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9.11.01 Scapes

Émilie Houssa
couverture
Article paru dans Œuvres web, sous la responsabilité de Équipe LMP (2007)

Œuvre référencée: Green, Jo-Anne; Thorington, Helen. 2001. 9.11.01 Scapes. Œuvre web (désormais hors-ligne)

Fiche du Répertoire ALH: https://nt2.uqam.ca/fr/repertoire/91101-scapes [Consultée le 9 août 2023]

  

Présentation de l’œuvre

Résumé de l’œuvre

9.11.01 Scapes est une œuvre qui travaille sur trois registres de montages : le montage visuel de photographies de la NASA et de Ground Zéro, le montage texte/images entre les collages photographiques de Jo-Anne Green et les notes d’Helen Thorington et, enfin, le montage sonore réalisé également par Helen Thorington. L’ensemble constitue un montage complet et complexe de visions, d’impressions et de réflexions autour de la journée du 11 septembre 2001. Les auteures parlent ici de séries : séries de visions, de sons et d’impressions combinés en trois pans sérigraphiques, l’un visuel, l’un écrit et le troisième sonore.La force de ce montage général, c’est que chacune des trois strates proposées repose elle aussi sur une multitude de couches qui nécessitent un montage. Les images de la NASA sont découpées, fragmentées, recollées, peintes ou encore fondues dans une autre image numérique, de Ground Zéro par exemple. Les notes recouvrent des actions, des citations et des données géographiques qui nourrissent l’expression des impressions d’Helen Thorington sur sa journée du 11 septembre 2001. Enfin la bande sonore composée par Helen Thorington repose elle aussi sur le mélange de sons quotidiens et de bruits des attentats. Plus exactement la bande sonore joue surtout sur le fondu des différentes trames qui font jusqu’à se confondre le bruit d’une laveuse avec celui d’un réacteur d’avion.L’ensemble de ces traces accumulées et montées donne avant tout à sentir la complexité de recevoir cet événement. D’une façon générale l’œuvre dans son ensemble réfléchit à la façon dont l’extraordinaire s’est imposé au quotidien. Mais d’une manière plus précise, 9.11.01. Scapes donne à penser l’intégration personnelle, individuelle d’un événement collectif traumatique. Scapes est ici à entendre du point de vue de la constitution de la mémoire tant collective qu’individuelle. Ce sont les «tiges» mais aussi les strates d’une mémoire en chantier: en construction autour des événements du 11 septembre, mais aussi en reconstruction quant à l’imaginaire collectif (c’est-à-dire quant au partage d’une vision géographique de NYC par exemple ou d’un ressenti de la ville).

   

Précision sur la forme adoptée ou sur le genre

Œuvre web proposant un montage images/textes/sons hypermédiatiques.

   

Précision sur les modalités énonciatives de l’œuvre

L’œuvre joue sur l’échange qui naît du montage entre les images et les textes. Chacun de ces deux pans travaille également l’idée de montage/collage (reprise de photos de la NASA pour les images, montage de différentes idées et moments de pensées pour les textes ou collage et fusion de différents espaces et échelles sonores de cette journée pour la bande sonore). L’ensemble propose ainsi une vision déconstruite des événements et engage une réflexion dynamique sur la représentation visuelle, sonore et écrite des attentats du 11 septembre.

  

Modalités de présence du 11 septembre

La présence du 11 septembre est-elle générique ou particularisée?

L’oeuvre joue sur les deux niveaux de présence du 11 septembre. Dans son enemble, 9.11.01 Scapes propose une présentation générique des événements, les allusions aux attentats ne sont pas toutes directes. Dans les images on devine parfois l’île de Manhattan, dans les textes il y a surtout des références aux informations concernant les événements et dans la bande sonore les bruits quotidiens se confondent avec ceux des explosions. Cependant sur certaines images, les tours du World Trade Center sont présentes (soit debout, soit en ruine). On peut donc dire, pour ces images, que des éléments référents aux attenats sont clairement identifiables et que l’évocation des événements du 11 septembre est alors particularisée.

  

Les événements sont-ils présentés de façon explicite?

Le point de vue sur les événements du 11 septembre 2001 est très complexe dans cette œuvre. C’est un montage a posteriori de sensations, pensées, sons ou visions pris au moment même des événements. Cette complexité révèle l’impossible perception totalisante sur ces événements. Les attentats du 11 septembre sont ici perçus dans le flux quotidien et extraordinaire de cette journée. Les moyens de communication et de transports entrent ainsi dans ce flux. Ils sont représentés comme faisant partie de la multitude d’éléments constitutifs de cet ensemble permettant de proposer une représentation des attentats du 11 septembre.

  

Quels sont les liens entre les événements et les principaux protagonistes du récit (narrateur, personnage principal, etc.)?

Le point de vue porté sur les événements dans cette œuvre est donc à la fois externe et interne. Interne, parce que les auteures deviennent ici les premières protagonistes de cette représentation: ce sont leurs visions, leurs impressions qui sont ici transmises. Mais le regard proposé par cette œuvre est également externe au sens où elle permet de réfléchir, a posteriori, à la constitution de l’imaginaire de la mémoire collective autour de ces événements, notamment en mettant en avant le principe de multitude et donc de collage.

  

Aspects médiatiques de l’œuvre

Des sons sont-ils présents?

