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Sexualités lesbiennes alternatives en art contemporain: sadomasochisme lesbien et gode-ceinture dans les oeuvres de Catherine Opie et Tejal Shal

Sabrina Maiorano
couverture
Article paru dans Féminismes et luttes contre l’homophobie: de l’apprentissage à la subversion des codes, sous la responsabilité de Line Chamberland, Caroline Désy et Lori Saint-Martin (2016)

Le colloque Féminismes et luttes contre l’homophobie: zones de convergence, tenu lors du 82e Congrès de l’Acfas le 16 mai 2014, invitait à réfléchir sur la manière dont les luttes féministes actuelles s’arriment aux luttes contre l’homophobie. Il s’agissait de réfléchir sur la prise en compte des enjeux qui touchent les minorités sexuelles et de leur articulation au sein du féminisme, et de même, de se questionner sur la manière dont les luttes contre l’homophobie intègrent ou non une dimension féministe à l’analyse politique et à sa matérialisation sur le terrain. Pour ma part, j’ai choisi de situer mon propos dans le champ de la représentation. Je me suis intéressée aux lignes de continuité et de rupture entre féminisme, lesbianisme et histoire de l’art. Je souhaite mettre en valeur un corpus spécifique de l’art lesbien afin d’en dégager l’apport historique pour la culture visuelle lesbienne, mais également pour l’histoire de l’art féministe. Mon analyse débute par le constat suivant: au sein du champ des arts visuels, les lesbiennes font l’objet d’une invisibilisation historique, tant du côté de l’histoire de l’art générale que du côté de l’histoire de l’art féministe (Ashburn, 1996; Cottingham, 1996; Hammond, 2000; Thompson, 2010). Bien que l’histoire de l’art lesbien possède sa propre histoire ainsi que des préoccupations spécifiques liées à l’existence lesbienne, plusieurs historiennes de l’art la considèrent comme inextricablement liée à l’histoire de l’art féministe (Ashburn, 1996; Hammond, 2000). Ainsi, l’on peut difficilement faire abstraction du lien étroit qui relie l’histoire de l’art lesbien à l’histoire de l’art féministe: toutes deux révèlent des préoccupations et des pratiques artistiques communes en ce qui a trait à la représentation du corps et de la sexualité féminine, et plus précisément le recours à l’objectivation ou à l’auto-objectivation sexuelle (Lavigne, Laurin et Maiorano, 2013; Lavigne et Maiorano, 2014; Maiorano, 2014). Le recours à la sexualisation de soi ou d’autrui dans l’art des femmes suscite cependant la controverse au sein du féminisme. Les enjeux qu’une telle représentation soulève ont été largement discutés par les historiennes de l’art et philosophes féministes concernant les dangers (Tickner, 1978; Parker et Pollock, 1987) et les bénéfices (Nussbaum, 1995; Cahill, 2011) de l’objectivation sexuelle. Dans le contexte d’une culture dominée par la contrainte à l’hétérosexualité et par l’hégémonie du regard masculin, la culture visuelle lesbienne fait face à des défis spécifiques: d’une part, la création de représentations lesbiennes à caractère sexuel est inextricablement liée à sa récupération potentielle par la culture hétéropatriarcale, réduisant ainsi la sexualité lesbienne à un vecteur de fantasmes masculins, d’autre part, l’absence d’une représentation lesbienne dans sa dimension sexuée concourt à la construction d’un sujet lesbien asexué et privé de subjectivité sexuelle. 

