deharme, Leonor Fini, Frida Kahlo, Valentine Penrose, Gisèle Prassinos, Kay Sage et Unica Zürn pour se rendre à l’évidence que la «part du féminin» de l’avant-garde surréaliste fut considérable. Pour toutes ces auteures-artistes, il s’agissait moins de révolutionner l’art et la vie que de s’écrire et de représenter le monde à leur image, selon leur imaginaire féminin, en développant diverses postures autoréflexives, en élaborant une esthétique transgressive dans la mesure où leurs œuvres s’affranchissent le plus souvent des frontières artistiques et génériques. À travers les diverses facettes de leur projets autographiques, elles portèrent la mémoire du Surréalisme au-delà de ses limites historico-culturelles assurant par et dans leur relative marginalité la longévité du mouvement. Elles préparent ainsi le terrain qu’investiront de nouvelles créatrices – Annette Messager, Barbara Kruger, Jenny Holzer, Sophie Calle ou Julie Doucet – sous forme de fictions (de soi) iconotextuelles.

Dans le cadre d’une réflexion sur «l’avant-garde aujourd’hui» et «l’avenir de son histoire», nous nous proposons dans un premier temps de revenir sur l’apport des créatrices surréalistes –appartenant pour la plupart à la seconde voire à la troisième génération du mouvement– au renouvellement de l’esthétique surréaliste, qui passe par l’usage créatif des arts et des médias, i.e. une praxis intermédiale. L’exemple d’Unica Zürn, auteure-artiste d’origine allemande et alter ego de Hans Bellmer, nous permettra de  voir comment, grâce à une revalorisation des matériaux et des instruments servant à produire une œuvre intermédiale, l’espace de croisement entre les arts devient le lieu même de l’autoreprésentation. Dans un second temps, nous examinerons la question de la collaboration interartistique, autre pratique chère aux avant-gardes dites historiques, afin de voir de quelle manière la composition de livres-objets préfigurent ce que l’on a l’habitude d’appeler aujourd’hui les livres d’artiste(s).

Andrea Oberhuber est chercheure régulière à FIGURA, le Centre de recherche sur le texte et l’imaginaire. Elle est professeure titulaire au Département des littératures de langue française de l’Université de Montréal où elle enseigne les littératures française et québécoise, notamment l’écriture des femmes (XIXe-XXIe siècles), les avant-gardes historiques et la photolittérature. Elle a dirigé, entre autres, le collectif Claude Cahun: contexte, postures, filiation. Pour une esthétique de l’entre-deux (2007), ainsi que les dossiers de revue «Réécrire au féminin: pratiques, modalités, enjeux» (Études françaises, 2004).

Fanny Larivière est étudiante à la maîtrise depuis septembre 2009, à l’Université de Montréal. Sous la direction d’Andrea Oberhuber, elle prépare un mémoire sur les stratégies d’autoreprésentation dans «Vacances à maison blanche. Derniers écrits et autres inédits» et l’oeuvre picturale d’Unica Zürn, projet pour lequel elle vient d’obtenir l’appui du CRSH.

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