Journée d'étude, 26 avril 2016

Commémorer par le feu. La restitution d’incendies historiques de Québec dans «Les fossoyeurs» d’André Lamontagne

Marion Kühn
couverture
Artisans du désastre: figures et formes de la destruction dans le roman français et québécois contemporains, événement organisé par Jean-François Chassay et Marie-Hélène Voyer

«Je me suis rendu compte que les personnages pyromanes ne sont pas si rares dans la fiction historique québécoise contemporaine.

On peut penser à Hermina Salmontès, une directrice de cirque très charismatique dans Combustio de Gilles Jobidon, qui met le feu au chapiteau après une dernière représentation grandiose de son cirque. Elle choisit donc de se suicider et de mourir avec ce dernier. L’acte de destruction sonne ici la fin d’une ère de cirque après avoir montré le potentiel d’un nouvel art de cirque qui se développera quelques années après la mort de Hermina.

On peut penser ici à Amy Duchesnay, un personnage plus connu peut-être, la narratrice plus ou moins fiable du Ciel de Bay City de Catherine Mavrikakis qui est la seule survivante du feu qu’elle affirme avoir mis à la maison familiale le soir de la fête de ses 18 ans. Selon Anne-Martine Parent le geste incendiaire de cette survivante de l’holocauste, qui est hantée par la post-mémoire voir la culpabilité de celle et ceux qui viennent après, répète la mort de ses grands-parents et confirme son statut de survivante de la Shoah dont elle porte littéralement la mémoire dans son corps.

La répétition est aussi au cœur du projet du personnage pyromane dans le premier roman d’André Lamontagne,  Les Fossoyeurs. Dans la mémoire de Québec. Ici la destruction se fait de façon purement symbolique et dans le cadre d’un projet de commémoration, comme le titre de ma communication l’indique.

Au lieu de confirmer le statut envahissant et omniprésent du passé par la répétition de la destruction, les actes incendiaires du personnage pyromane de Lamontagne ressemblent plutôt à la tentative de revivre un passé destructeur oublié, et ce, afin de fuir le présent.

Ce projet commémoratif par le feu est l’une de deux tentatives de restituer le passé de la ville de Québec mis en parallèle dans le roman de Lamontagne. En effet, le double récit des Fossoyeurs suit – en chapitres alternants – les histoires de deux personnages qui sont également fascinés par plusieurs aspects oubliés ou enfouis de la ville de Québec.»

Marion Kühn est stagiaire post-doctorale au CRILCQ du département des littératures de l’Université Laval. Financée par le CRSH, son projet de recherche porte sur les enjeux de la narration problématique dans le roman historique du XXIe siècle au Québec, en France et en Allemagne.

Type de contenu:
Ce site fait partie de l'outil Encodage.