Dans le champ de l’art contemporain, certaines artistes lesbiennes ont délibérément choisi de représenter une sexualité lesbienne alternative, voire extrême. Il s’agit notamment du sadomasochisme et de la pratique du gode-ceinture, communément appelé en anglais strap-on dildo. Bien que cette production artistique soit marginale, la représentation du sadomasochisme et du gode-ceinture constituent des motifs récurrents dans l’art lesbien depuis le milieu des années 1980. Une lecture attentive de cette production artistique donne à voir qu’elle se déploie dans la foulée des sex debates (débats féministes sur la sexualité et la pornographie) (Hammond, 2000), et plus précisément avec la montée d’un féminisme souvent appelé pro-sexe, mais que je qualifierai ici plus spécifiquement de pro-SM. Les années 1980 voient ainsi naître une mouvance féministe lesbienne pro-SM à la fois théorique, militante et culturell (Rubin, 2010; Califia, 2008; Ashburn, 1996; Hammond, 2000). Afin de dégager l’apport et la signification d’une telle production artistique pour l’histoire de l’art féministe, je propose d’analyser deux œuvres, soit Self-Portrait/Pervert1L’œuvre peut être visualisée sur le site Web du Guggenheim Museum à l’adresse suivante:  http://www.guggenheim.org/new-york/collections/collection-online/artwork/12201. (1994) de l’artiste américaine Catherine Opie et Déjeuner sur l’herbe2L’œuvre peut être visualisée sur le site Web «Women With Women in Art. A blog dedicated to women with women in art. Not necessarily, but sometimes, lesbians». (http://lesbiansinart.tumblr.com/post/71306540678/tejal-shah-dejeuner-sur-lherbe-2008). (2008) de l’artiste indienne Tejal Shah. Self-Portrait/Pervert est une photographie montrant l’artiste dans un contexte où elle incarne une performance sadomasochiste. Pour sa part, Déjeuner sur l’herbe propose une citation satirique du Déjeuner sur l’herbe de Manet (1863), montrant deux femmes utilisant un gode-ceinture dans un contexte de bondage3Le bondage constitue une pratique du registre BDSM, acronyme désignant bondage, discipline, domination/soumission (D/S), sadisme/masochisme (S/M). Le bondage renvoie à la restriction physique du/de la partenaire par un ensemble de moyens, comme par exemple, le ligotage.. Les deux œuvres sollicitent une certaine objectivation sexuelle où la vulnérabilité des sujets confère une puissance à la représentation du désir lesbien. Par l’entremise de l’autoportrait et de l’appropriation, le travail de ces artistes propose une critique acerbe; déployée ainsi, l’identité lesbienne vient ébranler les canons de la féminité et de la sexualité (hétéro)normative en histoire de l’art et dans la vie en général. Qu’elle soit affirmée ou satirique, l’expression de la vulnérabilité est travaillée de manière à légitimer les corps et à réclamer une reconnaissance de cette sexualité à la fois extrême et politique sur le plan individuel et collectif. 

 

Self-Portrait/Pervert: histoire de l’art féministe, sexualité lesbienne et désirs «pervers»

Catherine Opie constitue l’une des figures de proue de l’art lesbien contemporain. S’identifiant elle-même comme lesbienne sadomasochiste, elle travaille en majorité sur les communautés LGBT et sadomasochistes de San Francisco. Pendant près d’une décennie, elle s’est affairée à doter les communautés issues de la diversité sexuelle d’une image positive d’elles-mêmes par l’entremise du portrait photographique, en plus de les inscrire dans une lecture révisionniste de l’histoire de l’art comme sujets légitimes de la représentation. Self-Portrait/Pervert constitue l’une des œuvres les plus notoires de l’artiste : celle-ci est exposée à la Whitney Biennial en 1995 et le Guggenheim Museum en fait ensuite l’acquisition. Avec Self-Portrait/Pervert, Catherine Opie propose un autoportrait à la fois provocant et troublant4L’œuvre Self-Portrait/Pervert s’inscrit dans une trilogie d’autoportraits où l’artiste évoque son identité lesbienne  sadomasochiste de manière transversale. Pour une analyse conjointe des œuvres Self-Portrait/Cutting (1993), Self-Portrait/Pervert (1994) et Self-Portrait/Nursing (2004), voir Dumaine (2013).. L’artiste a la tête cagoulée par un masque de cuir. Son torse arbore une scarification fraîchement taillée à l’effigie du mot «Pervert» d’où le sang perle délicatement, et chacun de ses bras est serti de 23 aiguilles de calibre 18 insérées sous la couche superficielle de la peau. Au premier abord, l’œuvre évoque l’expression d’un corps blessé et meurtri. Puisque le visage de l’artiste est inaccessible, on pourrait penser que celle-ci exprime un déni de subjectivité dans la représentation masochiste qu’elle propose d’elle-même. En fait, le siège de sa subjectivité est ici détourné: il s’inscrit dans sa chair et dans son sang. Ainsi, Catherine Opie rejoint des pratiques courantes dans l’art féministe, à savoir l’utilisation du corps et du sang comme matériaux, ainsi que le recours à la douleur. La différence majeure réside dans le propos: alors que les artistes féministes des générations précédentes ont souvent employé ces procédés pour dénoncer les canons de beauté irréalistes et le viol5À titre d’exemples, voir Gina Pane pour l’ensemble de son œuvre, et Suzanne Lacy, Judy Chicago, et al. pour la performance Ablutions (1972)., Catherine Opie s’en prend à la vision essentialiste de la sexualité des femmes, mais plus spécifiquement de la sexualité lesbienne, que l’on imagine difficilement sadomasochiste6Plusieurs mythes sur la sexualité lesbienne s’avèrent persistants dans la culture populaire ainsi qu’auprès de divers intervenants de la santé, notamment le mythe d’une sexualité lesbienne où la génitalité est secondaire et dans laquelle prime l’amour conjugal (Iasenza, 2008).. Proposant un autoportrait dans lequel elle se représente comme lesbienne butch masochiste, l’artiste affirme ainsi que l’expérience de la douleur et des relations de pouvoir peut être une source de plaisir et de satisfaction sexuelle. L’expression de sa «butchité» renvoie à la diversité des expressions de genre issues des cultures lesbiennes, faisant du même coup écho à leur signification historique en plus d’inscrire cette féminité masculine (Halberstam, 1998) dans le champ de l’histoire de l’art, comme d’autres artistes lesbiennes l’ont fait avant elle (Romaine Brooks, Sadie Lee, etc.). 

