Conférence, 23 février 2011

Qu’est-ce qu’on garde? Rencontre avec Catherine Mavrikakis

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Cette rencontre avec Catherine Mavrikakis a été enregistrée à la librairie Le Port de tête à Montréal, le 23 février 2011, dans le cadre du colloque «Qu’est-ce qu’on garde?» organisé par Guillaume Bellon (UQAM/Université Stendhal), Kohei Kuwada (Université des Langues étrangères de Tokyo), Julien Lefort-Favreau (UQAM) et Pauline Vachaud (Université Stendhal).

Catherine Mavrikakis est une écrivaine et essayiste québécoise. Elle est aussi professeure au département des littératures de langue française de l’Université de Montréal depuis juin 2003, après avoir été professeure à l’Université Concordia de 1993 à 2003. Elle est l’auteur de plusieurs romans dont Ça va aller (Leméac, 2002), Fleurs de crachat (Leméac, 2005), Omaha Beach (Héliotrope, 2008) et Le Ciel de Bay City (Héliotrope, 2008).

«Qu’est-ce qu’on garde?»: la question, portée par Marie Depussé au titre de l’essai qu’elle publie en 2000, conduit une forme particulière d’appropriation des écrits passés, lorsque le mouvement de sauvegarde se double d’une vigilance à ce qui, en eux, ne pourrait être maintenu tel. Cette même question figure l’objet du colloque international organisé dans le cadre de l’OIC (Observatoire de l’Imaginaire Contemporain) et des axes «Imaginaire de la théorie» et «Archéologie du contemporain» du centre de recherche Figura de l’Université du Québec à Montréal, en partenariat avec l’Université Stendhal à Grenoble et l’Université des Langues Étrangères de Tokyo.

Le livre que l’on garde, ce peut être certes le livre préféré, celui d’une passion plus ou moins éphémère, qui appelle tout aussi bien la haine, mais ce peut être encore, et plus profondément, le livre porteur de la bibliothèque, un pilier intransigeant, depuis lequel ont rayonné nombreuses autres lectures, et vers lequel on revient, continûment. C’est ce legs, souvent précieux parce que problématique, sur lequel nous voudrions porter l’attention, en nous arrêtant à ces textes, travaillés d’une interrogation encore nôtre aujourd’hui, et qui par là nous travaillent. De telles lectures ne sont-elles pas, à bien y réfléchir, les plus fructueuses, en ce qu’elles confrontent à une résistance qu’on chercherait alors, dans la reprise du geste de pensée, à dépasser?

S’il s’agit bien de «déballer sa bibliothèque», en un souvenir du geste benjaminien, ce n’est ainsi en aucun cas dans une intention polémique: on ne cherchera pas plus à revenir sur le «démon» ayant saisi une certaine ivresse théorique qu’à pointer les impostures scellant quelques renommées intellectuelles déclarées douteuses. On voudrait au contraire ici privilégier un héritage qui, cheminant par d’autres voies que la paralysie ou le psittacisme du disciple, saurait faire la part entre ce qui d’une réflexion mérite d’être actualisé, et ce qui ne peut plus l’être. S’il paraît nécessaire de revenir sur certaines figures au rayonnement pérenne (quelle que soit leur époque), l’étude cherchera également à s’ouvrir à d’autres références sujettes à un relatif purgatoire, pour approfondir la résistance qu’elles suscitent ou expliquer la difficulté qu’elles soulèvent. Parmi les questions qui peuvent être abordées:

-Indépendamment des époques ou des courants, quels sont les textes d’hier qui peuvent encore nourrir la pensée d’aujourd’hui? -La saisie de ces textes est-elle toujours d’ordre intellectuel, ou doit-elle reconnaître une dimension affective difficile à mettre en discours? -Ne faut-il pas alors réévaluer le canon, pour l’ouvrir à d’autres textes «mineurs», en marge de celui-ci?

Partant, le colloque assumera l’hétérogénéité des objets: le livre que l’on garde ne relèvera pas seulement de la littérature au sens strict, car l’écriture théorique ou le livre d’artiste, par exemple, peuvent autant valoir comme point d’appui. Cependant, la parole ne sera pas moins tenue sur le fil de la transmission, où sera réfléchi, dès lors, l’arrière-plan sur lequel repose la recherche en littérature, aujourd’hui.

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