Imaginons le temps du voyage comme un temps filmique: un travelling sans caméra où l’écran est la fenêtre, un film sans images enregistrées, produit par un appareil mobile dans lequel nous prenons place (l’avion, ou bien le train, ou bien encore la voiture).
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Pour les écrivains-voyageurs de la première moitié du XIXe siècle tels que Théophile Gautier et Gustave Flaubert, seul le spectacle de la danse permet la rencontre avec ce corps fantasmé qu’est le corps féminin oriental, autrement dissimulé par les tabous moraux et religieux. Toutefois, mis en valeur à la fois par des ornements particuliers, mais aussi et surtout par la pratique de la danse elle-même, le corps de la danseuse est une apparition morcelée qui donne naissance à une poétique elle aussi soumise à la fragmentation. Dans cette aventure du corps fragmenté, l’ambition d’une connaissance anthropologique authentique doit sans cesse lutter contre la tentation d’une mythification et d’une littérarisation du corps de cette almée dont rêve une civilisation entière.
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À partir de l’expérience que j’ai vécue à titre de participante d’un stage de Body Weather (Météorologie du corps) avec Frank van de Ven à Cornwall, en Angleterre, ma communication abordera la création chorégraphique telle qu’expérimentée dans un contexte de voyage, à travers des journées de marche collectives et des explorations en mouvement réalisées près de falaises rocheuses surplombant la mer celtique.
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«Les expériences de projection-déplacement constituent ainsi une voie d’appropriation du monde technologique esthétisé par le “capitalisme artiste”. Ces expériences produisent une effraction dans la séparation entre le monde et les écrans et permettent d’apprécier pleinement les rencontres entre image et réel qu’on peut apercevoir au hasard. Selon le lieu où l’image se révèle, ses significations changent, des rencontres peuvent avoir eu lieu, fortuites ou préparées.»
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