Opie se situe à la fois en continuité et en rupture avec une tradition féministe de revalorisation des sensorialités dites féminines (Classen, 1998) dans la mesure où elle réclame un plaisir des sens en empruntant un chemin qui serait jugé inacceptable par la majorité des féministes, car il évoque a priori l’aliénation sexuelle et la violence faite aux femmes. Rechercher le plaisir sexuel à travers la peau, qui plus est une peau blessée et meurtrie, constitue l’originalité du propos de l’artiste et son importance pour l’histoire de l’art féministe. Alors qu’Opie met en valeur l’idée que la peau constitue un organe sexuel en soi, elle déjoue par la bande l’idée hétérosexiste que le cœur de la sexualité passe par le coït. La mise en valeur des mains de l’artiste confère une dimension érotique supplémentaire à l’œuvre. À ce titre, la main constitue dans la sexualité lesbienne un véritable organe de plaisir sexuel (Wednesday, 2008). On peut penser ici à la stimulation clitoridienne ou à la pénétration avec les doigts, ainsi qu’à la pratique du fisting, qui consiste en l’insertion complète de la main dans le vagin ou dans l’anus (lorsque pratiqué dans l’anus, le fisting est généralement considéré comme une pratique SM en raison de son caractère extrême).

 

Blessure, vulnérabilité, pouvoir

Dans Self-Portrait/Pervert, je postule précisément que l’artiste, par sa mise à nu réelle et métaphorique, propose de transformer une expérience de marginalisation en fierté en exprimant une vulnérabilité affirmée qui passe par sa propre objectivation sexuelle. La notion de vulnérabilité affirmée fait référence au contexte de présentation du corps de l’artiste dans l’œuvre. En effet, la manière dont ce corps occupe l’espace évoque une assurance et un aplomb certains. L’artiste occupe une posture droite et frontale, ses bras sont disposés de manière ample de chaque côté de son corps et ses mains sont fermement croisées à l’avant. Le danger opère sur son torse, sur lequel est taillée l’insulte «Pervert» en lettres de sang. En s’offrant ainsi aux regards dans ce qu’elle a de plus intime, Catherine Opie prend effectivement le risque de se faire traiter de déviante et de perverse. Il s’agit pourtant d’un risque assumé, où elle joue avec la réappropriation de l’insulte dans trois domaines d’exclusion: exclusion des minorités sexuelles du monde hétérosexuel, exclusion des adeptes du SM de la communauté gaie et lesbienne et finalement, exclusion des lesbiennes féministes SM de la communauté féministe majoritaire. Pour les membres de la communauté cuir LGBT, il s’agira plutôt d’un honneur (Blessing, 2008) susceptible de se transformer en expérience de fierté collective. Au moment de sa création dans les années 1990, Self-Portrait/Pervert visait notamment à ébranler le contexte politique assimilationniste et homonormatif de l’époque (Blessing, 2008). L’œuvre s’inscrit indéniablement dans une démarche visant à conférer à la communauté sadomasochiste LGBT une légitimité politique qui passe par sa représentation et son inscription dans l’histoire de l’art. 

Le lien productif entre vulnérabilité et auto-objectivation sexuelle réside précisément dans l’idée que pour exister, il faut nécessairement être reconnu par autrui, tant sur le plan individuel que collectif. L’un de ces domaines de reconnaissance est la sexualité. Dans son ouvrage intitulé Overcoming Objectification, la philosophe Ann J. Cahill (2011) propose une vision novatrice de l’objectivation sexuelle. Elle soulève d’abord les limites des théories actuelles sur l’objectivation, qui appréhendent les sujets à partir d’un modèle kantien où le corps et l’esprit sont dissociés. Les théories classiques sur l’objectivation sexuelle localisent le siège de la subjectivité dans la reconnaissance de l’autonomie du sujet et de sa rationalité, ce qui participe à marginaliser l’importance du corps et le rôle actif qu’il joue dans la construction de la subjectivité, particulièrement lorsqu’il est question de sexualité. Cahill considère que

the bodily intensity of sexual encounters, and their potential to be self-enhancing, is usually the product not of autonomy but of interactions between subjects. To be sexual is to be a thing, and often to be the object of another’s gaze and attention; the pleasure of being such an object cannot be explained simply by the internalization of a dominance/submission framework, since we can imagine and even experience such objectification without hierarchy. (Cahill, 2011: 26)  

l’intensité corporelle des relations sexuelles et leur potentiel émancipateur est habituellement le produit, non pas de l’autonomie, mais de l’interaction entre les sujets. Être sexuel consiste à être «objet», et souvent à être l’objet du regard et de l’attention d’autrui; le plaisir à être un tel «objet» ne peut s’expliquer simplement par l’intériorisation d’un cadre d’analyse dominant/dominé, puisque nous pouvons imaginer, et même expérimenter, une telle objectivation sans hiérarchie.

