Colloque, 11 avril 2018

La saisie et l’échappée: enjeux de la représentation animale dans l’œuvre poétique d’Henri Michaux

Marie Vigy
couverture
L’animal et l’humain. Représenter et interroger les rapports interespèces, événement organisé par Jérôme-Olivier Allard, Fanie Demeule, Marion Gingras-Gagné et Marie-Christine Lambert-Perreault

La poésie de Michaux se distingue par la place qu’elle accorde aux bêtes de toutes espèces et de toutes origines. Fasciné depuis l’enfance par les insectes, le poète commence à écrire dans une Europe en crise et perçoit dans chaque être non-humain la possibilité de se dégager du moi et d’échapper à la paralysie de la civilisation. Des premiers récits de voyage aux publications plus expérimentales des années 1970, une faune protéiforme traverse ainsi ses textes, allant de la bête rencontrée à l’être imaginaire hybride, qui se déploie de manière inédite dans les «signes» des recueils où dialoguent dessins à l’encre et prose poétique.

Cette évolution de la figuration animale suit le cheminement d’un auteur qui ne cesse d’écrire pour sonder son identité vacillante et qui anticipe la pensée deleuzienne du rhizome. Sa fascination pour les différentes formes de vie, suscitée par un intérêt presque thérapeutique pour le mouvement et pour la puissance figurale des bêtes, conduit progressivement à leur revalorisation littéraire: le temps d’une apparition, elles quittent l’arrière-plan du décor et de la métaphore pour occuper tout l’espace de la page et accéder à la faculté de signifier. En suivant les théories d’A. Portmann sur l’expressivité animale et les propositions de la phénoménologie reprises par M. Macé dans la notion de «style d’être», on verra comment la création poétique devient le lieu d’une redéfinition de l’individualité humaine et non-humaine, chaque écrit pouvant alors être considéré comme la manifestation d’un devenir ponctuel, la reconnaissance des saillies créatrices du vivant en soi.

On se propose ainsi de traverser l’oeuvre du poète afin de comprendre comment le renouvellement de la représentation animale est employé pour bousculer l’identité humaine et subvertir la norme sémantique et linguistique (dans les aphorismes de Face aux verrous ou les «idiogrammes» de Saisir, par exemple). [Texte de Marie Vigy]

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