Hors collection, 01/01/2013

Des traces éphémères aux lettres du désert

Rachel Bouvet
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L’une des singularités des déserts tient dans le fait que l’humain n’y a pas laissé de traces, si l’on excepte bien entendu les zones pétrolifères. C’est d’ailleurs pour cette raison que cet environnement est souvent perçu comme la figure du vide par excellence. Voici par exemple comment l’un des grands arpenteurs et écrivains du désert, Théodore Monod, décrit le Sahara: «Rien, le désert nu, voile d’espace, de roche, de sable et de lumière dont le vent de l’esprit se revêt pour jouer au désert et au marcheur». Rien: le désert, c’est d’abord, dans l’imaginaire, l’espace du rien, un espace d’une altérité radicale inouïe, celle qui sépare l’humain du nonhumain, et qui, par son atemporalité, stimule des réflexions à la fois sur le temps d’avant l’apparition de l’humain et sur l’altérité ultime: la mort. Si le Sahara, le plus grand des déserts, a d’abord été entrevu comme un «monde sans traces», c’est parce que la figure du vide a longtemps été en Occident l’angle principal par lequel on a envisagé le désert. Considéré comme un néant sur terre, cet espace sans vie nous projette mentalement et physiquement aux limites extrêmes de la condition humaine. À l’approche de la vacuité, du gouffre, de la faille, un certain vertige intellectuel nous saisit et nous fait éprouver la limite, le «bord de l’être». C’est bien à cette limite que se trouve acculé le pilote échoué en plein milieu du Sahara dans Terre des hommes de Saint-Exupéry.

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Cet article est la version préliminaire de l’article publié dans Les Cahiers du CEIMA (Centre d’études interdisciplinaires du monde anglophone, Université de Bretagne Occidentale), no 9, «La trace de l’humain», numéro dirigé par Élaine Després et Hélène Machinal, décembre 2013, p. 155-170.

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