Au contraire, Cahill considère plutôt les sujets comme des êtres de relation fondamentalement incarnés. Ainsi, pour la philosophe, la construction de la subjectivité nécessite un contexte relationnel puisque celle-ci est tributaire du regard d’autrui sur l’expression de notre être sexué. Ainsi, pour Cahill, l’objectivation sexuelle fait partie intégrante du processus de subjectivité sexuelle. Ce qui est éthiquement répréhensible pour l’auteure, c’est ce qu’elle nomme la «dérivatisation» (derivatization), soit le fait de considérer l’autre comme un dérivé de soi-même, de le traiter exclusivement comme un prolongement de son propre fantasme. Dans Self-Portrait/Pervert, Catherine Opie joue de multiples manières avec l’objectivation sexuelle. C’est précisément dans l’expression de sa vulnérabilité qu’elle réussit à éviter un glissement vers la dérivatisation. En effet, la disposition et l’agencement de son corps empêchent de la considérer comme un simple vecteur de fantasmes masculins: l’affirmation d’une féminité butch couplée à une parfaite maîtrise de la douleur issue de la scarification et des insertions d’aiguilles contribuent à conférer à l’artiste une aura de danger et de défi; elle interroge les critères de normalité sexuelle dans une inquiétante impassibilité, tout en se réclamant des communautés sexuelles radicales (Rudy, 1999). L’objectivation fait ainsi l’objet de subversions et de détournements qui viennent contrecarrer l’hégémonie du plaisir visuel masculin et qui empêchent de considérer l’artiste comme un simple objet sexuel, ou encore, comme le fruit de sa propre aliénation sexuelle. Cette posture rejoint ainsi les propos de Judith Butler recueillis pour un documentaire dans lequel elle exprime l’importance de représenter la vulnérabilité des femmes, à savoir que celle-ci, loin d’être toujours blessante ou victimisante pour le sujet, peut au contraire être source de l’expression d’une subjectivité désirante (Zadjermann, 2006).  

 

Déjeuner (lesbien) sur l’herbe: Appropriation, satire féministe et strapon sex dans l’œuvre de Tejal Shah

Tejal Shah est une artiste indienne née en 1979. Après un parcours universitaire qui l’a menée de Melbourne à Chicago, elle vit et travaille actuellement à Mumbai, où elle s’intéresse à la photographie, le collage, la performance, la vidéo et l’installation. L’artiste s’identifie comme lesbienne féministe queer et son travail est intimement lié aux dimensions politiques de l’identité. Les principaux thèmes qu’elle aborde sont la diversité de genre et sexuelle (féminités masculines, transidentités, androgynie, ambiguïté de genre, etc.), le colonialisme et le nationalisme, ainsi que la violence de l’État envers les minorités sexuelles. 

L’œuvre de Tejal Shah s’inscrit dans une longue tradition d’art féministe qui mise sur la parodie et la satire comme de véritables outils méthodologiques (Brand, 2006). Cet «humour féministe […] peut être classé selon deux catégories: la première cherche à rendre compte de la subordination des femmes; la seconde, à souligner l’absurdité des systèmes actuels et à revendiquer de nouvelles façons de conceptualiser le féminin» (Walker, 1988: 148 paraphrasée dans Saint-Martin et Gibeau, 2012: 28). La parodie et la satire féministe en tant que stratégies artistiques ont donc des visées politiques à la fois critiques et transformatrices de la condition des femmes en général, et notamment de la condition des femmes dans le champ de l’art. À cet effet, Brand considère qu’une parodie féministe constitue 1) une satire féministe, et 2) une imitation complexe d’une œuvre issue d’un artiste masculin (Brand, 2006: 180):

A feminist satire is a work of art that expresses and values a woman’s point of view as it makes fun of prevailing artistic conventions and societal norms established by men. A simple imitation is an imitation in which an artist copies the same style as an original work of art, without implicitly providing some sort of commentary on the original. A complex imitation is an imitation in which an artist copies the style of an original work of art, resulting in either an implicit or explicit commentary on the original. Needless to say, the distinctions between simple and complex imitations, as well as the identification of a visual work of art as satire or parody, rest on artistic intentions and a reliable knowledge of them. Such knowledge, informed by a pro-female ideology of integrity, strength, freedom, and self-empowerment, is what constitutes a feminist art epistemology. (Brand, 2006: 180)

Une satire féministe est une œuvre d’art qui exprime et valorise le point de vue des femmes tout en ridiculisant les conventions artistiques dominantes ainsi que les normes sociales établies par les hommes. Une imitation simple est une imitation dans laquelle une artiste copie le style d’une œuvre originale, sans implicitement fournir un commentaire critique sur cette œuvre. Une imitation complexe est une imitation dans laquelle une artiste copie le style d’une œuvre originale en y ajoutant un commentaire critique, soit implicite ou explicite. Il va sans dire que les distinctions entre les imitations simples et complexes, autant que l’identification d’une œuvre comme satire ou parodie, repose sur les intentions artistiques ainsi que sur une solide connaissance de ces dernières. Un tel savoir, éclairé par une idéologie pro-femme d’intégrité, de force, de liberté et de reprise de pouvoir, est ce qui constitue une épistémologie féministe de l’art. 

