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Figures de l’altérité: du regard occidental sur la Polynésie aux réflexions de Ségalen et Glissant

Virginie Turcotte
couverture
Article paru dans Désert, nomadisme, altérité, sous la responsabilité de Rachel Bouvet, Virginie Turcotte et Jean-François Gaudreau (2000)

Que l’autre soit objet de fascination n’est pas un fait nouveau; les récits de voyages, chroniques d’explorateurs ou de colonisateurs ne font que l’affirmer. Aujourd’hui, nous vivons dans un monde qui semble privilégier la mise en contact de sphères culturelles différentes, voire opposées, et il est intéressant de constater que l’autre suscite toujours l’intérêt, autant chez les anthropologues et les ethnologues que chez les psychologues, philosophes ou littéraires. Dans cette optique, il est aussi intéressant de s’attarder sur la place qu’occupe l’autre dans notre perception ainsi que sur la façon dont on l’appréhende. À l’aide des figures de l’altérité élaborées par Gérard Deledalle, nous verrons comment l’altérité peut se déployer différemment selon l’individu qui la ressent. Avec l’approche anthropologique et philosophique de Lieux-dits d’un malentendu culturel, de Bernard Rigo, nous aurons l’exemple de la réflexion occidentale sur l’altérité polynésienne qui, bien qu’elle ait eu le temps de progresser, conserve encore les lieux communs qui l’ont marquée à ses tout débuts, et nous verrons qu’à travers ces lieux communs, l’observateur de l’altérité finit toujours par se poser la question de la personne: l’autre, objet de réflexion, retourne l’interrogation sur le sujet même qui l’observe. Ainsi, de l’un à l’autre, il y a le va-et-vient d’une quête de l’ identité qui cherche sa définition. Parallèlement, nous verrons comment Victor Segalen réagit face à cette négligence des voyageurs qui ne voient qu’eux-mêmes à travers l’autre, en considérant la nouvelle acception qu’il fait de la notion d’exotisme, ainsi que son roman Les Immémoriaux dans lequel il cherche à exprimer non plus la réaction du milieu sur le voyageur, mais bien la réaction du voyageur sur le milieu maori. Ce que propose Segalen permet de contrebalancer l’analyse de Bernard Rigo. Avec lui, nous voyons l’envers de ce que nous dépeint Rigo, c’est-à-dire que ce sont les Maoris qui regardent l’homme blanc, et non plus l’inverse. Il en ressort cependant que l’autre quel qu’il soit demeure incompris. Plus récemment, Édouard Glissant publiait Introduction à une Poétique du Divers dont plusieurs idées sont semblables à celles énoncées par Segalen dans son Essai sur l’Exotisme. Nous verrons comment il est possible de rapprocher les essais de ces auteurs par ce qui y est prôné, le divers, ainsi que leurs oeuvres de fiction, Les Immémoriaux et Malemort, qui confrontent le lecteur à une altérité culturelle en le déportant vers un ailleurs qu’il ne connaît pas.

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