La bande sonore composée par Helen Thorington repose elle aussi sur le principe de montage. Un montage sonore, cette fois-ci, basé sur la fusion et la confusion de l’univers individuel à celui de l’univers collectif, tous deux touchés par les événements.

  

Y a-t-il un travail iconique fait sur le texte? Des figures de texte?

Il y a, comme troisième pan de ce triptyque de représentation du 11 septembre, un ensemble de notes qui laissent voir un certain travail iconique fait sur le texte dans cette œuvre. Les auteures du site parlent de pages que l’on tourne, chaque image étant liée à un texte qui l’annote et force l’aspect poétique du processus. Les notes sont présentées en continu mais permettent un lien qui, après chacune, mène à une image. Cette présentation lie le texte à l’image de façon explicite.

  

Autres aspects à intégrer

Il y a 16 images, 16 notes et 16 minutes 54 secondes de sons. Le nombre 16 n’est pas ici à analyser comme symbole en lui-même mais le fait que chacune des trames proposées dans l’œuvre tourne autour de ce nombre rend tangible le rapport complémentaire que chacune entretient avec les autres. De ce point de vue, l’œuvre peut se présenter comme un tressage de données et de médiums qui forment une proposition de représentation de perceptions des événements du 11 septembre.

  

Le paratexte

Citer le résumé ou l’argumentaire présent sur la 4e de couverture ou sur le rabat

«The Work: I began Scapes the day the World Trade Center was attacked and continued to add new pages in the aftermath. My palette consisted of NASA images of earth, and photographs of diatoms and Ground Zero. Each Scape consists of multiple layers: Helen used the layers’ titles, and the texts that accompanied the NASA images to weave her multilayered narrative for the Notes; and much as I used found ‘pigments’, Helen used found sounds to create the rich soundscore for the series.»

— Jo-Anne Green1https://web.archive.org/web/20071025000619/http://new-radio.org/jo/scapes/aboutscapes.html [Page consultée le 3 août 2023]

  

Intentions de l’auteur (sur le 11 septembre), si elles ont été émises

«I have always worked in series’—often in book form—to reflect the continuum of human experience. In attempting to convey complexity and recognize the opacity of truth, I choose metaphor. 9.11 Scapes mimics the book format: each click of the mouse turns a page. It also points to the limits of a painter working on the Web: she can manipulate space, but not time. Finally, the “cells” [diatoms] were used because: they are both ominous and beautiful; they represent life and death; and their micro structures are echoed on a macro scale in the World Trade Center towers.»

— Jo-Anne Green2https://web.archive.org/web/20071025000619/http://new-radio.org/jo/scapes/aboutscapes.html [Page consultée le 3 août 2023]

  

Citer la dédicace, s’il y a lieu

Aucune.

  

Donner un aperçu de la réception critique présente sur le web

N/A

  

Impact de l’œuvre

L’œuvre a été créée en 2001 puis 2002. Comme nous pouvons toujours y avoir accès, le site semble suffisamment visité pour que l’œuvre persiste.

  

Pistes d’analyse

Évaluer la pertinence de l’œuvre en regard du processus de fictionnalisation et de mythification du 11 septembre

9.11.01 Scapes est une œuvre qui travaille le processus de fictionnalisation collective autour des événements du 11 septembre 2001. Plus précisément, 9.11.01 Scapes joue sur le va-et-vient constant entre le ressenti ou l’impression individuelle et l’imaginaire, si ce n’est l’imagerie, collectif autour du même événement, comment l’un se fond dans l’autre et vice versa. Le quotidien construit l’inhabituel, l’individuel le collectif. 9.11.01 reprend les principes de l’universel singulier quant à la perception d’un événement mais aussi quant à la constitution d’une imagerie collective : des photographies de la NASA aux bruitages du quotidien qui se transforment en explosion. L’œuvre repose sur le va et vient constant entre la plus large et la plus petite échelle qui soit.Par ailleurs, le travail par séries revendiqué par les auteures pose le principe du fragment comme pensée radicale de la constitution de toute représentation (et ce, quel qu’en soit le médium) autour de ces événements. Les séries d’images ou de textes démultiplient le point de vue, et ce faisant elles rendent impossible toute vision totalisante d’un fait, en l’occurrence ici des événements du 11 septembre 2001. Le fragment individuel (une pensée qui nous habite à ce moment-là) ou collectif (un morceau de photographie de la NASA) devient deux morceaux d’une même représentation sur les événements. Cette fusion des échelles des points de vue permet de remettre en cause une vision unique et totalisante d’un fait. Elle renvoie également à une pensée contemporaine de la constitution d’une mémoire collective sous forme fragmentaire, insufflée notamment par les théories de Walter Benjamin.

  

Donner une citation marquante, s’il y a lieu

«Simultaneous world time supplants time of a successive character.In a moment of temporal compression, my lover in Boston becomes my eyes.I’m listening to the news, she emails. One of the World Trade Center Towers is on fire– apparently a plane crashed into it.I turn on the TV. Center screen a grainy Dan Rather speaks solemn, silent words from a black and white window. All other channels are down.Boston, Virginia, Maryland, London, Paris, Egypt, Russia, see what I cannot from my New York City home.»

— Scape#4 de Helen Thorington3https://web.archive.org/web/20070820172501/http://new-radio.org/jo/scapes/text.html [Page consultée le 3 août 2023]

  

Noter tout autre information pertinente à l’œuvre

N/A

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