Alors que parodie et satire peuvent être appréhendées comme deux objets distincts, la définition de Brand tend à entrecroiser ces notions. En effet, Brand s’intéresse à la parodie féministe, et non à la parodie au sens large. L’orientation féministe implique dès lors une charge critique, d’où la cohabitation entre parodie et satire dans l’art féministe. Si la parodie en histoire de l’art s’attache au travestissement des conventions picturales, la parodie dans l’art féministe traite bien souvent du travestissement du canon masculin.

Par l’entremise du dispositif parodique du célèbre tableau de Manet, Déjeuner sur l’herbe de Tejal Shah s’inscrit parfaitement dans ce que Brand définit comme une épistémologie féministe de l’art. Suivant la perspective de la critique féministe, l’on constate que l’œuvre de Manet constitue un exemple assez classique de la manière dont le corps des femmes est généralement utilisé en peinture, soit comme un vecteur de fantasmes masculins. La nudité du modèle de Manet est purement arbitraire par rapport au contexte dans la mesure où les conventions sociales font en sorte que les gens ne se dénudent généralement pas lors d’un pique-nique. Dans l’œuvre de Tejal Shah, tous les rôles ont été inversés : les deux hommes qui discutaient sérieusement ont été remplacés par deux femmes absorbées de manière tout aussi sérieuse dans une activité à connotation sexuelle. Ce qui est donné à voir, c’est ce fameux déjeuner en question. On voit une femme qui s’apprête à couper et à manger le dildo «straponné» de sa partenaire. Cette dernière a les poings liés et est allongée au sol dans une vulnérabilité que je qualifierais de satirique. En effet, on assiste à une mise en scène collaborative et ludique où le phallus comme référent du pouvoir est ridiculisé. Les protagonistes interrogent à travers le symbole du gode-ceinture les structures de pouvoir dans le champ de l’art, par exemple, le monopole de la reconnaissance des hommes artistes, les sujets de représentation jugés acceptables ainsi que le privilège masculin d’être représenté comme sujet plutôt que comme objet du désir. Selon une perspective postcoloniale, l’œuvre pose un regard critique sur l’histoire de l’art dans la mesure où le canon est généralement occidental. Plus spécifiquement, l’œuvre impose la légitimité et la reconnaissance d’une sexualité lesbienne jugée très souvent déviante. 

Les analyses féministes du gode se déploient en deux temps. Une première génération de théoriciennes s’est appliquée à élaborer des analyses proposant de «lesbianiser» le champ de la psychanalyse afin de doter les lesbiennes du pouvoir symbolique du phallus. Tel que le précise Beatriz Preciado, «Dans la théorie queer et les relectures perverses de la psychanalyse qu’elle a encouragées, les rares analyses du gode sont à chercher dans des discussions plus générales sur “le phallus féminin”, “l’envie du pénis” ou dans des textes qui traitent de la réarticulation de la notion freudienne de fétichisme avec celle de désir féminin» (Preciado, 2000: 61). Une deuxième génération de théoriciennes propose des analyses ancrées dans un féminisme de la déconstruction qui flirte avec les politiques cyborg. Déjeuner sur l’herbe de Tejal Shah en propose une illustration. Laplanche et Pontalis (2007: 136) offrent un résumé succinct de l’envie du pénis: «[Celle-ci] naît de la découverte de la différence anatomique des sexes: la petite fille se sent lésée par rapport au garçon et désire posséder comme lui un pénis (complexes de castration); puis cette envie du pénis prend dans le cours de l’Œdipe deux formes dérivées: envie d’acquérir un pénis au-dedans de soi (principalement sous la forme du désir d’avoir un enfant); envie de jouir du pénis dans le coït.» Freud postule l’hypothèse selon laquelle le développement psychosexuel des filles passe par la constatation qu’elles sont dépourvues de pénis. Devant cette absence qui est nécessairement vécue comme un manque à combler, les fillettes chercheront à incarner symboliquement le pénis. Pour Freud, la voie de prédilection pour résoudre la quête du phallus passe par l’expérience de la maternité, ce qui implique nécessairement l’investissement du coït hétérosexuel. Celles dérogeant de cette norme sont considérées comme déviantes et lesbiennes. Derrière cette prémisse se cache entre autres l’idée arbitraire d’une convergence entre sexe anatomique, genre, désir et sexualité. La persistance de cette idée dans l’imaginaire collectif est telle que l’on comprend bien pourquoi la pratique du gode-ceinture entre lesbiennes soulève une lesbophobie manifeste tant du côté des hétérosexuels-les que chez certaines lesbiennes. De plus, cette lesbophobie n’est pas étrangère à l’histoire du mouvement féministe puisqu’à une certaine époque, tout un pan du féminisme lesbien s’opposait à une sexualité susceptible de reconduire des symboles et des pratiques relatives à l’hétéropatriarcat, notamment les relations butch/fem, les jouets sexuels et le sadomasochisme (Linden et al., 1982). 

