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Entre l’arbre et l’écorce: Norme(s) linguistique(s) et pratique littéraire

Danielle Soucy
couverture
Article paru dans L’atelier de l’écrivain 1, sous la responsabilité de Le groupe Interligne (2004)

Au moment de définir mon projet d’écriture, me voilà prise soudain dans les filets d’une intertextualité aussi inévitable qu’encombrante. Inévitable, car il se trouve que, pour rendre les lieux qu’évoque mon recueil de nouvelles, aussi bien que le sujet qui a alimenté ma réflexion théorique, la référence la plus directe est de nature littéraire. Je parle ici du roman Un homme et son péché de Claude-Henri Grignon, une oeuvre dont les personnages ont atteint un statut mythique. Le Nord, les Pays-d’en-Haut, les Laurentides: oui, c’est bien de cette contrée-là, à partir d’elle, que je vais parler. Une nature, d’abord: chaotique. Des élévations, des creux, des bosses, des vallées encaissées, du roc, des rivières, l’horizon jamais loin, toujours rond, et des lacs, en veux-tu, en v’là. Hétéroclite, disparate elle aussi, la population qui y habite ou y séjourne: familles de «vieille souche», skieurs de passage, retraités, le petit cercle des décideurs et des notables. Et tous les autres, les sans-voix du village et des rangs: jeunes décrocheurs, vieillards sans le sou, travailleurs forestiers, serveuses, femmes de chambre. En somme, derrière l’apparente homogénéité des origines et de la langue, une autre de ces «places du marché», bruyantes et disparates, où retentissent les « dialectes sociaux, [ …] jargons professionnels, langages des genres, parler des générations, des âges, des écoles, des autorités, cercles et modes passagères» dont parle Bakhtine.

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