Journée d'étude, 21 avril 2020

De Cassandre aux faits alternatifs: les voix du mensonge et de la vérité en littérature

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Contrairement aux discours partisans, aux allocutions politiques, aux tweets qui inondent le XXIe siècle, la littérature n’est pas un espace monologique. Que ce soit dans la poésie, dans le roman ou dans la fiction au sens large, plusieurs voix cohabitent dans le discours littéraire. Dès lors, la notion de vérité ou de mensonge devient problématique: Qui dit vrai? Qui dit faux? Quels sont ces menteurs qu’on écoute? Qui sont ces fous qui voient juste mais que personne n’entend? La question trouve des échos à toutes les époques de l’histoire littéraire. Mais aujourd’hui surtout, l’explosion des moyens de communication oblige à repenser le rapport entre vérité et mensonge dans le discours. Entre les fausses nouvelles et les faits alternatifs, chacun se mêle de faire de la fiction. En mettant en parallèle la crise de l’information du XXIe siècle avec la figure du Cassandre, oracle antique condamnée à n’être jamais comprise, cette journée d’étude propose donc d’explorer le thème de la vérité et de la contrevérité dans la littérature.

Cette journée d’étude devait être présentée le 21 avril 2020 et a été annulée en raison de la pandémie.

Crédit de l’image: Marc Burckhardt, Cassandra, Acrylique et huile sur panneau de bois.

Communications de l’événement

Justine Robidas

Avoir le dernier mot: problématiques de la vérité fictionnelle dans la «Troisième Continuation du Conte du Graal»

Justine Robidas présente quelques-unes des «stratégies narratives et énonciatives» utilisées par Manessier, auteur de la Troisième Continuation du Conte de Graal (1225), «dans le but de montrer la préséance de sa version du fait fictionnel sur les autres versions possibles et la production d’une propre vérité fictionnelle qui consacre la fin des aventures de Perceval.»

Florence Brassard

«Égarer le lecteur» comme on envoie les naïfs «se noyer au couchant». Présences de l’alchimie dans «La Réfutation majeure» de Pierre Senges

«La Réfutation majeure est un texte présenté comme la version française, établie en 2004, d’un texte attribué à Antonio de Guevera (1480-1548), qui était le confesseur et le conseiller de l’empereur Charles Quint. Se glissant dans la peau de ce personnage historique, Pierre Senges, qui est le véritable auteur de ce livre, déploie un redoutable arsenal rhétorique afin de démontrer que l’Amérique est une invention. Selon Guevara, le narrateur, c’est une lecture littérale, donc erronée, des métaphores d’un traité d’alchimie qui se trouverait à l’origine de cette vaste supercherie. Lui-même pétri d’une connaissance approfondie de cette discipline, Guevara se sert pour dénoncer ce grand mensonge du même vocabulaire et des mêmes procédés qui ont, selon lui, servi à l’alimenter. Outre de nombreux appels explicites à la science d’Hermès, plusieurs symboles associés à l’alchimie sont ainsi mobilisés par le narrateur et mis au service de son entreprise de persuasion. Comme l’a expliqué Aristote, la persuasion ne repose pas sur la vérité, mais bien sur le vraisemblable et l’opinion. En un mot: sur la doxa. Mais comment comprendre la conception de cette doxa et de ses effets sur le texte dans le cas d’un livre doté d’un double contexte d’écriture presque 500 ans séparant le contexte historique de l’écriture prétendue et celui de l’écriture réelle?» C’est ce que Florence Brassard explore dans sa communication.

Marion Gingras-Gagné

«Si je parle, je m’invente.» Parole féminine, mensonge et performativité dans le roman «Roux clair naturel» de Fanie Demeule

Marion Gingras-Gagné propose une communication qui se divise en deux parties. D’abord, elle introduit «diverses figures de menteuses» et, à partir de celles-ci, propose «des avenues théoriques afin de dresser un portrait général des questions» qui traversent sa thèse. Puis, la participante nous présente une étude de cas, celle de la menteuse dans le roman Roux clair naturel de Fanie Demeule. Elle tente ainsi «de mettre en évidence certaines idées reliées aux concepts de prise de pouvoir et d’agentivité.»

Ophélie Langlois

«Brûler et partir en fumée»: la symbolique du feu dans «Visage de feu» de Marius von Mayenburg

«Depuis les années 1980, la production dramaturgique allemande se démarque par une vision apocalyptique de la société. Cette vision pessimiste de l’avenir persiste dans les productions théâtrales des années 1990 en Allemagne.» Ophélie Langlois propose une étude de la pièce Visage de feu, créée en 1997 par le dramaturge allemand Marius von Mayenburg, qui illustre bien cette continuation. «Dans cette œuvre théâtrale, le lecteur s’immisce dans la famille de Kurt, un jeune garçon qui vit sa puberté et son existence en société de manière problématique.» La participante observe, entre autres, comment «les contestations identitaires de Kurt sont accentuées par son univers social anxiogène», tant «sa maison familiale» que «la société environnante qui l’aliènent.»

Veuillez noter qu’un document contenant les extraits étudiés est en annexe, sous la vidéo de la communication.

Simon Dansereau-Laberge

Utopie et uchronie, la contrefactualité dans le roman «Écotopia» d’Ernest Callenbach

Peut-on qualifier le roman Écotopia d’Ernest Callenbach de première uchronie écologiste? Simon Danserau-Laberge propose «une nouvelle interprétation» permettant «une compréhension différente de l’impact de ce récit sur l’écologie et l’action politique.»

Jean-Philippe Lamarche

Trump Makes Literature Great Again!: entre l’œuvre prémonitoire d’Ingersoll Lockwood et les voyages temporels de Donald J. Trump

«En 2016, Pierre Bayard a publié un essai sous le titre pour le moins intriguant, Le Titanic fera naufrage. Dans ce dernier, Bayard suggère que certains œuvres fictionnelles semblent anticiper des évènements historiques avant même que ceux-ci ne se déroulent.» Jean-Philippe Lamarche s’aventure dans cette voie: il propose ici une lecture de trois romans d’Ingersoll Lockwood qui indique que l’auteur aurait prédit, entre autres, la présidence de Donald J.Trump.

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