Le Déjeuner sur l’herbe de Tejal Shah se joue ainsi de la psychanalyse et de ses conventions à grands coups de gode. Il affirme de manière ironique la suprématie des femmes et des lesbiennes sur les hommes, car le gode est inébranlable: il remplit sans failles toutes les fonctions du pénis, sauf l’éjaculation. Dans un article traitant de pornographie lesbienne, Heather Butler propose une analyse féconde sur les propriétés lesbiennes du strap-on dildo. Pour elle, l’usage du gode-ceinture dans la sexualité lesbienne opère une subversion des rôles sexuels traditionnels, selon lesquels la personne qui pénètre est considérée comme active et où la personne pénétrée comme passive. En effet, dans la sexualité lesbienne, même si la partenaire qui pénètre est considérée comme active, la stimulation sexuelle qu’elle prodigue est dirigée vers le plaisir de sa partenaire: 

The dildo represents one aspect, or one accessory, rather, of lesbian sex, which neither begins nor ends with dildo penetration, and although the wearer is associated with a more active, or ‘’masculine’’, role than the one being penetrated, this association in only somewhat accurate. For while the dildo-wearer might do the thrusting, it is the recipient of the dildo penetration who counts most. According to Cherry Smyth, ‘’it is the ‘butch/top’s’ aim in lesbian sex to give the ‘femme/bottom’ complete satisfaction, while the penis is often the only satisfied genital in heterosexual porn (1990, 157).‘’ (Butler, 2004: 183)7À noter ici que les rôles top et bottom ne sont pas confinés à une dynamique butch/top: fem/bottom. 

Le godemiché représente un aspect, ou plutôt un accessoire, du sexe lesbien, lequel ne commence ni se termine avec la pénétration par le godemiché, et même si la porteuse est associée à un rôle plus actif ou «masculin» que la pénétrée, cette association n’est juste qu’en partie. Car bien que ce soit la porteuse qui performe les poussées, c’est la pénétrée qui importe le plus. Selon Cherry Smyth, «l’objectif de la “butch/pénétrante“ dans le sexe lesbien est de donner entière satisfaction à la “femme/pénétrée“, alors que dans la porno hétérosexuelle, le pénis est souvent le seul organe génital satisfait» (1990, 157).

Pour Heather Butler, le gode fonctionne ainsi comme un «donneur de plaisir» (pleasure-giver) plutôt qu’un «preneur de plaisir» (pleasure-seeker) comme c’est le cas du pénis. En effet, les bienfaits de la stimulation sexuelle avec un gode-ceinture sont majoritairement tournés vers la partenaire pénétrée dans la mesure où la partenaire qui pénètre ne ressent pas les sensations sexuelles dans son gode, ce qui décuple son attention et la qualité du plaisir qu’elle transmet, contrairement à un pénis qui court le risque de perdre son érection ou d’éjaculer (trop vite ou trop tard). C’est ce qui amène l’auteure à affirmer que l’acte phallique par excellence n’est pas la pénétration, mais bien l’éjaculation:

Lacan’s formulation of the phallus would not be effective or illustrative as a representation of lesbian desire. Lacan’s formula, and the subsequent feminist critique of its formulation, implies that the phallus belongs to the man, yet the lesbian with her object of penetration can perform all of the same things that the penis/phallus can perform during the sex act, except for one very important thing – she, or rather her dildo, does not ejaculate. She does not have to ejaculate, she is not biologically predisposed to ejaculating, the object she uses to penetrate her partner (who may, in fact, ejaculate), though it may be attached to her body in some way, is not beyond her control. It is dependable, adjustable, and controllable. […] Therefore, I propose that the Lacanian phallus has as its telos not penetration, but rather ejaculation. This gives a whole new meaning to the word lack; for one could argue that there is no lack in lesbian sexuality, that the real lack is in Lac(k)anian psychoanalytic theory, which gives us little more than premature ejaculate. (Butler, 2004: 184-185).

Le phallus tel que théorisé par Lacan s’avère peu efficace en tant que représentation du désir lesbien. La formule de Lacan, et la critique féministe subséquente à sa formulation, laisse entendre que le phallus appartient à l’homme; pourtant, la lesbienne avec son accessoire de pénétration peut accomplir les mêmes choses que le pénis/phallus durant l’acte sexuel, à l’exception d’une chose très importante; elle, ou plutôt le godemiché, n’éjacule pas. Elle n’a pas à éjaculer, elle n’est pas prédisposée biologiquement à l’éjaculation, l’accessoire qu’elle utilise pour pénétrer sa partenaire (qui elle, peut, en fait, éjaculer), bien qu’il soit attaché à son corps d’une certaine façon, n’est pas hors de son contrôle. Il est fiable, ajustable, et contrôlable. […] Ainsi, je suggère que le phallus Lacanien a pour telos non pas la pénétration, mais bien l’éjaculation. Cela donne au mot manque une tout autre signification; puisqu’on pourrait argumenter qu’il n’y a pas de manque dans la sexualité lesbienne, que le manque réel est dans la théorie psychanalytique lacanienne, ce qui ne nous donne rien de plus qu’une éjaculation prématurée.  

Alors que la psychanalyse construit la féminité dans une vulnérabilité que l’on pourrait qualifier de néfaste pour le sujet, le Déjeuner sur l’herbe de Tejal Shah, par le recours à une vulnérabilité satirique qui passe à travers le dispositif du gode, déjoue cette construction. En effet, «la théorie psychanalytique de la féminité conçoit le développement de la femme comme largement fondé sur la souffrance et l’humiliation» (Rubin, 2010: 68). Celle-ci propose une vision pour le moins mortifère de la féminité dans la mesure où elle n’est que manque, blessure narcissique et soumission masochiste (Rubin, 2010: 67). Alors que la femme au sol arbore une posture de soumission qui fait écho à une préférence masochiste, la vitalité de son gode-ceinture vient contrecarrer, ou du moins nuancer, cette interprétation. En effet, le gode rouge affirme sa quasi-indestructibilité, voire son autosuffisance. En se moquant du pénis et du phallus, le gode donne à voir une vulnérabilité qui dit le contraire de ce qu’elle semble affirmer et qui participe à conférer à sa propriétaire un pouvoir qui l’extirpe momentanément de la construction d’une féminité normative. Dans une étude qualitative réalisée par Robin Bauer sur les communautés gouines BDSM, l’auteur propose une analyse queer de la pratique du genderfucking8Dans son contexte langagier vernaculaire, l’expression anglaise genderfucking renvoie aux traductions françaises suivantes: «niquer le genre» (contexte français) et «fourrer le genre» (contexte québécois). à travers le recours au gode-ceinture. L’auteur y voit une forme de subversion politique, surtout si elle est pratiquée par des fems (lesbiennes féminines), dépossédées du pouvoir dans la réalité de la vie quotidienne. Pour reprendre les mots de l’auteur, «ce sont les fems qui interrogent le concept de “qui a la bite?” dans la société, à un niveau corporel et à un niveau métaphorique, au niveau du phallus comme privilège masculin et comme symbole de pouvoir.» (Bauer, 2008: 139). Or, dans les théories et les communautés queer, il y a souvent survalorisation des féminités masculines à travers les figures butch et trans au détriment d’une invisibilisation ou du moins une dévalorisation des fems. Un des faits saillants de l’étude, et qui s’applique à l’analyse de l’œuvre Déjeuner sur l’herbe (2008), est justement le potentiel subversif des fems, celui-ci étant négligé dans la mesure où on les présume souvent conformes à la féminité hétérosexuelle. Bauer fait ressortir que les fems jouent un rôle significatif au sein de la communauté gouine BDSM, car elles tendent à développer des féminités qui s’extirpent de la définition dominante de la féminité hétéronormée.

Le gode participe à faire éclater les conventions du genre, de la sexualité et de l’hétérosexualité comme institution. Ainsi, le Déjeuner sur l’herbe de Tejal Shah se moque des fondements ontologiques de la différenciation sexuelle et de l’exclusivité masculine du phallus. L’œuvre parodie le concept d’envie du pénis par l’affirmation selon laquelle le gode n’est ni pénis ni phallus. À la lumière des politiques cyborg, le gode est une prothèse, un complément artificiel, détachable (Preciado, 2000; Hamming, 2001; Butler, 2004). Ainsi, il signe l’autonomie de la sexualité lesbienne plutôt que la réinscription invasive des schèmes hétéropatriarcaux, en plus de proposer une lecture révisionniste de la féminité. L’œuvre propose une parodie de l’hétérosexualité dans la mesure où le gode-harnais revêt des propriétés et remplit des fonctions bien différentes de celles du pénis. À travers l’appropriation, Tejal Shah offre un commentaire sur le caractère chimérique de l’authenticité, qu’il se situe au plan du genre, de la sexualité ou du génie artistique.

 

Conclusion

L’analyse conjointe des œuvres Self-Portrait/Pervert (1994) de Catherine Opie et Déjeuner sur l’herbe (2008) de Tejal Shah montre que celles-ci (ainsi que le travail plus général de ces artistes) constituent une contribution importante aux histoires de l’art féministes et lesbiennes. En raison de leur caractère sexuel extrême (représentation du sadomasochisme lesbien et du gode-ceinture), ces œuvres documentent la diversité sexuelle et de genre des cultures lesbiennes en plus de proposer une critique du canon artistique. Pour ce faire, elles recourent à des pratiques controversées au sein de l’art féministe et du féminisme en général, soit l’objectivation et l’auto-objectivation sexuelle. Dans un autoportrait, Catherine Opie se représente comme butch masochiste dont le corps porte les marques d’une séance de scarification et de needle play (jeu d’aiguilles). Le jeu de sa propre objectivation lui sert ici à exprimer une subjectivité sexuelle et à réclamer une légitimité sexuelle, soit celle d’appartenir à une communauté érotique méprisée. L’artiste exploite les propriétés transformatrices de la vulnérabilité dans une réappropriation subversive de l’insulte «pervert», portant un regard sur la dimension à la fois individuelle et collective de l’identité lesbienne sadomasochiste. Pour sa part, l’œuvre de Tejal Shah propose une satire féministe du Déjeuner sur l’herbe de Manet par l’entremise du gode-ceinture. L’artiste sollicite l’objectivation sexuelle des protagonistes, les plongeant dans une vulnérabilité satirique qui engendre une parodie de la psychanalyse et de ses concepts tout en affirmant un pouvoir construit sur le démantèlement du phallus et l’autonomie de la sexualité lesbienne. Catherine Opie et Tejal Shah montrent que le recours à ces stratégies artistiques recèle un potentiel critique à partir duquel s’exprime un certain désir d’agentivité sexuelle. Le champ de la représentation des sexualités lesbiennes alternatives n’est cependant pas confiné aux arts visuels; il s’étend plus largement à la culture visuelle, notamment à la pornographie. Alors que les relations et les sexualités lesbiennes sont largement exploitées par l’industrie pornographique dominante, on retrouve toute une variété de pornographie par et pour lesbiennes (aussi appelée dyke porn [Butler, 2004]) visant à reprendre du pouvoir sur la représentation du désir lesbien et à s’emparer du privilège du regard dans le but de construire un regard lesbien autonome (lesbian gaze). À cet effet, la question de la réception (c’est-à-dire «qui regarde?») se pose toujours avec insistance lorsque vient le temps de penser la création et la circulation d’images issues des cultures lesbiennes.

 

Références

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ZADJERMANN, Paule (réal.). 2006. Judith Butler, philosophe en tout genre, [documentaire, DVD], France: ARTE, 53 min.

  • 1
    L’œuvre peut être visualisée sur le site Web du Guggenheim Museum à l’adresse suivante:  http://www.guggenheim.org/new-york/collections/collection-online/artwork/12201.
  • 2
    L’œuvre peut être visualisée sur le site Web «Women With Women in Art. A blog dedicated to women with women in art. Not necessarily, but sometimes, lesbians». (http://lesbiansinart.tumblr.com/post/71306540678/tejal-shah-dejeuner-sur-lherbe-2008).
  • 3
    Le bondage constitue une pratique du registre BDSM, acronyme désignant bondage, discipline, domination/soumission (D/S), sadisme/masochisme (S/M). Le bondage renvoie à la restriction physique du/de la partenaire par un ensemble de moyens, comme par exemple, le ligotage.
  • 4
    L’œuvre Self-Portrait/Pervert s’inscrit dans une trilogie d’autoportraits où l’artiste évoque son identité lesbienne  sadomasochiste de manière transversale. Pour une analyse conjointe des œuvres Self-Portrait/Cutting (1993), Self-Portrait/Pervert (1994) et Self-Portrait/Nursing (2004), voir Dumaine (2013).
  • 5
    À titre d’exemples, voir Gina Pane pour l’ensemble de son œuvre, et Suzanne Lacy, Judy Chicago, et al. pour la performance Ablutions (1972).
  • 6
    Plusieurs mythes sur la sexualité lesbienne s’avèrent persistants dans la culture populaire ainsi qu’auprès de divers intervenants de la santé, notamment le mythe d’une sexualité lesbienne où la génitalité est secondaire et dans laquelle prime l’amour conjugal (Iasenza, 2008).
  • 7
    À noter ici que les rôles top et bottom ne sont pas confinés à une dynamique butch/top: fem/bottom.
  • 8
    Dans son contexte langagier vernaculaire, l’expression anglaise genderfucking renvoie aux traductions françaises suivantes: «niquer le genre» (contexte français) et «fourrer le genre» (contexte québécois).
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